ESSAI SUR LES PROPRIÉTÉS MÉDICALES DES PLANTES. ESSAI SUR LES PROPRIÉTÉS MÉDICALES DES PLANTES, COMPARÉES AVEC LEURS FORMES EXTERIEURES ET LEUR» CLASSIFICATION NATURELLE f Par M. A u g. Pyr.iDE CANDOLLE, Professeur de Botanique aux Facilités de Médecine et des Sciences de l’Académie de Montpellier , professeur -honoraire à l’Académie de Genève , Correspondant de l’Institut , des Académies Royales des Sciences de Munich , Turin , etc. seconde Édition, revue et augmentée; A PARIS, Chez CROCHARD, Libraire , rue de TEcole de Médecine, N.° 3. 1 8 1 6. AUX BOTANISTES FONDATEURS D E LA THÉORIE DES RAPPORTS NATURELS , J. et G. BAUHIN ? TOURNEFORT , MAGNOL , RAY, MORISON, Qui l’ont pressentie ; BERNARD DE JUSSIEU, Qui la prouvée ; A D A N S O N, Qui l’a développée ; ANTOINE-LAURENT DE JUSSIEU l Qui Fa soumise à des lois fixes ; DESFONT AINES, Qui l’a liée avec Fanatomie végétale ) RI CHARD, Qui l’a éclairée par l’analyse des fruits j R O B. BROWN, Qui Fa étendue par l’examen des Plantes de la Nouvelle-Hollande, 3 * ■ < ■ v ■ 7 PRÉFACE. La première édition de cet ouvrage a paru en 1804. Je la donnai comme Thèse inaugurale pour obtenir le grade de docteur en médecine à la Faculté de Paris. Depuis cette époque, j’ai eu fréquemment occasion d’apprendre de nouveaux faits sur les pro- priétés des Plantes qui ne sont pas géné- ralement usitées , et j’ai vu que ces faits tendaient presque tous à diminuer le nom- bre des exceptions que j’avais moi-même signalées comme contraires à la Théo- rie que j’avais embrassée; les ch ange - mens que la classification naturelle des végétaux a subis depuis dix ans , ont en- core eu pour résultat de faire disparaître un grand nombre d’anomalies ; ces véri- fications de la doctrine que j’ai cherché à établir, jointes à l’approbation que les juges les plus éclairés sur ces matières ont bien voulu donner à mon travail ^ m’ont t 'Vil) engagé à en publier une seconde édition. J’y ai suivi la même marche que dans la première , mais j’y ai intercallé un assez grand nombre de faits nouvellement ob- servés ? en ayant soin de citer avec plus d’exactitude encore ceux qui sont contrai- res à la loi de l’analogie ? que ceux qui lui sont conformes. Quant à l’ordre et à la circonscription des familles ? j’ai suivi? à de légères exceptions près , le tableau que j’en ai présenté dans ma Théorie Elé- mentaire delà Botanique (i) ; tableau qui est lui-même l’expression des opinions admises aujourd’hui par la plupart des classificateurs. Je désirerais beaucoup que cet ouvrage ^ tombant entre les mains de quelque chi* miste habile 7 pût l’engager à diriger une série d’expériences vers ce point particulier de la science , d’analyser quelques plantes de tontes les familles 5 et de rechercher si ( 1 ) Un yol. m-8.° Paris ; i8x3» Cheç Deterville f Èhrdr®i IX les matériaux immédiats des végétaux se retrouvent avec quelque exactitude dans les sucs ou les organes analogues des es- pèces ou des genres du même ordre naturel. La chimie végétale a fait sans doute de grands progrès dans ces dernières années ; mais je ne crains point d’être désavoué par ceux mêmes auxquels ces progrès sont dus , en disant que cette branche de la science est encore loin de sa perfection. L’étude des matériaux immédiats des plantes, sur laquelle repose toute la con- naissance de leur nature intime , de l’art de préparer les végétaux pour nos besoins ? et de la possibilité de les remplacer les uns par les autres , cette étude , dis-je , offre encore une foule de lacunes : on ne pourra croire qu’on connaît , sinon la totalité , au moins la grande majorité de ces matériaux, que lorsqu’on aura analysé avec quelque soin les divers organes des végétaux, et qu’on aura choisi des exem- ples dans toutes les familles des plantes. J’estimerai n’avoir pas été entièrement œ inutile^ si je puis engager quelque' chi- miste à entreprendre un travail si im- portant , et qui promet tant de résultats curieux. Comme nous ne possédons encore ni matière médicale r ni même d’ouvrage de botanique pure où les espèces soient ran- gées en familles naturelles, fai cru devoir terminer cet Essai par une Table alpha- bétique très-détaillée où tontes les plantes médicales sont renvoyées à leurs familles , soit par les noms systématiques , soit par leurs noms pharmaceutiques , soit même parleurs noms vulgaires; au moyen de cette Table , il sera facile de rapporter à leurs grouppes naturels tous les médicamens , et de distribuer ainsi d ? une manière con- forme à l’état actuel de la science , les notes et les collections de matière médi- cale. Je terminerai en faisant observer à mes lecteurs que mon but n’est point , dans cet ouvrage , de donner un Traité de bo- tanique médicale , mais d’indiquer seule- æj •ment , par des exemples plus ou moins nombreux' ? jusqu’à quel point on peut établir des règles générales sur les pro- priétés des plantes. Il y a donc sans doute un grand nombre de faits connus des Pharmacologistes dont je ne fais pas men- tion , dans la crainte que la multitude même des détails ne détourne les esprits du but que je me suis proposé. Quand j’ai cité quelques exemples bien pronon- cés de telle ou telle propriété dans telle famille ? ii m’a paru inutile de donner l’énumération nominative de toutes les espèces où cette même propriété s’est ren- contrée. Je lue me suis écarté de cette règle que dans là famille des Champignons 9 où j’ai cru devoir insérer quelques détails plus circonstanciés relativement à la dis- tinction des espèces vénéneuses ou ali- mentaires. Puisse cette nouvelle esquisse de la Botanique médicale 9 engager les voya- geurs à ne pas négliger l’étude des pro- priétés des végétaux exotiques ; les méde- cins à suivre des principes réguliers dans le choix des succédanés 9 et les élèves à estimer toujours davantage cette méthode naturelle 9 qui 9 appliquée successivement à tous les objets ? tend à faire sentir leurs véritables rapports 9 et à faire concourir à un seul but les diverses branches de l’é- tude de la nature. Montpellier , i.* r août i8i5. ESSAI SUR LES PROPRIÉTÉS MÉDICALES DES PLANTES £ COMPARÉES AVEC LEURS FORMES EXTERIEURES ET LEUR CLASSIFICATION NATURELLE. INTRODUCTION. On a dit depuis long-temps qu’une science est l’art de deviner ou de prédire : cette assertion , qui peut paraître absurde au premier coup- d’œil , et qui l’était peut-être dans le sens où elle a été avancée autrefois , devient rigoureu- sement vraie , si l’on entend par-là que la preuve la moins équivoque des progrès d’une science , est qu’elle puisse déterminer d’avance le résul- tat d’expériences qui n’ont pas encore été faites $ ainsi, le calcul d’une éclipse, le plan d’une machine et le prognostic d’une maladie , sont autant de prédictions qui montrent que l’Astro- nomie , la Mécanique , la Médecine , sont de véritables sciences. Cette faculté de déterminer l’inconnu par le i connu ? semble l’apanage des études , où l’on procède toujours par les relations d’effet et de cause , et c'est chez elles qu’elle s’est d’abord développée : on s’est aperçu plus tard que cette même faculté peut exister dans les sciences qui , comme l’histoire naturelle , semblent n’être qu’une réunion de faits isolés \ ainsi., en étu- diant l’organisation , on a reconnu d’abord que certains organes existent ou manquent toujours simultanément , tellement que la présence de l’un d’eux est un indice assez certain de l’exis- tence des autres ; on a reconnu ensuite qu’il est des organes qui exercent sur le reste de la struc- ture une puissance telle , que de la disposition d’une seule partie , on peut déduire la forme de plusieurs autres parties de l’individu $ ces deux principes ont fondé la théorie des rapports na- turels, et de ce moment seul l’histoire natu- relle a été élevée au rang d’une science. Sous ce point de vue , il faut convenir que l’étude de la matière médicale , quoique la plus immé- diatement utile parmi les connaissances hu- maines , est l’une des plus éloignées de la per- fection ; en effet , cette perfection n’aura lieu que lorsqu’on pourra résoudre ce problème : étant donné un être naturel quelconque , dé- terminer à priori l’effet que chacune de ses parties aura sur le corps humain , lorsqu’elle ( 3 ) sera appliquée dans des circonstances données. Les premiers essais ont été pendant longtemps des expériences faites au hasard, et la science ne consistait que dans le recueil de ces faits détachés. Ce n’est véritablement que dans les derniers siècles qu’on a cherché à lier par cer- tains principes , les faits nombreux que l’expé- rience avait constatés ou que les traditions avaient transmis. Ces principes , ou pour re- venir à ma première idée , ces moyens de déter- miner d’avance l’action d’un médicament , peuvent se classer sous trois chefs généraux ; les qualités sensibles , la composition chimique et Y analogie naturelle . Sans vouloir ici com- parer ces trois moyens qui, subordonnés à l’expé- rience , peuvent conduire à la vérité^ je m’at- tacherai seulement à développer ce qu’on peut attendre du dernier ; je ne ferai même cette recherche que relativement au règne végétal , parce que les expériences médicales ont été plus multipliées sur les végétaux que sur les deux autres règnes , et que la solution de cette ques- tion , relativement à l’un des deux règnes orga- nisés , conduira facilement à un résultat ana- logue pour l’autre règne. La plupart des auteurs anciens paraissaient croire que les plantes qui se ressemblent par leur forme extérieure, se ressemblent aussi par !.. ( 4 ) lënrs propriétés : on peut du moins le présu-* mer, d’après l’ordre dans lequel ils distribuent le plus souvent leurs médicamens, et d’après lès comparaisons qu’ils ont coutume d’éta- blir entr’eux $ le premier naturaliste médecin qui ait énoncé clairement cette opinion est Camerarius , auteur d’une dissertation de Con- venientiâ Tlantarum in fructijicatione et viri- bus (Tubing. 1699 ) \ depuis lors , cette opinion est devenue un sujet de controverse habituelle parmi les médecins et les botanistes 5 les uns, tels que Isenflamm ( 1 ) , Wilcke ( 2 ) , Gmelin (3) et plusieurs autres , se sont décidés pour l'affir- mative $ Murray y a donné une assez grande importance , puisqu’il a disposé les médicamens dont il fait l’histoire , d’après les ordres naturels et qu’il insiste souvent sur les rapports de leurs propriétés : mais aucun n’a énoncé une opinion aussi formelle à cet égard , que Linné , dans sa dissertation sur les propriétés des plantes (4) , (ij Methodus plantarum medicinœ clinicœ ndminicu - lam. Diss. Erlang. , 1 764* (2) De usu sjrstematis sexualis in medicinâ. Diss. Gryphyswalde , 1764» ( 3 ) j Botanica et chemia ad medicam applicatœ. Tu ~ hing. , 1755, Journ. Phys. 1 5 p. 48. ( 4 ) Amœn* Acad, , 5 . p. 14& ; m (5) où il établit que les plantes du même genre ont la même propriété , que celles du même ordre naturel ont des propriétés voisines , et que celles de la même classe ont aussi quelques rapports dan sieurs vertus. M. de Jussieu adopte la même opinion , et suit une gradation analogue dans un mémoire ( 1 ) sur le sujet qui nous oc- cupe , où il applique à cette belle et grande question , les principes de sa classification na- turelle ; enfin , depuis la première édition de l’ouvrage que je reproduis aujourd’hui devant le public , M. Cassel en a publié un sur le même sujet ( 2 ) , dans lequel il embrasse la même opinion et où il cherche même à montrer les rapports de propriétés qu’il trouve entre des familles analogues et entre les organes iden- tiques de familles diverses. M. Barton, dans ses essais sur la botanique médicale des Etats-- Unis d’Amérique (3) , (ouvrage d’où j’ai tiré plu- sieurs faits curieux propres à confirmer l’analo- gie des propriétés des plantes avec leurs formes ) (1) Mém. de la Soc. de Méd. , 1786 , p. 188. (2) Versuch über die naturlichen familien der pflcmzeit mit sücksicht auf hive heilkraft , von F. P. Casse L HCœln. ,1810. ( 3 ) Collections for an Essay towards a materia medica o f the united States, By Benj, Smith Barton» Philadel - phia } 2 fasc, 8.° 1&01 et 1804* ■(«) cite perpétuellement les rapports des plantes , de manière à prouver que ce genre de raisonnement l’a souvent guidé dans ses recherches médicales. D’un autre côté, nous trouvons Vogel (1), Plaz (2), et surtout Gleditsch ( 3 ) , qui s’élèvent contre la possibilité de juger des vertus des plantes , d’après leurs formes extérieures et leurs caractères botaniques ; Cullen (4) même paraît y attacher peu d’importance , quoiqu’il reconnaisse la vérité de cette analogie dans un grand nombre de cas , et qu’il y revienne plu- sieurs fois dans le cours de sa matière médicale. Au milieu de cette ambiguité parmi les au- torités les plus respectables , j’ai cherché à fixer ma propre opinion sur ce sujet important ; et si je me hasarde à publier ici mes réflexions , c’est qu’il m’a semblé qu’on n’avait pas encore fait usage, dans cette discussion, de tous les moyens que nous donnent les progrès récens de l’Histoire naturelle , de la Chimie et de la (1) Mat . Med. , p. 12. (2) De plantarum virtutibus ex ipsarum caractère botanico nunquam cognoscendis. 3 Dissert. Leips. , 2762 et 1763. ( 3 ) De Metkodo botanicâ dubio et fallaci virtutum in plantis indice. Diss. Francof. } 1742* ( 4 ) Mat . Med. 1 , p. i 35 . ( 7 ) Médecine elle-même ; car toute la matière mé- dicale se complique d’argumens et de faits déduits de ces trois sciences , et c’est peut-être à cette cause qu’on doit attribuer le peu de progrès-qu’elle a faits jusqu’à présent. La question que nous tentons de discuter ici , n’est pas seulement de pure théorie , comme on pourrait le croire au premier coup-d’œil ; elle intéresse de près le bien de l’humanité et le perfectionnement des sciences naturelles et médicales. Elle tend à rattacher à un même tronc toutes ces branches séparées de l’arbre de la science ; et dans l’état actuel des connais- sances humaines , dans une époque où des laits nombreux sont inscrits sur les registres de chaque science , est-il sans intérêt et sans utilité de collationner les registres de trois doctrines., et d’en tirer les résultats généraux auxquels on est arrivé par trois voies différentes ? La matière médicale est ce registre immense où la Méde- cine , la Chimie et l*Histoire Naturelle , dé- posent leurs découvertes \ si j’ai osé en tracer un chapitre, je ne me suis pas dissimulé les difficultés de cette entreprise ; je n’ai point pré- tendu donner une théorie nouvelle dans au- cune des sciences mères qui composent la ma- tière médicale , mais seulement comparer leurs résultats. Je m’estimerai heureux si mon travail ( B ) peut faciliter les applications d’une théorie indiquée par d’autres, mais que je crois sus- ceptible d’une plus grande extension et sur- tout d’une plus grande précision. Si les principes et la connaissance exacte des familles naturelles dataient d’une époque plus reculée , nous pourrions sans doute indiquer déjà plusieurs découvertes dues à cette théorie : quelques exemples récens peuvent du moins nous lés faire prévoir. C’est entièrement sur la loi de l’analogie entre les propriétés et les formes extérieures , que reposent les travaux intéressant des mé- decins qui ont cherché à substituer les inédi- camens indigènes aux médicamens exotiques* Connaîtrions - nous bien les propriétés émé- tiques de nos Violettes , sans l’Ipécacuahna ^ les vertus purgatives de nos Liserons et de nos Rumex, sans la Scammonée et la Rhubarbe? Aurait-on tenté dans plusieurs pays, de se nourrir avec la racine cuisante de l’Arum , si nous eussions méconnu les propriétés utiles de la colocase ? ou de faire du pain avec le gland commun, si nos pères n’avaient pas connu le gland doux ? Mais étendons nos regards au-delà de notre Europe \ et dans ce moment ou de nouveaux centres, de civilisation se forment de toutes (9 ) parts , où les deux Amériques , le Bengale , la Nouvelle-Hollande, offrent des colonies eu- ropéennes devenues maintenant indigènes de ces pays lointains , tentons de prévoir combien les médecins et les naturalistes de ces régions , pourront être plus promptement et plus sûre^- ment utiles à l’humanité , en se guidant dans leurs recherches sur les lois de l’analogie. Ils ont quitté l'Europe, enrichis de nos connais- sances sur les propriétés de certains végétaux. Arrivés sur une terre nouvelle, qu’au lieu de faire des essais au hasard , ils se guident par l’analogie 5 que les habitans des Indes cherchent dans leurs Rubiacées un nouveau Quinquina , une nouvelle Garance (1) , un nouvel Ipéca- cuanha , et ils cesseront de recourir à l’Améri- que et à l’Europe. C'est ainsi que les Américains deviendront chaque jour plus indépendans de l’ancien monde , en employant aux mêmes usages que nous des végétaux analogues : leurs Chênes leur fournissent le tan ; leurs Pins ont de la térébenthine comme ceux de l’Europe. S’il est un pays où la théorie de l’analogie, entre les formes et les propriétés , peut devenir éminemment utile , c’est l’Amérique septem (1) M Aub. du Petit- Thouajrs Fa trouvée dans fe Danais de CoHimerson. trîonale , qui , située à la même latitude que l’Europe, est peuplée de végétaux analogues. Mais nous - mêmes pouvons tirer une grande utilité de la recherche de médicamens et d’alimens analogues parmi des végétaux étrangers. Demandons - le à ces yoyageurs qui , loin de leur patrie, épuisés par de longues na- vigations , retrouvent sur uue côte étrangère et inconnue , des végétaux qui ressemblent à ceux de leur pays : c’est ainsi que Fprster , retrouvant une crucifere , ( Lepidiurn olera- ceum ) dans les îles de la Mer du Sud , s’en est servi avec succès comme anti-scorbutique $ c’est ainsi que Labillardière ^ en reconnaissant une nouvelle espèce de Cerfeuil dans son voyage autour du monde , procura à tous ses com- pagnons de voyage une nourriture saine et agréable. Ces applications , qui deviendront tous les jours plus fréquentes , si la loi de l’a- nalogie est admise , tendront tous les jours aussi à en prouver l’utilité. Il en est d’autres d’un emploi moins immé- diat , mais que nous ne négligerons pas d’in- diquer. Ainsi , en admettant cette théorie , on pourra mettre plus d’ordre et plus de méthode dans la description et dans la démonstration des médicamens 5 on pourra présumer à priori la place d’un médicament dont on ignore la ( il 3 véritable origine : ainsi on placera avec beau- coup de probabilité la gomme ammoniaque (1) et le Sagapenum , parmi les produits des Om- bellifères , le beurre de Galam parmi ceux des Laurinées , etc. ÿ on pourra enfin , de la con- naissance des propriétés des plantes, déduire des conséquences relatives à leur classification $ j’aurai occasion de citer l’exemple du Me- nyanthes , dont les propriétés fébrifuges in- diquaient la place parmi les Gentianées; de même la racine vénéneuse de la Métlionique , ne prouve-t-elle pas la vérité de son rapproche- ment avec les Colchicacées ? L’extrême diffé- rence médicinale des Valérianes et des Dip- sacées ne confirme-t-elle pas leur séparation? On voit donc que cette théorie , qui rap- proche les connaissances médicales et bota- niques , tend à perfectionner les unes par les autres , à rapprocher ces (Jeux études autrefois tellement unies , qu’elles semblaient presque inséparables. Cherchons donc à nous faire une idée précise du degré de confiance qu’elle mérite. ( 1 ) J’écrivais cette phrase en 1 804 , et trois ans après M. Wildenow a prouvé que la gomme ammoniaque était produite en effet par une ombellifère qu’il a nommé© Heracleum gummiferum. ( 12 ) Pour mettre quelque ordre dans les obser- vations que je soumets ici au jugement des naturalistes et des médecins , je commencerai par développer les preuves générales de l’ana- logie qui existe entre les formes et les propriétés des plantes > et les règles d’après lesquelles doit se faire la comparaison exacte des formes et des propriétés des végétaux : ensuite > dans ma seconde partie , j’appliquerai ces règles à chaque, famille en particulier. PREMIERE PARTIE. PRINCIPES ET REGLES DE LA COMPARAISON ENTRE LES FORMES ET LES PROPRIETES DES VEGETAUX. CHAPITRE PREMIER. Preuves générales qu’il existe une analo- gie entre les propriétés et les formes exté- rieures des plantes . Les preuves générales que les propriétés mé- dicales des plantes , sont en rapport avec leurs formes extérieures , se déduisent de la théorie , de l’observation et de l’expérience. S..I. er Preuves déduites de la Théorie, Si nous cherchons d’abord , par la seule théorie, d’où dérivent les propriétés des diverses ( H ) substances employées dans Fart de guérir, nous arriverons, dans le plus grand nombre des cas, à en trouver la véritable source dans la com- position chimique. Lorsqu’il s’agit de médica- mens dont la nature est bien connue , parce qu’elle est peu compliquée , tels que les sels , les acides , l’influence de leur composition ne peut être révoquée en doute , puisque le moindre changement dans cette composition intervertit la marche de leurs effets. Cette même loi se retrouve dans des médicamens plus compliqués , tels que ceux dont l’origine est due aux corps organisés $ nous voyons toutes les matières or- ganiques se réduire en dernière analyse, en un certain nombre de matériaux dont la compo- sition chimique est peu ou point variable, et qui, lorsqu’ils sont ramenés à leur état de pureté , conservent sensiblement les mêmes vertus 5 ainsi la fécule est toujours nutritive $ la gomme ou le mucilage, toujours adoucissant et relâchant ; l’huilé fixe, toujours lubréfiante \ l’huile volatile, stimulante et aromatique , etc. Or, il est évident que ces divers élémens mé- langés dans diverses proportions , doivent for- mer des composés doués de nouvelles propriétés probablement intermédiaires entre celles des composans \ nous concevons de plus que si , dans un grand nombre de cas , nous ne pou» i5 ) yons expliquer aussi clairement l’effet des mé- dicamens composés, cette impossibilité tient beaucoup moins à la nature des choses qu’à notre propre ignorance $ mais, indépendamment de son action chimique, toute substance placée en contact avec le corps humain , agit par un simple effet mécanique , tel que son poids , sa masse , les aspérités ou le poli de sa superficie , sa faculté d’absorber ou d’exhaler l’humidité , de conduire ou de retenir le calorique , etc. 5 quelquefois aussi cette seconde source de l’ac- tion des substances étrangères est la seule qui ait lieu , et c’est ce qui arrive particulièrement dans les médicamens appliqués à l’extérieur. Nous voyons donc que tout l’effet des médica- mens sur le corps humain, doit être rapporté, ou à sa structure physique ou % sùr-tout à sa composition chimique. Mais cette structure physique, cette compo- sition chimique d’un médicament , ne dépen- dent-elles pas immédiatement de l’organisation du végétal qui le produit , et en particulier de la structure de cette classe d’organes qui a rapport à la nutrition ? C’est un phénomène continuellement présent à notre examen , que de voir diverses plantes nées dans uîï sol par- faitement semblable , produire des matières très- différentes , tandis que des végétaux analogues, ( *S) nés dans des sols différons , y forment des pro^ duits semblables. Sans vouloir nier l’influence du sol sur la végétation , on ne peut discon- venir que la structure des organes nutritifs ne soit la véritable cause de la nature des produits , lorsqu’on voit que si , dans le même sol , sous un vase fermé qui renferme une quantité d’air suffisante , on sème deux graines , V une de Millepertuis et l’autre d’Ortie , au bout de quelques jours la première développera deux feuilles criblées de petites glandes remplies d’huile essentielle , tandis que la seconde por- tera de petits tubercules pleins d’une liqueur caustique. Peut-on révoquer en doute l’in- fluence de la structure des organes nutritifs > lorsqu’on voit les diverses parties d’un végétal ou d’un animal renfermer des sucs diversement élaborés , doués de propriétés particulières , et cependant tous tirés primitivement de la même sève ou du même chyle ? Cette influence est tellement manifeste par la diversité des produits , que même dans les cas où nous n’ap- percevons aucune différence dans les organes , nous regardons cependant comme prouvé qu’il en existe, lorsque nous en voyons dans les résultats. Mais, me dira-t-on , puisque cette structure des organes de la nutrition qui détermine la ( *7 ) nature des produits d’un être organisé , c’est donc uniquement dans ces organes nutritifs qu’on doit cherche? les principes d’une classifia cation naturelle $ on a suivi cette marche dans la zoologie , elle a conduit à une classification qui paraît conforme à la nature 5 mais dans le règne végétal , on a pris les organes de la repro- duction pour bases de la classification , et con- séquemment la nature des produits végétaux n’a aucun rapport nécessaire avec leur classi* fication* Cette objection est trop importante , elle tient de trop près aux principes de la vraie bo-> tanique, elle reviendrait trop souvent dans lè cours de ce travail , pour que je ne me hâte pas d’y répondre aussi complètement que nies moyens me le permettront. Il est liors de mon sujet de démontrer ici > comme je crois qufil est facile de le faire , que la différence qui sé trouve dans la marche de la zoologie et de là botanique j n’est point arbitraire, mais tient à la nature essentielle des animaux et des vé- gétaux : on a dû , dans chaque règne , classer les êtres d’après la fonction dont les organes of- fraient le plus de variétés d’espèce à espèce, et le plus de constance d’individu à individu 3 car toute fonction, pourvu qu’on la connaisse en^ tièrement , peut conduire à une classification ( i8 ) naturelle. Cette proposition , qui pourrait paraître hasardée, deviendra, je pense, au moins très- probable à celui qui réfléchira que dans un corps organisé , aucune fonction n’est isolée $ mais que chacune d’elles est modifiée par l’autre : à celui sur-tout qui aura vu que dans tous les corps organisés , nous trouvons certains organes dont l’existence et la forme sont inti- mement liées , quoique no us ne puissions encore apercevoir entre eux aucune relation (1). L’étude des rapports naturels n’est autre chose que l’observation de la constance plus ou moins grande de ces réunions d’organes : d’après ce principe , le naturaliste place à côté les uns des autres tous les êtres qui ont le plus grand nombre d’organes communs ou sem- blables , et sépare ceux qui n’en possèdent en commun qu’un petit nombre ; d’où résulte que , tandis que la perfection d’un système artificiel est de ne compliquer le caractère des classes que du plus petit nombre d’idées possible , une méthode naturelle ^ au contraire , est d’autant plus parfaite , que les caractères des classes peuvent exprimer un plus grand nombre d’idées. Mais approchons-nous davantage de la ques- (1) V oyez le développement de ces principes dans la 2 'héoric élémentaire de la Botanique > page 78. ( *9 ) lion. S’il est démontré qu’une famille na- turelle renferme les plantes qui ont le plus grand nombre de rapports dans les organes de la reproduction , l’analogie la mieux fondée ne porte-t-elle pas à croire qu’elles en auront aussi dans ceux de la nutrition ? Nous voyons déjà que , dans le règne animal , quoique les classes soient établies d’après les organes de la nutri- tion , en prenant ce terme dans le sens le plus général , elles correspondent cependant d’une manière assez étendue avec les organes de la génération : de même nous voyons que dans les plantes , les caractères les plus importans de la reproduction , tels , par exemple, que la division des végétaux, selon que la graine est acotyiédone, monocotylédone ou dicotylédone , se trouvent maintenant d’accord avec la division tirée de l’existence et de la disposition des vaisseaux. Si nous ne pouvons pas encore annoncer avec certitude de tels rapprocliemens généraux entre les caractères secondaires de la fructifi- cation et ceux de la nutrition , nous en voyons cependant des exemples assez nombreux , pour être autorisés à penser que ces rapports existent réellement. Ainsi, lorsque sur plusieurs milliers d’individus , nous observons , sans en savoir la cause, que toutes les fois qu’une plante a six étamines , dont deux opposées plus courtes que ( 20 ) les autres , elle a quatre pétales disposés en croix , nous admettons comme certaine la con- cordance de ces deux faits ; si , sur le même nombre d’individus, nous trouvons que les feuilles sont alternes , nous admettons cette seconde réunion de caractères, quoique tirée d’organes plus éloignés , avec autant de facilité que la première , puisque nous ignorons la cause de l’une et de l’autre. Il serait facile de multiplier à l’infini des exemples semblables 5 mais il me paraît que les considérations que je viens de présenter , tendent à prouver que la structure des organes de la reproduction des végétaux, peut être un indice assez certain de la structure des organes de leur nutrition $ mais s’il est vrai, comme je l’ai avancé plus haut, que la structure des organes de la nutrition détermine la nature des produits du végétal , et conséquemment ses propriétés , il faudra convenir que les propriétés des plantes, sont d’accord avec leur classification en familles na- turelles. Tel est du moins le résultat général de la théorie dont nous étudierons ensuite les mo? difications. ( 2 * ) S- il Preuves déduites de V observation. Abandonnons cependant la théorie , ce guide dangereux, qui, lors même qu’il tient la bonne route , dépasse souvent le point où la vérité se trouve réellement , et recherchons si la simple observation des phénomènes ne nous donnerait pas, indépendamment de toute expérience , quelqu’indice sur les propriétés des plantes qui se ressemblent parla forme extérieure. Ici l’ins- tinct des animaux va nous servir de guide. Parmi les herbivores on peut distinguer deux classes : ceux qui se nourrissent indifféremment de tous les végétaux , et ceux qui sont destinés à ne se nourrir que d'une seule plante. Parmi les premiers, nous observerons, non les végétaux qu’ils recherchent , ce qui serait trop long, mais ceux qu’ils rejettent } et nous pour- rons remarquer qu’à l’exception desplantes qui, par leurs épines ou leur dureté, se soustraient à la voracité des animaux , ceux-ci rejettent ou recherchent également toutes les espèces d’un genre ou d’une famille 3 ainsi les bœufs laissent intactes toutes les Labiées , toutes les Véro- niques y les chevaux presque toutes les Cruci- fères} les bœufs, les chevaux., les moutons, les ( 22 ) codions , les chèvres , ne mangent presqu’au- cime solanée, tandis que ces animaux dévorent avidement les graminées , les légumineuses , les composées (i). Les animaux naturellement bornés à une seule nourriture, étendent souvent leurs dégâts sur des espèces du même genre ou de la même famille $ les insectes pourraient fournir mille exemples de ce genre d’instinct , ainsi le Curcu- lio Scrophulariœ IL.,, le Cy/iips Rosœ L. , la Rsylla Juncorum IL. ^ le Curculio Rumicis L, y le Cy nips Salicis , e te. attaquent plusieurs es- pèces des genres dont ils portent le nom , et quel- ques-uns vivent indifféremment sur toutes . Ainsi l’insecte précieux qui nous fournit la soie , est nourri dans divers pays avec les feuilles du mûrier blanc , du mûrier noir , du mûrier des Indes, du mûrier de Tartarie , du mûrier rouge. Allons plus loin , et nous trouverons quelques insectes dont l’instinct dépasse les limites du genre 5 ainsi , tout le monde a remarqué que dans les bosquets, les cantharides attaquenLd’a- bord les frênes , puis se jettent sur les lilas et les troènes et jusque sur les oliviers , seuls genres de la même famille qui soient géné- (i) Linné. Pan Suecus. ( ^3 ) râlement cultivés (i) 5 le sphinx du troène vit sur le troène , le frêne , les lilas 5 le papillon du chou sur le chou , la rave , la giroflée 5 la che- nille du Papilio daplidice vit sur toutes les plantes voisines du chou et sur le réséda , l’un des genres les plus voisins des crucifères que nous ayons dans ce climat $ la larve , nommée par Réaumur teigne à falbala , m’a offert un exemple frappant de cette espèce d’instinct ; on ne la trouve jamais dans la nature que sur l’as- tragale à feuille de réglisse 5 lorsque je mettais ces larves paître sur une touffe d’herbes où elles ne trouvaient pas de cet astragale , elles sé jetaient sur les autres légumineuses , et ne man- geaient de plantes d’une autre famille, que lorsqu’elles ne pouvaient trouver aucune légu- mineuse à dévorer. Dans tous ces exemples, qu’il eût été facile de multiplier / la nature ne semble-t-elle pas nous dire elle-même , que les sucs des espèces congénères jouissent des pro- priétés analogues? Les mêmes phénomènes que les animaux viennent de présenter , nous les retrouverons (1) Elles n’attaquent au contraire jamais les jasmins, qu’on avait mal-à-propos réunis à la famille des Oieinées 3 . et qui forment aujourd’hui une famille particulière. ( *4 ) en suivant l’iiistoîre des végétaux parasites $ fious pourrons encore ici , parmi les véritables parasites , distinguer ceux qui vivent indiffé- remment sur un grand nombre de plantes , comme le gui blanc, qui croît sur presque tous les arbres , et ceux que la nature a déterminés pour vivre sur une seule espèce , un seul genre ou une seule famille ; tel est , par exemple , le JLomnthus Ëuropœus , qu’on trouve dans le nord de l’Italie sur plusieurs espèces de chênes à feuilles caduques $ mais , dans cette dernière classe , l’exemple le plus frappant sera tiré des champignons parasites, et sous ce nom, je n’entends pas ces champignons qui vivent sur les troncs morts ou sur l’écorce des arbres vivans , puisqu’ils ne tirent rien de l’intérieur de la plante , et se nourrissent seulement de l’humidité superficielle j mais je désigne ces JJredo , ces Æcidium > ces Puccinia qui nais- sent sous l’épiderme , se nourrissent du suc de la plante, et sont presque tous strictement fixés à une seule espèce, Ces petits végétaux à peine ■visibles à l’œil et comparables aux poux et aux X icins des animaux , semblent aussi bien que les Insectes , connaître la classification naturelle , et au défaut de leur nourriture , trouvent un aliment analogue dans les espèces voisines $ ( 25 ) Ainsi les Puccinies des Rosiers (1) , des Ronces (2), des Circées ( 3 ), des Menthes (4), des Rai- ponces ( 5 )^ des Trèfles (6) les Ureclo des Rosiers (7) , des Ronces (8) , les AEcidium du Pin (9) , des Violettes (io),desPrenanthes (1 1) , du Tussi- lage (12) 3 etc, , vivent indifféremment sur diffé- rentes espèces des genres dont ils portent le nom 5 bien plus , les trois espèces (i 3 ) confondues $ous le nom de Tremelle des Genévriers , et qui, sons le nom de Gymnosporangium , cons- tituent aujourd’hui un genre particulier , vivent toutes les trois sur diverses espèces de Gené- vriers , et ont même attaqué les Genévriers étran- gers naturalisés dans nos jardins. Allons plus (1) Puccinia Rosæ. F/. Fr. Pucc. mucronata. P ers, (2) P, Rubi. Hed'W. fil, é ( 3 ) P. Circeæ. Fers. (4> P. Menthæ. Fers. ( 5 ) P. Phyteumarum. Fl. Fr, (6) P. Trifolii. Hedw. fil. (y) Uredo Rosæ. Pers. (8) Uredo Rubi. Fl. F , (9) AEcidium Pini. Pers. (10) AEcidium Violarum. Fl. Fr. (11J AEcidium Prenantbis. Pers , (12) AEcidium Tussilaginis. Pers. (1 3 ) Gymnosporangium conicum. Hed’W.fil. —G, fus^ cum. Fl. Fr, — G. clayariseforme. Fl. Fr. ( 25 ) loin * et nous trouverons quelques espèces para- sites sur des familles entières ; ainsi la sphérie des Graminées (i) ? l’Uredo des Bleds ( 2 ) et l’Uredo linéaire (3) ? attaquent toutes les espèces de Graminées de nos prés et de nos moissons f l’Uredo Mycophyla , f ers. , se trouve sur plu- sieurs de nos grands ch ampignonsj l’Æcidimn des Borraginées ( 4 ) , l’Uredo (5) , l’JËcidium des Ghicoracées (6) , l’Uredo des lienoncu lacées (7) , etc. ? croissent sur presque toutes les espèces indigènes de ces familles. Par un si grand nombre d’exemples , la na- ture ne semble-t-elle pas ? je le répète , nous indiquer elle-même que les sucs secrétés par des plantes de même genre et de même famille , sont doués des mêmes propriétés alimentaires? Qu’on me permette d’indiquer ici en passant 7 une petite réflexion-pratique relativement à la naturalisation des arbres étrangers ; on a dit que l’un des avantages de cette introduction des végétaux exotiques * était de les soustraire aux ( 1 ) Spfseria Graminum. P ers. (а) Uredo Segetmn» Pers . (3; Uredo linearis. Pers. (4) -AEciclium asperiiôlii. Pers . (5) Uredo Cichoracearum-. Fl, Fr. ( б ) -AEcidium Gicîioracearum. Fl Fr. ( 7 ) Uredo Ptanunculacearum. Fl. F. Suppl. ( 2 7 ) ravages des insectes de leur pays , et de placer dans nos plantations des arbres que nos insectes sont forcés de respecter ; cette considéra don n’est vraie, que lorsqu’il s’agit d’arbres qui appartiennent à des familles ou à des genres très - différens de ceux qu'on rencontre en Europe ; ainsi les Frênes , les Chênes , les Gené- vriers étrangers sont attaqués par les parasites de leurs congénères européens , tandis que le Ster- cidia , le Gincko s Y A zedarach , Y Ari s totelia , le Kohlreutera , le Tulipier , le Diospyros et en général les arbres très-différens de ceux d’Eu- rope, sont très-rarement attaqués ; à égalité dans l’emploi et la facilité de la culture , ces arbres méritent donc la préférence. $. I I I. ê - Preuves déduites de V expérience. L’observation des phénomènes naturels a confirmé les résultats de la théorie 5 mais l’ob- servation elle-même , qui ne conclut les géné- ralités que par analogie, a besoin d’être sou- mise au jugement de l’expérience qui , dans les sciences physiques , décide en dernier ressort , comme l’usage dans les langues. Ce recours à l’expérience est d’autant plus nécessaire dans, ce cas qu’en observant les mœurs des animaux * (*8 ) nous trouvons d’autant plus d’exceptions , que les animaux sont plus voisins de l’homme. Si j’ouvre l’histoire de la matière médicale, j’observe qu’un grand nombre de médicamcns, même les plus actifs, qui , dans l’enfance de la science, avaient été regardes comme les pro- duits d’une. seule plante , se sont trouvés, lors- que leur histoire a été mieux suivie , appartenir à plusieurs espèces voisines ; ainsi le quinquina est tiré de toutes les espèces de vrais Cinchona , la rhubarbe de presque tous les Rhe um, l’opium de plusieurs Pavots , le seinen-contrà de plu- sieurs Absynthes, la térébenthine delà plupart des Pins $ ainsi l’histoire mieux connue de la gomme adragant, nous montre qu’on la tire de plusieurs Astragales épineux : il en est de même de la gomme arabique qui découle de plusieurs Acacias , ainsi , les racines de plusieurs Violettes, essayées dans des lieux divers, se sont trouvées émétiques, et je crois avoir rendu probable , que la propriété vermifuge de l’Hel- mintochorton est commune à plusieurs Céra- miums. Plusieurs espèces du même genre pro- duisent donc des médicamens tellement sem- blables, qu’avant de connaître leur histoire on les avait réunis sous un même nom. Il en est d’autres qui , mieux connues parce qu’elles sont indigènes, ont été toujours regar- ( 2 9 ) dées comme douées des mêmes vertus ; ainsi toutes les Mauves sont émollientes , les Co- cliléaria anti-scorbutiques , les Gentianes fébri- fuges , les Aconits et les Hellébores caustiques et dangereux, les Euphorbes âcres et purga- tives , etc. Allons plus loin, et nous verrons que lors- qu’une propriété bien marquée a été reconnue dans un genre , nous la retrouvons à un degré plus ou moins prononcé dans d’autres plantes de la même famille; ainsi le Pinkneya , voisin du quinquina , est , selon le témoignage de Michaux , employé comme fébrifuge ; plusieurs ruinex participent aux propriétés purgatives de la rhubarbe ; plusieurs matricaires , achillées et tanaisies à celle de l’absynthe , etc. L’analogie est quelquefois si prononcée que la famille entière participe aux mêmes vertus ; toutes les Graminées ont des graines farineuses et nutritives , et des tiges pleines d’une sève plus ou moins sucrée ; les Labiées sont stoma- chiques et cordiales ; les Ombellifères ont des semences toniques et stimulantes ; celles des Euphorbiacées sont âcres et purgatives ; le suc des Conifères est résineux ; l’écorce des Amen- tacées est astringente et fébrifuge , etc. On peut même soupçonner quelques res- semblances dans les propriétés de certaines fa- ( 3o ) milles qui se ressemblent par l'organisation ; c’est ce qu’on peut déduire des rapports qui existent entre les Gentianées et les Apocinées , les Personées et les Solanées , les Rhodoracées et les Erieinées , les Myrtinées , les Salicaires et les Rosacées, etc. Ajoutons à tous ces exemples que la lecture comparative des récits des voyageurs, prouve que les plantes du même genre ou de même famille , ont été employées aux mêmes usages par dès peuples fort éloignés qui ne s’étaient point communiqués entr’eux ; ainsi les racines du Uracœiia terminalis sont employées , par les Indiens , aux mêmes usages que celles du Sini- lax salsaparilla dans l’Amérique méridionale y ainsi l’écorce du Rhizophora gymnorhiza sert à teindre en noir dans les Indes , et les liabitans du Chili emploient au même usage le Lonicerct corymbosa ; ainsi REugenia malaccensis , aux Indes , et plusieurs Myrtes au Pérou , sont em- ployés contre la dyssenterie \ les liserons des quatre parties du monde , sont la plupart em- ployés comme purgatifs par différens peuples. J’aurai occasion , dans la seconde partie de cet ouvrage de revenir sur tous ces exemples d’uni- formité de vertus $ mais nous ne devons point dissimuler qu’au milieu de ce grand nombre de faits , qui tendent à confirmer la théorie , il se ( 3i ) présente plusieurs exceptions frappantes: la dangereuse Ciguë est à côté de Futile Carotte y la douce Patate touche l’âcre Jalap , l’amère Co- loquinte trompe l’œil par sa ressemblance ayec le Melon , la Pomme-de-terre se trouve classée au milieu des poisons , l’Ivraie parmi les Cé- réales , et l’arbre le plus voisin du Cerisier four- nit l’un des poisons les plus actifs du règne végétal. Peut-on raisonnablement tirer quelque con- clusion décisive ? lorqu’on trouve dans les vé- gétaux des exemples si contradictoires , des anomalies si étranges ? Avant de chercher à les résoudre , commençons par établir avec exac- titude les règles d’après lesquelles doit se faire la comparaison des propriétés des plantes avec leurs formes extérieures. CHAPITRE IL Règles de la comparaison entre les prôprié* tés et les formes extérieures . P armi Jes règles que Ton doit observer dans la solution de la question qui nous occupe , il en. est qui sont plus particulièrement relatives à la botanique 5 d’autres à la chimie , et d’autres à la médecine : je vais les indiquer succinctement y et les développer par quelques exemples* S. I. er Examen de la classification . Entre ces moyens d’arriver à la vérité , le plus indispensable est de chercher à nous faire une idée précise de la classification naturelle. Lorsqu’on a eu étudié les espèces -, on a grouppé en genres celles qui offraient un cer- tain nombre de caractères communs ou sem- blables 5 on a fait ensuite le même travail sur les genres , et on les a grouppés en familles d’après des principes analogues. Lorsque les auteurs de ce vaste travail ont voulu faire passer leurs résultats dans l’esprit des autres ( 33 ) tommes , ils ont été obligés , pour la rédaction de leur ouvrage, de ranger les espèces dans les genres, et les genres dans les familles ? d’après une série continue : de cette méthode , peut-être nécessaire pour l’étude , il est résulté que plu- sieurs naturalistes célèbres ont cru que les êtres naturels formaient réellement une chaîne ou série continue , dans laquelle les genres et les famille s formaient seulement des points de repos $ on s’est même confirmé dans cette idée , en croyai t reconnaître une semblable série dans le règne, animal. Mais la nature ne marche point comme nos livres > chaque être se trouve réellement placé entre un certain nombre d’autres êtres avec lesquels il a plus ou moins de rapport ; et Je seul moyen de nous faire une idée de cette disposition, est de nous représenter les êtres naturels placés, non en série, mais sur une carte géographique. Cette idée , indiquée par Linné , développée par l’Héritier et Petit- Thouars , incomplètement exécutée par Gisèke et par Batsch , n’est en ce moment , pour nous , qu’une métaphore propre à jeter du jour sur la question qui nous occupe imaginons cette carte exécutée : les espèces sont les bourgs , les genres répondent aux provinces, les familles sont les empires , les classes sont analogues aux parties du monde , et les plantes encore isolées o o ( 34 ) sont représentées par des îles éloignées de tout continent. Si , dis-je , cette carte exécutée com- plètement paraissait devant nous , la première chose qui frapperait nos regards , comme dans une vraie carte géographique , serait que dans certains empires ou certaines provinces , les bourgs sont très-rapprochés les uns des autres , tandis que dans d’autres nous les verrions très- éloignés. Cet éloignement tient, comme dans la géographie , à deux causes ; ou bien à ce que les êtres intermédiaires sont encore inconnus , ou bien à ce que la nature a réellement laissé dans l’ordre des êtres , çà et là , des espaces vides , tout comme elle a laissé , sur le globe , des marais et des déserts inhabitables. Voilà donc une première cause d’inexactitude , la distance inégale des êtres dans divers genres ou dans diverses familles naturelles : on ne doit pas plus s’étonner que les Graminées , les Labiées , les Crucifères et les Malvacées , se rap- prochent beaucoup par leurs propriétés , tandis que les Caprifoliacées , les Rutacées, les Urticées et quelques autres familles , offrent des ano- malies , qu’on est surpris , dans l’ordre social, de voir les pays très-peuplés et très-civiliséâ offrir des mœurs uniformes , tandis que les régions presque désertes ou coupées par des fleuves et des chaînes de montagnes , offrent de grandes différences. ( 35 ) 2. 6 Quelquefois, dans l’ordre politique , Oîi réunit un bourg isolé ou une petite île à là province la plus voisine : ainsi dans l’ordre na- turel , pour éviter la multiplicité des divisions 9 on accole à un genre ou à une famille , une espèce qui en diffère par l’organisation $ c’est ce qui est arrivé , qüand on a réuni la Ficaire aux Renoncules , la Mâche aux Valérianes, ou bien les Valérianes elles-mêmes aux Dipsacées 9 les Fumeterres aux Papaveracées , etc. Dans ces cas , si les propriétés diffèrent , c’est que l’or- ganisation diffère aussi, et l’exception con* firme la règle. 3 .° Il arrive souvent que telle plante qui s’éloigne , par ses propriétés , de la famille ou du genre dans lequel on l’a placée , se trouve appartenir réellement à une famille différente, lorsque son organisation est mieux connue 5 ainsi le Ményanthes , réuni d’abord avec les Primulacées , étonnait par ses propriétés fébri- fuges 5 Ventenat a prouvé , par l’organisa- tion du fruit , qu’il appartient à la famille des Gentianées , où l’on retrouve la même vertu. Ainsi , je crois avoir fait disparaître quelques- unes de ces anomalies , en prouvant que le Quassia n’est pas de la même famille que les Magnoliers ; que les Strichnos doivent être sépa- rés des Apocinées , les Valérianes des Dipsacées * 3 .. ( 36 ) les Lins des Cariophyllées , les Globulaires des Priinulacées , etc. etc. Des observations ana- logues y dues au perfectionnement de la science , tendront probablement dans la suite à dimi- nuer le nombre des exceptions connues ; et l’on peut déjà remarquer dans plusieurs cas , que les plantes qui s’éloignent du groupe par les propriétés ? s’en éloignent aussi par la structure $ tel est le Crescendo, panniles Solanées , le Pœo - nia parmi les Renonculacées , le Phytolacca parmi les Clienopodées , le Poivrier parmi les UrticéeS; etc. etc. S. I I. Comparaison des organes . L’examen de la classification vient déjà de faire disparaître quelques-unes des exceptions qui semblaient contraires aux résultats que la théorie nous a indiqués \ essayons maintenant de déterminer comment on doit comparer les propriétés des différentes plantes les unes avec les autres , Il rne semble nécessaire de distinguer ici les propriétés générales , c’est-à-dire , communes à tontes les parties de la plante et les propriétés spéciales , c’est-à-dire, particulières à l’un de s:s sucs ou à l’un de ses organes. ( 3 7 ) Quant aux premières, on ne doit y donner , selon moi , qu’une médiocre attention 5 ces pro- priétés générales sont évidemment un résultat du mélange de toutes les propriétés spéciales , et dépendent uniquement de la proportion di- verse des parties de la plante ; proportion ex- trêmement variable et de peu d’importance à observer sous le point de yue qui nous occupe. Si les sucs exprimés de certains végétaux ont des propriétés constantes , c’est qu’ils sont composés de certains sucs particuliers , dont la proportion est à-peu-près fixe dans la plante ; et sous ce point de vue , ils rentrent dans la classe des propriétés spéciales. Celles-ci me paraissent seules dignes de fixer notre attention dans la comparaison que nous cherchons à établir : il est évident qu’on doit mettre en parallèle chaque organe d’une plante avec l’organe correspondant d’une autre plante 5 et sous ce point de vue, plus on descendra dans les détails , plus on approchera de l’exac- titude. Ainsi , combien ne voyons-nous pas de plantes qui jouissent de propriétés fort diffé- rentes dans leurs diverses- parties l M. de Jussieu nous offre un exemple frappant de Futilité de cette exactitude, en nous montrant que dans les graines des Euphorbes et de plu- sieurs autres plantes , le périsperme est doux et ( 38 ) sam , tandis que l’embryon est âcre et forte- ment purgatif. D’après le principe que je viens d’énoncer et que son évidence dispense de prouver , nous ne comparerons point les tuber- cules de la Pomme-de-terre avec les baies des autres Solariums , les racines des Carottes avec les feuilles des Ciguës , et nous verrons déjà s’effacer quelques-uns des traits qui semblaient les plus prononcés contre l’analogie \ nous les verrons diminuer encore , si nous suivons les conséquences de cette comparaison d’organes. i.° li est évident que si quelques plantes d’une famille possèdent un organe particulier qui soit nul ou très-peu développé dans les autres plantes de l’ordre , nous ne devons pas nous étonner si les propriétés particulières à cet organe ne se trouvent pas dans les autres plantes de la famille : ainsi, si la pulpe des Vanilles jouit de propriétés aromatiques , qui ne se retrouvent point dans la famille des Or- chidées , n’en trouvons - nous pas la cause , en remarquant qne la pulpe qui entoure leurs graines, manque entièrement dans les autres genres de la famille ? N’en est-xi pas de même pour la pulpe douce et laxative de la Casse et du Tamarin , qui manque dans la plupart des Légumineuses ? Allons plus loin , et nous trouverons certains organes , pour ainsi ( 3 9 ) dire accidentels, qui jouissent des mèmès pro* prietés toutes les fois qu’ils se développent , quelles que soient d’ailleurs les propriétés delà famille 3 ainsi, les tubercules qui naissent sur les fibre de certaines racines , et qu’il faut bien distinguer des tumeurs dues au simple ren- flement de la souche radicale , sont tous des espèces de réservoirs pleins d’une fécule douce et nourrissante , comme on le voit dans la Pomme- de- 1 erre , le Topinambour , la Patate, la Filipendule, etc. 2. 0 Si , au contraire , les propriétés dont nous faisons le plus fréquent usage , appar- tiennent à quelqu’organe éminemment essen- tiel à la famille , nous trouverons aussi que ces propriétés offriront peu de variations. Ainsi le périsperme farineux des Graminées , est par- tout nutritif et d’une saveur" agréable ; les graines des Ombellifères qui offrent toutes de petits vaisseaux remplis d’huile essentielle , sont toutes stimulantes et aromatiques, etc. 3 .° Si les mêmes propriétés paraissent se re- trouver dans des plantes voisines , mais dans des organes differens , on peut , ce me semble , trouver la cause de cette anomalie , en étudiant avec plus de soin les rapports de ces organes. Ce sujet , qui tient à l’anatomie végétale , exigerait des développemens assez longs et peut- ( 4 ° ) être des connaissances que la botanique n’a point encore acquises $ je me contenterai de citer quelques exemples qui pourront en faire sentir Futilité. Lorsqu'on examine la série des plantes inonocotyiédones , on est surpris de ■voir les bulbes des Liliacées , fournir de la fécule àpeu-près comme le tronc des Palmiers , tandis que quelques autres racines bulbeuses ont une propriété purgative , analogue à celle du suc que FAloës renferirie dans sa tige et dans ses feuilles. Cette ressemblance entre les tiges et les bulbes , qui peut paraître une exception à la règle que j’ai tenté d’établir, en est au contraire à mes yeux une confirmation ; l’ana- tomie végétale prouve, cerne semble, que la bulbe ne doit pas être assimilée aux racines mais aux tiges : je m’explique. Dans toutes les bulbes , on distingue trois parties : les radicules qui en sortent en des- sous , et qui sont les vraies racines ; les écailles ou tuniques qui l’entourent en dessus , et qui sont des feuilles avortées > un plateau ordinaire- ment plane et orbiculaire , qui , selon moi , est D tige de la plante. Je fonde cette opinion, i.° sur ce que ce plateau porte, comme nous venons de le voir , les feuilles d’un côté , et les racines de l’autre, ainsi que toutes les véri- tables tiges ; a.° sur ce qu’il s ’alonge quelque^ ( 4 1 ) fois par la culture , dans les individus d’une même espèce , de manière à prendre l’apparence d’une tige ; 3.° sur ce que des espèces évidem- ment congénères , telles que certains Aulx , certains Antlierics offrent , les unes un plateau , d’autres une souche plus ou moins alongée $ 4.° sur ce que parmi les Liliacées , nous ne voyons de bulbes que parmi les plantes sans tige et réciproquement j 5.° sur ce que certaines Graminées présentent accidentellement la for- mation d’une bulbe due à la même cause , c’est-à-dire, au rabougrissement de la partie inférieure de la tige , qui se trouve alors re- couverte par la gaine des feuilles ; 6.° sur ce que si les bulbes n’étaient pas des tiges rabou- gries , on les verroit tendre, îîon à monter, mais à descendre comme les véritables racines. Je vais plus loin : et je crois que par des arguxnens absolument semblables , on peut prouver que dans toutes les dicotylédones , il n’existe point de plante véritablement dépour- vue de tige ( acaulis ) , mais que la tige existe rabougrie au collet de la racine y et que par conséquent ce qu’on nomme hampe , doit être assimilé aux pédoncules et non aux tiges y alors on concevra comment dans la même famille et dans le même genre , il se trouve des plantes dites caidescentes et ac a ides y on cou** ( 4 * ) cevra en particulier , pour me rapprocher de mon sujet, comment tous les Plantains, toutes les Chicoracées , un grand nombre de Légu- mineuses , ont les mêmes propriétés, quoique distinctes en apparence par un caractère aussi singulier que l’existence ou l’absence d’une partie aussi importante que la tige. s. ni. Examen des circonstances ou se trouvent les Végétaux au moment oit on les emploie . Nous avons jusqu’ici examiné les restrictions que la structure même des végétaux apporte à la loi de l’analogie entre les formes et les pro- priétés; il nous reste maintenant à déterminer l’influence qu’exercent sur cette loi les circons- tances où se trouvent les végétaux à l’époque où l’on a coutume de les employer. Parmi ces circonstances accidentelles, la plus importante à examiner est celle qui tient à la nature du terrain dans lequel la plante a végété. Quoique la manière dont le sol influe sur les végétaux soit encore mal connue , on ne peut cependant méconnaître son importance. M. Théodore de Saussure vient de nous mon- trer que cette influence s’étend plus loin qu’on ne le croyait, en remarquant que les memes (43 ) plantes , nées dans des terrains granitiques oii calcaires , offrent des différences notables dans leur composition chimique et dans leurs pro- priétés nutritives. L’attention des physiologistes est éveillée depuis trop peu de temps sur cet objet , pour que nous puissions en tirer encore des conséquences directes $ mais nous connais- sons davantage l’influence du sol sous d’autres rapports : ainsi, dans certaines familles nous voyons les propriétés des mêmes plantes varier beaucoup , selon qu’elles ont crû dans un lieu sec ou dans un sol humide $ 1 ' H eracleum sphon- dylium , plante commune dans nos prairies, et que les différens bestiaux mangent d’ordinaire sans inconvénient , devient quelquefois véné- neuse , lorsqu’elle croît dans im lieu trop hu- mide , ou que l’année est trop abondante en pluie. Nous voyons de même le Céleri âcre, nauséabonde et vénéneux , lorsqu’on le recueille dans les marais où il croît naturellement , de- venir doux et propre à notre nourriture , lors- qu’il est cultivé dans un terrain sec. Si la même espèce d’Ombellifère nous offre des ano- malies semblables , devons-nous être surpris de voir les autres plantes de cette famille , ac- quérir en général une propriété plus ou moins vénéneuse , lorsqu’elles croissent dans les lieux aquatiques , comme on le voit par les Thel - ( 44 ) ïandrium aquaticum , Ciciila virosa , OEthusa cynapium , OEnanthe crôcata , etc. ; tandis qu’au contraire celles qui croissent dans les lieux secs et exposés au soleil , sont toutes plus ou moins douces, aromatiques et stimu- lantes : telles sont : Av^elica archanlegica , Eo ri a n dru m satlvum ^ Aneî/iumjœriiculum > etc. D’après la même observation , doit-on s’étonner si les Ombellifères vénéneuses sont toutes ori- ginaires des pays froids ou tempérés , tandis que celles qui croissent dans des pays chauds , sont toutes aromatiques et utilement employées comme stimulantes ? Cette même influence de l’humidité plus ou moins grande du sol , se fait sentir dans plu- sieurs autres cas, et c’est à cette cause qu’est due en partie la supériorité des plantes cueil- lies sur les montagnes d’avec les mêmes espèces récoltées dans les plaines. Cette différence est due encore à une seconde cause qui modifie puissamment les produits des végétaux} je veux parler ici de la plus ou moins grande quantité de lumière dont ils sont frappés. Le soleil influe sur les propriétés des plantes , par sa chaleur, qui en dégage rhumidité sur- abondante , et par sa lumière , qui favorise la combinaison du carbone } la réunion de ces deux effets tend toujours à exalter les propriétés ( 45 ) des plantes , d’où résultent deux faits en appâ*- rence contraires : si les plantes d’une famille sont douées de propriétés qui exigent la combinaison parfaite des matières élémentaires , telles que les Ombellifères , on les trouve d’autant plus utiles , qu’elles croissent plus exposées au soleil: si y au contraire y les sucs d’une autre famille tendent à former des composés amers ou nui- sibles par leur âcreté 7 on empêche ces sucs d’atteindre à leur perfection, soit en employant les plantes dans leur première jeunesse , comme on le fait pour la famille des Asparagées et des Chicoracées, soit en prolongeant ^ pour ainsi dire, cette jeunesse, par la privation de la lumière ou l’étiolement y c’est ce qui arrive pour plusieurs Chicoracées et Cynarocéphales. Je saisis cette occasion de faire remarquer comment , dans certains cas , la théorie des familles naturelles vient au secours de la phy- sique végétale , pour expliquer certaines anoma- lies apparentes produites par un même agent. Indépendamment de l’influence du sol et de la lumière, on peut encore observer que l’âge même de la plante influe sur ses propriétés aussi bien que l’époque à laquelle on en fait la récolte : ainsi le Colchique est beaucoup plus dangereux au printemps qu’à l’automne; ainsi les fruits jouissent de propriétés bien différentes , ( 46 ) selon que lèur maturité est plus ou moins avan- cée. Ces sources d’erreurs sont si frappantes , qu’il suffit de les énoncer ici. S. I V. Composition chimique . Notis venons de parcourir lés différentes cir- constances que la structure même des végétaux Uous présente , pour expliquer les anomalies contraires à la théorie. Considérons un instant , soUs le même point de vue , la nature chimique des plantes : de même que parmi les caractères botaniques , il en est de constans, et d’autres plus ou. moins accidentels ; de même aussi parmi les substances que la chimie découvre dans le règne végétal , il en est qui, comme la fécule, la résiné, le camphre, etc., s’y pré- sentent d’une manière fixe et constante , et d’autres qui offrent habituellement des varia- tions dans les proportions de leurs élémens , et conséquemment dans leurs propriétés ; dans cette dernière classe , je citerai particulièrement les gommes-résines, qu’on regarde avec assez de vraisemblance comme des combinaisons na- turelles de gommes et de résines. D’après cette idée , on peut comprendre facilêment que si la, gomme d’un côté, et la résine de l’autre , ont ( 47 ) des propriétés différentes , comme l'expérience le prouve , les gommes-résines devront avoit des propriétés très-diverses , selon les propor- tions de ces deux élémens ; et l’observation nous montre, en effet, que plusieurs des familles dans lesquelles nous avons remarqué les ano- malies les plus frappantes , abondent en sucs gommo -résineux 5 telles sont, par exemples , les familles des Ombellifères et des Liserons ; on pourrait encore citer , comme un exemple de mélange de principes divers , et conséquem- ment de propriétés différentes , ceux des maté* riaux immédiats des végétaux , auxquels on a donné les noms d’extractif*, de matière colo- rante, de sève , etc. Indépendamment des combinaisons intimes de certains principes , telles et des racines âcres et corro- sives, telles que VA. maculatum ; on pourrait citer de même le Manioc , la Bryone , qui offrent des mélanges semblables. On peut encore trouver la solution de quel- ques anomalies , dans un autre genre de con- sidérations chimiques : on sait que parmi les matériaux immédiats des végétaux , il en est qui ne sont que divers états particuliers d’une même substance $ ainsi le corps muqueux se change en sucre , le sucre semble fournir les élémens de la fécule , l’huile fixe se transforme en cire , et l’huile volatile en résine , peut-être par l’addition de l’oxigène, etc. Ces diverses trans- formations dont nous sommes encore loin de connaître toute l’étendue , peuvent, dans plu- sieurs cas , nous servir de moyens pour conce- voir comment des plantes de la même famille naturelle , peuvent nous offrir des substances assez différentes en apparence : ainsi certaines Conifères, au lieu de résine entièrement formée, nous présentent de l’huile volatile , c’est-à-dire , de la résine incomplètement oxigénée 5 ainsi le Caoutchouc, qui est produit, comme on sait , par le suc de l’Hevea , plante de la famille des Euphorbes , paraît se retrouver dans le suc des autres Euphorbiacées , mais dans un état (49 ) incomplet et non développé : on sait, en effet, que le suc du Ricin et celui de plusieurs Eu- phorbes , étant desséché à l’air, acquiert une couleur brune , et conserve pendant quelque temps une élasticité assez remarquable. Nous trouvons donc dans les connaissances chimiques actuelles, trois moyens d’expliquer les anoma- lies qu’on observe dans les familles naturelles , savoir : la combinaison intime de divers élé- mens , le mélange de différens principes et l’état plus ou moins complet de chacun d’eux. A ces considérations nous pourrions ajouter encore , que plus l’analyse végétale lait de progrès, plus elle fait disparaître des anomalies en apparence contraires à la théorie $ ainsi elle montre que des qualÿés qui paraissaient sem- blables , sont produites dans diverses familles par des principes réellement différens $ ainsi quoique la saveur amère dénote en général des propriétés analogues dans les végétaux qui en sont doués, cette proposition n’est rigoureuse que lorsqu’il s’agit de végétaux de la même famille 5 ainsi le principe amer et vénéneux des Strichnées , le principe amer et vénéneux des Menispermées , le principe amer et salubre des Gentianées ; le principe amer et annualisé des Armoises , le principe amer et résineux des' Magnoliacées , le principe amer et éminemment 4 ( 5o ) soluble à l’eau des Simaroubées, le principe amer de l’Angustura qui donne avec le fer un précipité jaune, celui du Cliamadrys qui pré- cipite le fer en vert , enfin celui du Quinquina qui précipite la noix de galle , et se dissout également dans l’eau et dans l’alcool $ tous ces divers amers , dis- je , sont des matières diffé- rentes et ne peuvent pas être rigoureusement comparés \ nous arriverions au même résultat si nous comparions de la même manière les astringens , dus tantôt à l’acide gallique comme dans la Ratanhia , tantôt au tannin comme dans les Acacias , tantôt à la réunion de ces deux matières, etc. Ces considérations importantes nous don- nent encore une réponse à l’une des objec- tions les plus piquantes qui aient été faites (1) contre 3 ’analogie des formes et des proprié- tés , savoir ^ que les mêmes propriétés se re- trouvent dans des familles très - différentes. Cette assertion est rigoureusement vraie, lors- qu’il s’agit de propriétés déterminées sur des matériaux chimiques parfaitement purs et identiques dans tous les végétaux j ainsi les légères nuances qu’on observe entre les proprié- tés des fécules , des huiles fixes , des gommes , (1) Par M. Hallé. ( 5 ! ) des matières ligneuses etc. , sont peu. impoï^ tantes ; mais dès qu’il s’agit de principes moins rigoureusement semblables et moins générale- ment répandus dans les végétaux , la distinction des familles reprend toute son importance t ainsi , comme nous venons de le voir y les amers 5 les astringens ? ne scmt semblables entr’euxque dans la même famille ; tous les médecins savent très-bien que l’action des narcotiques , tirés de familles diverses ? est bien loin d’être la. même : ainsi on trouve des narcotiques dans les Papa- veracées ? les Chicoracées, les Borraginées , les Drupacées, les Solanées > lesNympliœacées etc. P mais ils sont tous différens les uns des autres , et ne sont pas plus confondus dans la pratique du médecin > que dans la classification du botaniste ; l’application de la théorie des rap- ports naturels à la matière médicale ? peut même être utile ? comme moyen de classer avec assez d’exactitude , dans plusieurs cas ? les va- riétés qui se présentent dans une même série de médicainens : ainsi pour ne pas sortir de l’exemple que je viens de citer, il me semble qu’une classification des narcotiques , fondée sur les familles des plantes , serait au moins aussi exacte que toutes celles qu’on trouve dans la plupart des matières médicales. 4 -\ ( 52 ) S- V. Comparaison du mode d > extraction et de préparation. Ces considérations et plusieurs autres qui sont du ressort immédiat de la chimie , nous expliquent comment des différences , en appa- rence légères , dans le mode d’extraction et de préparation des médicamens , influent puis- samment sur leur nature , et conséquemment sur les propriétés apparentes des plantes dont on les extrait. Mais il est évident qu’il ne peut exister de comparaison exacte entre les pro- duits des végétaux , que dans le cas où l’extrac- tion et la préparation de ces produits a été suffisamment semblable pour ne point altérer ou pour altérer également leur nature. Pour- rait-on, par exemple, tirer la moindre con- clusion relativement aux propriétés réelles des plantes , de la nature que leurs sucs auraient acquise après avoir subi une des trois- espèces de fermentation ? Cette manipulation compli- quée rapproche les produits des végétaux hé- térogènes tels que le Palmier, les Vignes , les Groseillers , les Pommiers, etc. $ tandis qu’elle peut varier à l’infini les produits d’une même espèce , comme le prouve l’exemple des sucs ( 53 ) divers , tels que le vin, le vinaigre, l’eau-de- vie , Falkool , etc. , tous tirés des mêmes raisins. Plusieurs des propriétés de certains végé- taux , et qui nous paraissent en opposition avec la loi de l’analogie botanique , tiennent à ce qu’on applique à ces plantes des procédés particuliers : ainsi avant qu’on eût tenté d’ex- traire Peau distillée de plusieurs espèces de Rosacées, pouvait-on regarder comme isolée dans la nature , la propriété vénéneuse de Feau distillée du Laurier cerise ? Nous voyons déjà qu’une manipulation uniforme a su retrouver , dans des plantes analogues , des propriétés semblables qu’on était loin d’y soupçonner: ainsi Bernard de Jussieu , guidé par l’analogie , a retrouvé l’aromate du Café dans les semences du Gratteron , préparées comme celles du Caféier. Ainsi parmi les Lichens crustacés , l’extrême diversité des couleurs qu’on en a extraites , tient beaucoup moins à la différence des matières colorantes , qu’aux changemens dans la manipulation. La diversité de préparation est une cause d’erreurs trop évidente , pour que je m’arrête plus long-temps à la développer , et après avoir ainsi suivi , pour ainsi dire , la formation du médicament , je yais chercher à mettre quelque ( 54 ) précision dans la comparaison des propriétés mêmes des drogues employées par la médecine. S. V I. Exclusion des propriétés mécaniques ou accu dentelles . c - Il convient d’abord d’observer que parmi les usages auxquels nous avons employé les végé- taux , il en est quelques-uns qui sont absolu- ment indépendans de la nature de ce végétal , et sur lesquels la loi de l’analogie ne peut , par conséquent , avoir qu’une influence très-légère et souvent absolument nulle. Ainsi, par exemple, lorsque le menuisier emploie la Prèle pour polir ses ouvrages , ou que le bonnetier se sert du Chardon à foulon pour tirer le poil de ses tissus , il est bien évident qu’ils emploient à leur usage des circonstances absolument acci- dentelles dans l’économie du végétal , et qui peuvent facilement ne pas se trouver dans l’es- pèce voisine j ainsi , lorsque le chien , poussé par son instinct , mange du Chiendent pour se faire vomir , on ne doit pas compter pour cela le Chiendent parmi les émétiques , puisque , selon toute apparence , il ne produit cet effet sur le chien , que parce que cet animal muni seulement de dents tranchantes , ne peut le ( 55) broyer , et qu’en l’avalant , à demi-mâclié , il produit sur l’œsophage la même irritation que eau se chez riioinme les barbes d’une plume enfoncée dans la gorge. Cet exemple peut nous faire concevoir comment parmi les remèdes employés même à l’intérieur , il peut s'en trouver qui agissent par dés circonstances pure- ment accidentelles. Quant à ceux qui produisent leur effet par des causes mécaniques , on peut , au milieu d’un grand nombre d’exceptions , reconnaître une certaine influence de l’organisation $ ainsi , par exemple , nous avons tiré des usages assez nombreux , soit dans l’économie domestique , soit dans la médecine , de certaines plantes que leur consistance à-la- fois molle , tenace et poreuse , rend propres à brûler avec facilité , lenteur et continuité , et cette consistance se retrouve dans plusieurs espèces voisines : ainsi la plupart des grands Champignons peuvent dans un âge avancé , servir à la fabrication de l’amadou , et de l’agaric des chirurgiens. Ainsi les fibres des tiges et des feuilles d’un grand nombre de Composées , sont employées dans divers pays à fabriquer l’espèce d’amadou qu’on emploie pour le rnoxa : tels sont le Scolymus et VEchinops en Espagne ^ V Artémisia vulgaris en Chine ,1e Centaurea sibirica enTartarie , etc. ( 66 ) Mais ces détails minutieux ne méritent pas de nous arrêter davantage , et il suffit d’avoir ob- servé que les propriétés mécaniques ou acci- dentelles doivent être , dans la plupart des cas, exclues de l’examen qui nous occupe. S. VIL Comparaison du mode d f action des médi - camens . Quoique la science médicale repose presque en entier sur la physiologie , on a été obligé de classer les médicâmens avant d’avoir une idée précise de leur action , et ce vice de clas- sification n’est pas absolument aboli $ il est ré- sulté de cette précipitation nécessaire , que les médicainens ont été rangés , non d’après leur vertu, c’est-à-dire, leur action réelle sur la fibre animale , mais d’après les effets qui ont lieu lorsqu’on a appliqués certains remèdes à certains organes et dans certaines circonstances déterminées. Dans les premiers temps, tous les remèdes étaient presque regardés connue des spécifiques \ bientôt les découvertes de la physio- logie et la màrclie philosophique introduite dans la médecine , ont tendu à généraliser l’effet des médicâmens ; si' maintenant nous comp- tons encore des -spécifiques parmi nos drogues ( $7 ) usuelles , si Faction des médicamens appliqués à l’extérieur du corps semble ramener à cette théorie , il faut convenir d’un côté que le nombre des spécifiques a beaucoup diminué $ et de l’autre que la marche générale de la science semble tendre à le diminuer encore. Il serait hors*. de mon sujet d’entrer dans aucun détail sur cette question délicate : je remarquerai seulement que de la classification admise parmi les médicamens , résultent deux causes d’erreurs relativement à la question de l’analogie botanique appliquée à la médecine. i.° On tt souvent désigné sous deux noms divers , et rangé dans des classes différentes , des médicamens dont l’action sur la fibre ani- male est réellement semblable j cette erreur peut tenir à deux causes. Quelquefois elle est produite parce que * certains médicamens ont été pendant long-temps appliqués à un seul organe : ainsi des matières évidemment stimulantes se retrouvent parmi les purgatifs , les émétiques , les diurétiques , les diaphoniques , les emménagogues , etc. : bien plus , les mêmes médicamens produisent des effets entièrement différens en apparence, lors- qu’on les applique à différens organes : ainsi le Tabac est sternutatoire , scialagogue, émétique ou purgatif, selon qu’il est employé à stimuler ( 58 ) le nez , la bouche , l’œsophage ou le canal in- testinal. Ainsi, selon les circonstances où elle est appliquée , la Scille devient purgative ou émétique, diurétique ou emménagogue. D’a- près ces exemples où nous voyons le même vé- gétal produire des effets différons , selon l’or- gane auquel on l’applique , ou l’état patholo- gique de l’individu , doit-on s’étonner si l’on trouve quelque fois des plantes qui se ressem- blent par l’organisation , et qui semblent jouir de propriétés très-différentes ? C’est alors à la saine physiologie à comparer ces propriétés , non d’après leurs effets ordinaires , mais en elles-mêmes. Ainsi quand nous voyons la Scille quelquefois émétique et quelquefois emmé- nagogue, quand nous savons d’ailleurs que dans ces deux classes de remèdes , la plupart agissent comme stimulans , ne pouvons-nous pas concevoir comment, sans rompre l’ana- logie naturelle , l’Asarum est émétique , tandis que les Aristoloches , dont il est voisin , sont emménagogues ? Ainsi cette même’ Scille ne peut-elle pas , par ces propriétés diverses , nous expliquer les anomalies apparentes de la fa- mille des Liliacées? Ne semble-t-elle pas parti- ciper d’un côté aux propriétés purgatives de l’Aloès , et de l’autre aux vertus diurétiques de l’Ail } et pouvons-nous ne pas voir , dans ces ( 5ç ) médicamens , de simples modifications de pro- priétés stimulantes ? Voilà donc un nouveau moyen pour l’explication des anomalies : l’ap- plication diverse d’une même vertu. Une seconde cause d’erreurs non moins im- portante à étudier, c'est l’extrême diversité des effets d’un médicament donné à différentes doses. Ainsi, sans admettre les exagérations auxquelles Brown a été entraîné par la simpli- cité séduisante de son système , on ne peut nier qu’un bain froid commence par fortifier , et finit par affaiblir s’il est long-temps pro- longé : ainsi tout le monde sait que le vin en petites doses est stimulant et tonique , que pris en plus grande abondance , il devient narco- tique et sédatif. On retrouve des diversités analogues , quoiqu’à ce qu’il paraît en sens in- verse , dans l’opium et dans plusieurs autres narcotiques. Si la même substance produit des effets si divers , selon la dose à laquelle on l’em- ploie , ne devons nous pas nous attendre que des médicamens tirés de plantes analogues, produiront des effets différens , selon la plus ou moins grande concentration de leurs prin- cipes. Si les poisons végétaux n’agissent la plupart sur le corps humain qu’en quaiité de narcotiques très-puissans , et si nous voyons plusieurs narcotiques , pris à faible dose , agir ( 6 ° ) comme stimulans , pourrons-nous être étonnés de trouver dans les mêmes familles des poisons et des remèdes, des narcotiques et des stimu- lans? Si nous réfléchissons que dans le choix de nos alimens , indépendamment de la qua- lité nutritive, nous recherchons aussi un léger stimulant , au point que lorsqu’il manque nous l’ajoutons artificiellement , serons-nous surpris de voir , dans l’ordre naturel , plusieurs des végétaux qui font notre nourriture , placés à côté de végétaux dangereux ? Cette influence de la diversité des doses tend encore à rapprocher les vertus de certains médicamens. Ainsi on sait que la Rhubarbe purge comme stimulant , et agit à faible dose comme tonique. Les Rumex de nos climats r pris à la dose de la Rhubarbe , n’agissent que comme toniques 3 de même, parmi les Liserons, nous trouvons le Jalap purgatif drastique , tandis que le Méchoacan est simplement to- nique , etc. 2. 0 Nous venons d’observer comment, soit par la diversité de ces cas morbifiques , soit par la diversité des doses , des médicamens réelle- ment analogues par leurs vertus , produisent des effets différens 3 il nous reste à examiner maintenant une dernière source d’erreurs 3 c’est que des médicamens réellement différens pro- ( *1 ) iluisent des effets semblables. Il n’est presque aucune classe de inédicamens où l’on ne puisse retrouver des exemples de ce phénomène. Ainsi , quoique l’augmenta tion des urines par les diurétiques semble un effet très-simple , elle se produit cependant par trois moyens diffé- rens , ou par la simple augmentation de la masse du liquide dans le corps humain, ou par- ce que les reins sont spécialement excités, ou parce que le système entier est stimulé. Les fruits aqueux, la Digitale et la Scille paraissent nous offrir des exemples de ces trois classes de diurétiques. En parcourant les diaphorétiques , on trouverait de même que les uns ne font qu’augmenter la quantité du liquide à évaporer , que d’autres donnent plus d’activité à la cir- culation, que quelques-uns stimulent les vais- seaux, que d’autres élèvent la température du corps 5 qu’il en est dont le seul usage est de désobstruer mécaniquement l’orifice des pores , et que le plus grand nombre agit par la com- binaison de plusieurs des moyens précédens. Observons encore l’effet général des purgatifs : nous en verrons plusieurs qui agissent en stimulant le canal intestinal , d’autres dont l’action paraît être au contraire de le relâcher ou de le lubréfier , et quelques-uns qui , comme la Manne , semblent purger par simple indiges- tion , etc. (fe ) Si nous trouvons des causes diverses pour produire des effets si cons tans , si avérés et si simples que ceux que nous venons d’énumérer , que seroit-ce si nous passions à des effets plus compliqués et moins connus ? Que serait-ce si nous admettions encore des alexipharmaques , des atténuans, des inspissans, des vulnéraires, et tant d’autres propriétés peu connues , peu évidentes , et dont les effets peuvent être pro- duits par tant de .causes diverses ? Mais s’il est Lien démontré que le même effet peut être pro- duit par des causes très-différentes , ne devons- nous pas , dans la discussion qui nous occupe , faire peu d’attention aux effets , et beaucoup au mode d’action de chaque médicament (1) ? Cette observation tend encore à détruire l’une des plus puissantes objections qu’on ait faites contre l’analogie des formes et des propriétés 5 savoir, que des plantes, d’ordres fort différens , produisent des effets en apparence semblables. Il me paraît que jusqu’à ce que le mode d’ac- tion de chaque drogue soit exactement connu , cette objection est de peu de force. Ainsi , (1) Depuis la première édition de cet opuscule , cette vérité , déjà sentie par les grands médecins , a été déve- loppée et confirmée d’une manière très-lumineuse dans les Principes de Pharmacologie dç M. Barbier. Paris ? 1806. ( 63 ) quand même nous voyons des Rubiacées , des Violettes , des Apocinées , etc. , servir indis- tinctement d’émétique , pouvons-nous assurer que leur manière d’agir sur la fibre soit sem- blable , et jusqu’alors pouvons-nous tirer quel- que conclusion certaine contre la théorie que j’ai développée plus haut ? Ici se termine la première partie de cet ou- vrage. Nous venons de tracer les principales règles que l’état actuel de la Botanique, de la Chimie et de la Médecine , nous présente pour comparer avec exactitude les propriétés des plantes $ et chacune d’elles, au lieu d’aug- menter le nombre des exceptions , a fourni au contraire la solution de plusieurs anomalies : si je ne me fais point illusion, c’est en général une marque assez sûre de la vérité d’une théorie, que de la voir se confirmer davantage , quand on y porte une exactitude plus scrupuleuse. Je vais maintenant faire l’application des principes et des règles que j’ai posés , non en me restreignant aux familles conformes à la théorie que je viens d’exposer , mais en énu- mérant successivement ce qu’on, sait sur les propriétés générales de chaque famille naturelle* ( 6 4 ) 1 I. e PARTIE. APPLICATION DES PFlINCJPES PRÉcÉDENS A L ? EXAMEN DES PROPRIÉTÉS GÉNÉRALES DE CHAQUE FAMILLE DE VÉGÉTAUX. PREMIÈRE CLASSE. DICOTYLÉDONES ou EXOGÈNES* La classe des Dicotylédones contient un trop grand nombre de familles r pour qu’il soit possible de donner aucune généralité sur leur composition et leurs propriétés ; toutes les ma- tières qu’on peut regarder comme élémentaires dans le règne végétal , ont été trouvées dans lesDicotylédones, exceptÉ peut-être le glutineux. C’est sur-tout parmi ces plantes que se trouvent les produits les plus élaborés par la végétation , et qui jouissent des propriétés les plus exaltées, tels que les huiles fixes et volatiles , les acides , le camphre , les résines , les gommes-résines , etc. C’est dans l’écorce, organe propre aux Dicotylédones , que se trouve ordinairement le tannin , principe astringent qui fait presque la base de tous les fébrifuges , et les huiles vola- ( 65 ) tiles qui donnent naissance à nos aromates ; c’est dans la graine des Dicotylédones que se trouve l’huile fixe , matière si importante dans les arts et la médecine $ enfin , c’est véritable- ment dans cette classe que le principe ligneux parvient à toute sa perfection. i. RENONC U LACÉE S. Ranunculaceœ, Juss. Gen. a3i. La famille des Renonculacées , considérée dans son ensemble, nous offre assez d’unifor- mité 5 mais si nous descendons dans les détails , nous y rencontrerons çà et là quelques anoma- lies dont l’état actuel de nos connaissances chimiques ne donne pas la solution. Toutes ces plantes sont , en général, âcres et caustiques, et dans quelques unes ce principe délétère est si énergique , qu’elles sont réelle- ment vénéneuses. Ce principe caustique paraît d’une nature très-singulière $ il est tellement volatil que , dans la plupart des cas , la dessi- cation à l’air , l’infusion dans l’eau , la cuisson , suffisent pour le détruire j il n’est ni acide, ni alcalin \ on l’augmente par les acides , le miel, le sucre , le vin, l'alcool, etc. , et il n’est réellement détruit que par l’eau. Ces singuliers caractères chimiques se retrouvent , selon 5 ( ) Krapion , dans nn très-grand nombre de .Re- noncules , telles que le R. bulhosus , R. scele- raîus P R. acrïs > 71. aiyensîs , il. thora > R. illyricus , 11. alpestris j R. jlammula , etc. Ce principe extractif paraît exister encore dans tous les Hellébores , les Clématites, les Aconits, les Anémones , dont le suc des feuilles et des tiges paraît doué d’une causticité analogue. Presque toutes les espèces de cette famille sont citées comme vénéneuses pour les bestiaux $ les observateurscitent sous ce rapport, en Europe les Renoncules, les Hellébores, les Clématites, les Tliaiictrums , etc. , et je retrouve la même observation faite dans l’Amérique Méridionale , sur les Anemone trilobata et triternata , L’eau distillée des Ranunculus jlammula et lingua , donne un excellent émétique ; les feuilles de la plupart des espèces de là famille, appliquées sur la peau , y agissent comme rubéfians , cor.ro- dans ou vésicatoires : ainsi les Islandais font des vésicatoires avec le R. acris ; on a employé les feuilles des R. acris , bulbosus et sceleralus en pâte et en cataplasme sur le carpe pour in- terrompre les accès rebelles de fièvres inter- mittentes : celles des Clematis recta et Jlarn - mula , servent aux mendians pour exciter des ulcères artificiels, et ont été employées pour détetger certaines maladies cutanées ou ronger des exostoses ; celles du Knowhonia vesica *• toria servent de vésicatoire dans l’Afrique aus- trale j celles de Y Anémone nemorosa sont ëîh* ployées comme vésicatoire dans la goutte et le rhumatisme. M. Barton observe que les Re- noncules, et sur-tout le Ranunculus bulbosus , employées comme vésicatoires , produisent une excitation moins vive peut-être , mais plus durable que celle des Cantharides. Plusieurs de ces mêmes plantes sont employées à l’intérieur tantôt comme des stimulans âcres , tantôt comme des sudorifiques puissans } comme par exemple le Ranunculus glacialis 9 employé sous ce rapport par les habitans des Alpes du Dauphiné , ou comme diurétiques par exemple les Aconitum -napellus et cammarum , ou comme rongeans par exemple Clernatis recta . Mais quelques autres plantes présentent des caractères différons ; ainsi l’Hépatique , l’ Actœa racejnosa{i)ei le Delphinium consolida , sont regardées comme astringentes : je crois cepen-* dant y retrouver , à une foible dose , le prin- cipe caustique, puisque ces plantes sont em- ployées comme cosmétiques , c’est - à - dire „ comme de très-légers caustiques. Enfin ce prin- (i) La décoction de sa racine est 5 d’après M. Barton employée comme gargarisme astringent ~aux Etàts-U d’Amérique. ? ni 3 ( 68 ) cipe , s'il existe, est tellement faible clans cer- taines Renoncules , qu’on peut les manger sans inconvénient $ telles sont les R. auricomus , lanugino sus , fie aria , qui peut-être perdent leur faible causticité par la cuisson \ telles sont les jeunes pousses clu Çlematis vitalba , qui, cuites dans l’eau, servent d’aliment aux paysans de la Toscane et de l’Etat de Gênes ; telle est encore la Renoncule aquatique , qui , dans certains villages d’Angleterre et d’Alsace , sert , après sa dessication , à nourrir les bes- tiaux ) ici le principe caustique peut s’éva- nouir, soit par la station de la plante au milieu de l’eau , soit par sa dessication. Nous retrouvons ce même principe caus- tique, mais mélangé le plus souvent avec un principe aromatique , dans la graine de la plu- part des Renonculacées , ce qui rend les unes âcres et stimulantes comme dans les Nigelles dont les graines servent de condiment popu- laire , en Europe ( Nigella saliva ) , et aux Indes 5 d’autres caustiques et vermifuges comme clans le Delphinium staphysagria ; quelques- unes simplement toniques, comme peut-être P Âquilegi a. Mais c’est sur-tout par leurs racines que les Renonculacées intéressent Part de guérir. Ces racines sont presque toutes douées , à un degré ( 69 ) plus ou moins prononcé , d’une âcreté et d’une amertume quiles rendent très-énergiques , et , par conséquent , susceptibles d’être très-dangereuses ou très -utiles ; cette âcreté se retrouve dans celles dont l’herbe est innocente , telles que la Ficaire, le Thalictrum . Elle est poussée à un haut degré d’énergie dans les Aconitum napel- Ims y A. cammarum , et même A. anlhora , dans le Thalictrum flavum , et sur-tout dans plusieurs Hellébores $ toutes ces racines , em- ployées à l’intérieur, sont tantôt purgatives, tantôt vomitives , quelquefois toniques , ordi- nairement âcres et stimulantes , quelquefois emménagogues , comme Pallas l’assure des ra- cines des Adonis vivaces , ( Adonis vernalis et apennina ). On connaît le fréquent usage que les anciens faisaient de leur Hellebore noir comme purgatif drastique , et ôn sait mainte- nant que l’espèce qu’ils employaient était Y H el- le borus orwntalis > Lam. , découvert par Tour- nefort dans F Archipel et l’Orient 5 ces mêmes propriétés ont été retrouvées dans Y H elle ho rus niger , L. , regardé long-temps comme celui des anciens ; et on emploie , à sa place , dans les pharmacies , les racines del’ H elle bo rus viridis , et de Y Adonis vernalis > de Y Adonis apennina , du Trollius europœus , de Y Actæa spicata , de l ’ Aconitum napeUus ; ces substitutions fré- (' 7 ° ) queutes , long-temps inaperçues par les prati- ciens, prouvent, mieux que tous les raisonne- mens , l’extrême analogie de toutes ces racines. Celie de la Pivoine est âcre et amère comme les précédentes ; elle s’en éloigné un peu par son odeur et par ses propriétés antispasmodiques , qui , d’ailleurs sonj très-mal constatées ; on retrouve ces mêmes qualités dans les Ci mi ci- fuga , qui, plus encore que le Pœonia , offre quelques différences botaniques avec l’en- semble de la famille. La racine du Zantho- rhiza apiifolia est extrêmement amère $ cette amertume est très-adhésive et dure encore dans la boucbe après qu’on s’est lavé avec de l’eau chaude ;^elle est combinée avec une acrimonie particulière qui rappelle les propriétés générales des Renoncu lacées ; cette racine teint la salive en jaune , et Si on peut parvenir à fixer cette couleur, elle serait une acquisition importante $ cette propriété qui semble isolée , se retrouve dans YUydrasîis canadensis apelé Yellow- lloot par les Anglo-Américains : sa racine est amère , plus piquante que celle duZanthorhiza, et la couleur jaiAië qu’elle fournit serait une des plus brillantes si l’on parvenait à la fixer. Je crois, d’après ces exemples , pouvoir compter les Renonculacées parmi les familles conformes à la théorie y mais j’engagerai les chimistes à ( 7 1 ) diriger leur attention sur cette singulière fa- mille , pour déterminer , s’il est possible , la nature de son principe caustique. 2. D IL LE NI ÂGÉES. Dillcniacece. DG. Ann. Mus. iy ? p. 4oo*Ehéor. p. 21 3 . La famille des Biîleniacées , encore peu comme des botanistes, ne l’est point des méde- cins européens 5 011 peut noter seulement d’a- près les voyageurs , que par l’infusion ou la dé- coction des feuilles et de l’écorce de la plupart de ces arbustes , 011 obtient une liqueur as- tringente qu’on emploie dans l’Inde en lavage et en gargarisme ; le genre Dillenia , réduit à ses vraies limites , se distingue parce que ses ovaires se soudent ensemble de manière à former une baie composée divisée en plusieurs loges $ la chair de cette baie est remarquable dans toutes les espèces par son acidité 5 011 se sert au Malabar du suc des D* speciosa et eUiptica pour pré- parer, comme avec nos citrons, des boissons et des ragoûts acides 5 les habitans des Célèbes se servent de ces boissons acidulés dans leurs fièvres comme nous employons la limonade. Presque toutes les espèces de la tribu des Belirnacées ont les feuilles très-rudes au tou- cher, et sont chacune, dans leurs pays respect ( 7 3 ) tifs , employées comme nous faisons de la prêle à polir les ouvrages de menuiserie. 3. MAGNOLIACÉES. Magnoliaceœ , DG. théor. ai 3. — Tulipiferœ , Vent. Magnoiiarum sectio prima , Juss. Quoique la famille des Magnoliacées soit composée d’un petit nombre d’espèces , elle mé- rite l’attention des médecins par l’intensité de ses qualités sensibles. L’écorce de toutes les Magnoliacées pré- sente en général une saveur amère , nullement astringente , et combinée avec un principe âcre et aromatique : ce principe aromatique est sur- tout très-remarquable dans l’écorce des espèces du genre Drymis , lequel en a tiré son nom (i)$ telles sont le Drymis 'winteri , célèbre sous le nom d’écorce de Winter > mais qu’il ne faut pas confondre avec le fVinlerana canellci qui appartient à la famille des Meliacées , le Drymis granatensis de Santafé , le Drymis magno - liœ folia qu’on nomme Canelo au Chili, et deux autres espèces mal connues , indigènes du Mexique et du Brésil 3 toutes ces écorces sont légèrement amères, très-âcres , piquantes, (1) Drymis signifie en grec saveur âcre. (73 ) aromatiques ? et sont employées avec succès comme stimulans toniques et stomachiques dans les dyspepsies et même dans quelques fièvres ; ces mêmes qualités physiques et ce même emploi médical se trouvent dans l’écorce de Melambo , nouvellement introduite dans la médecine européenne , et qui me paraît évi- demment provenir d’un Dryinis ou d’un genre très- voisin (1). Cette écorce ne contient ni tannin ni acide gallique , mais un principe vo- latil , aromatique 7 et une grande quantité ( presque ~ de son poids ) d’une matière amère et résineuse. L’aromate de l’écorce des Dryinis se retrouve , quoique moins exalté , dans l’é- corce des Illicium , dans celle des Magnolia glauca , grandiflora et auriculata (2) ^ plus (1) Voyez l’Histoire et l’Analyse du Melambo, publiée par M. Cadet. Journ. Pharm. , 181 5 , p. 20. \ (2) Je parle principalement ici des Magnolia d’Amé-i rique, et il est très-remarquable combien nous connaissons mal encore les Magnoliacées de l’Asie : le fruit d’aucune des espèces de Magnolia ou de Lyriodendron asiatiques n’a pas encore été décrit , et il me paraît extrêmement probable qu’il n’est pas semblable à celui des espèces américaine^ 5 il serait, en effet, bien extraordinaire qu’aucun des voyageurs qui ont été en Asie n’eût fait mention de cette singularité si connue dans les Magnolia d^Améiique, d’avoir les graines pendantes ? hors des capsules, à un long filament, et de ( 74 ) foihle encore dans celle du Lyrioden dro n tuli - pifera : dans ces deux derniers genres le prin- cipe amer domine dans la saveur des écorces ; celles-ci sont généralement employées en Amé- rique comme toniques et fébrifuges $ plusieurs d’entr’elles , telles que le Magnolia glauca et sur-tout le Tulipier 9 sont usitées aux Etats- Unis à la place de Quinquina. L’analyse de l’écorce de Tulipier publiée par M.Tromsdorf, démontre , de même que dans le Melambo , l’absence totale du tannin et de l’acide gallique et une assez grande quantité ( ç de son poids ) de principe amer qu’on dit seulement être de nature extractive et non résineuse. Le principearomatiqued.es écorces deMagno- liacées se retrouve dans plusieurs de leurs fruits , c’est sur-tout dans le péricarpe des lUiciums que cet aromate est remarquable \ ces arbustes sont leur silence , on peut soupçonner que ce caractère manque dans les Magnolia d’Asie , déjà un peu différens de ceux d’Amérique par la fîeuraison ; les Lyriodendron d’Asie semblant être aussi trop diiférens de celui d’Amérique par leur port , pour ne pas présenter des différences dans le fruit. J’ose donc engager les Botanistes qui se trouve- raient avoir l’occasion d’observer, soit dans les collections , soit dans les jardins, soit dans le pays même , les fruits des Magniolacées asiatiques , à en donner au public une description carpqlogique détaillée. ( 75 ) connus sous le nom de Badianes ou d’ Anis étoilé . L’espèce qui croît à la Chine ( Illicizim anisa- tum ) porte des fruits étoilés dont l’odeur est suave , piquante , aromatique , et la saveur un peu âcre 5 les Chinois s’en servent pour brûler dans leurs temples , et les Européens l’emploient pour aromatiser certaines liqueurs ? telles par exemple que 1 ’Anisette de Bordeaux , d’où, l’on peut présumer que le principe aromatique de l’Anis étoilé est de nature résineuse 5 les cônes du Magnolia aeuminata servent de même en Virginie à faire une teinture spiri- tueuse qui y est employée avec quelques succès contre les maladies rhumatismales. Les graines de la plupart des Magnolia sont plutôt remarquables par leur amertume ; cette propriété est connue dans les espèces Améri- caines j et la graine du Magnolia precia 011 gui an connue à la Chine sous le 110'rn de Tsin-g , y est employée comme amère et fébri- fuge. Enfjn l’odeur des fleurs clje plusieurs espèces de ce genre a une action prononcée sur le système nerveux 5 celles du Magnolia tri p étala causent souvent des nausées ou des maux de tête ? et M. Barton raconte que l’odeur des fleurs du Magnolia Miuc a est tellement sti- roulante ? qu’on l’a vue accroître le paroxisme ( 7 6 ) d’une fièvre et la douleur d’une attaque de goutte imflammatoire. Je dois même citer à cette occasion la suavité des parfums produits clans l’Inde par les fleurs des Champacs ( Mi- chela ), au Japon par celles du Yulan ( Ma- gnolia precia Coït. M. Yulan , Desf. ) , et à Cayenne par celle du Mayna o do rata , Aubl. 4. ANNONACÉES. Anonœ. Juss. 7 Gen. 283. Cette famille est très-naturelle, aussi trouve - t-Qii une grande analogie de propriétés entre les espèces qui la composent : presque toutes les parties de celles-ci ont une saveur et une odeur forte , âcre , piquante ou aromatique $ les racines, les écorces et les feuilles , sur les- cpielles nous avons quelques données précises , îouissent toutes de ces propriétés $ selon qu’elles sont plus ou moins intenses , plus ou moins pures , la saveur et Fodeur sont agréables ou désagréables 5 F écorce de riJvaria tripetaloidea laisse découler , lorsqu’elle est entamée , un suc visqueux qui, en se désècliant , se condense en une gomme odorante 5 les fleurs de l’ U varia o do rata , du Cananga virgata et de quelques autres espèces ont une odeur agréable , quoique forte et pénétrante 5 les fruits participent beau- ( 77 ) coup aux propriétés générales cle ces plantes; ceux des genres Cananga, U varia et Xjylopia dont le péricarpe est sec , ont une saveur piquante et aromatique qui les a fait souvent rechercher comme condimens ; tels sont notamment ceux de l'U varia aromatica qui paraissent avoir été autrefois répandus dans le commerce sous le nom de Poivre d’Ethiopie , et qui sont encore connus sous ce nom en Guyane et en Afrique ; les fruits des genres Asimina , Porcelia (i), Annona sont charnus; un mucilage sucré s’y trouve combiné avec le principe aromatique et quelquefois avec un acide ; la saveur de la plu- part de ces fruits n’est agréable que pour les naturels du pays et celle même des Annones les plus généralement cultivées ne plaît aux Européens que lorsqu’ils en ont fait usage quelque temps ; il paraît que dans tous la par- tie externe du péricarpe est rejetée , soit à cause de sa saveur et de son odeur ? soit à cause de sa consistance ; Duhamel rapporte que la chair du fruit de V Asimina triloba est (i ) Le genre Asimina d’Adanson et le Porcelia de la Flore du Pérou paraissent devoir être, d’après M. Dunal ? conservés comme genres distincts ; les Asimina ont les graines disposées dans chaque baie partielle sur un seul rang, tandis que les Porcelia ont leurs graines disposées sur deux rangs. Le port de ces genres est d’ailleurs un pe4 diffe'rent. (78 ) agréable et saine , mais que sa peau ou sa par^ tie externe , qui s’enlève facilement , laisse aux doigts l’impression d’un acide si vif, que si on les porte aux yeux par inadvertance, il s’en suit une inflammation accompagnée d’une démangeaison insupportable ; Michaux qui a vu cet arbre dans son pays natal , ne cite ce- pendant pas cette particularité de son fruit , ce nui la rend douteuse* JL 5. ME N ISP BRMÉES. Mejiisperma. Juss. , Gen. 284. Les propriétés des plantes de cette famille Sont encore peu connues , et leur histoire bo- tanique elle- même n’est pas encore exempte de difficultés $ les racines du Cissampelos pareira ( 1 ) de Linné, et de l ’ Abuta amara , d’Aublet , fournissent l’une et l’autre le médicament amer , diurétique et apéritif connu sous le (i) Le Cissampelos pareira de l’Inde paraît une espèce différente de celui d’Amérique 5 il en diffère par ses ra- meaux puhescens , ses feuilles plus grandes très-rarement ombiliquées , ses grappes mâles naissant plusieurs ensem«» bîe , longues d’un pouce et dichotomes , ses grappes fe- melles garnies de bractées larges et rapprochées, etc. Je le nomme Cissampelos pareiroïdes . ( 79 ) nom de Vareira brava ; une espèce de Mé.nis- perniée , long-temps mal connue des botanistes , le Menispermum palmatum de Lamarck (1) 3 produit la racine de Colombo remarquable par l’intensité de son amertume , et utile à ce titre dans la dyspepsie , la diarrhée , la dysenterie et même pour layer les ulcères $ la composition chimique de cette racine, examinée par M. Planche? est assez remarquable : elle présente un tiers de son poids de tissu ligneux ? un second tiers d’amidon et le dernier tiers com- posé principalement d’une matière animale très-abondante , et d’une matière jaune, amère , indécomposable par les sels métalliques. Il se- rait intéressant de faire maintenant une ana- lyse comparée des racines de Pareira et de ( 1 ) Cette plante a été découverte par Coramerson qui l’a, il est vrai, observée à l’Ile-de-France, mais cultivée et ve* nant de la Côte d’Afrique ou de l’Inde; il dit qu’ellô a été apportée sous les noms de Calomba ou Colomb ra f qui , l’un et l’autre s’écartent très» peu de Colombo. Depuis lors, M. Fortin a trouvé à la Côte de Mozambique la plante qui fournit le Colombo, appelé Kalumb par les Africains. M. Andrew Berry en a décrit et figuré l’individu mâle dans les Asiatic Researches , vol. X, p. 385 , t. V , et il est évident que cette plante est la même que celle de l’berbier de Commerson ; de sorte que l’origine du Columbo peut être aujourd’hui regardée comme certaine. (8o) Caapeba ; cette dernière produite par le Cis- sampefas caapeba , paraît s’écarter des autres par sa nature plus mucilagineuse. Le principe amer des Ménispermées se retrouve encore dans une espèce nouvelle à’Abuta qui porte à Cayenne le nom de Liane amère , et que M. Richard nomme A buta candicans ; dans le Menispermum cordifolium employé dans l’Inde contre l’ictère et comme tonique et fébrifuge ; dans le Funis feLleus de Rumph, estimé à Calcutta à l’égal du Quinquina. Les baies du Menispermum lacunosum , Lam. dans les Indes , et celles du Menispermum coccu- lus dans l’Orient, sont l’une et l’autre employées comme amorces pour attirer et pour énivrer ou empoisonner les poissons et les oiseaux. Cet usage est malheureusement aussi introduit en Europe ; il résulte d’une série d’expériences , récemment faites par M. Goupil , que la coque du Levant est un véritable poison irritant pour les poissons, pour divers quadrupèdes et probablement pour l’homme; que cet te qualité se communique même à la chair des poissons empoisonnés par ce procédé et notamment à celle des barbeaux; que le péri- carpe de la coque n’a qu’une propriété émé- tique , mais que c’est dans la graine que réside le principe vénéneux. Observons cependant qu’on mange impunément en Egypte les baies ( 8i ) du Menispermum edule ,Lam» , mais elles sont âcres et l’on en tire par la fermentation une liqueur très-énivrante. La graine du Menispermum cocculus , isolée de son péricarpe et soumise à l’analyse par M. Boullay , lui a présenté , entr’autres produits , environ moitié de son poids d’une huile fixe 9 concrète ou de consistance analogue à la cire ; une substance végéto-animale , albumineuse , une matière colorante particulière et sur-tout un principe amer ? cristallisa ble , de nature vé- néneuse et auquel il a donné le noni de Piero~ toocine ; il sera curieux de rechercher si cette matière particulière se retrouvera dans les graines des autres Menispermées. 6 . CHLENACÉES. Chlenaceæ . Petit-Th. gen. , t. g- 12: Les propriétés des plantes qui composent ce petit grouppe, découvert par M. du Petit- Thouars , sont peu ou point connues ; les fruits du Sarcolœna ont une chair pulpeuse dont la saveur approche de celle des Nèfles , mais leur cavité interne est tapissée de poils roides qui causent comme ceux des Pois à gratter et probablement par un simple effet mécanique ? des démangeaisons insupor tables $ le tégumenl 6 ( 8 2 ) des Schizolana est tapissé d’une espèce de gluten visqueux , ténace et colorant , mais dont la nature n’est pas connue exactement. 7. MALYACÉES, Malvaceœ . Juss., Gen. 271. Les Malyacées nous présentent une série uni- forme,^ soit par leurs caractères botaniques , soit par leurs propriétés médicales. Tout le monde sait que ces plantes sont émollientes , adoucis- santes , composées d’un mucilage abondant et nutritif: on connaît trop l’usage de nos Mauves, de nos Guimauves, pour qu’il soit nécessaire de nous y arrêter. Si nous jetons les yeux sur les Malyacées étrangères , nous les verrons par- tout servir aux mêmes usages. Tel est lé Baobab ( Adansonia } employé comme émollient : Y Hi- biscus e seule nt us , dont le suc mucilagineux entre dans les alimens des Indiens 5 le Sida côrd. folia. , qui , mêlé avec le Riz , sert à adou- cir les flux-de-sang j le Sida rhomboïde a, qui, comme le précédent , sert de Guimauve dans les Indes , etc. Au milieu de cette uniformité , je vois cependant les Hibiscus sabdarifa , II. suratensis , et H. cannabinus , qui forment un légère exception par leur saveur acidulé. L’écorce intérieure de la plupart des malva- ( 83 ) cées offre des fibres assez fortes et flexibles pour être employées aux mêmes usages que celles du Chanvre : on sait que Cavanilles est parvenu à fabriquer de bonnes cordes avec les fibres du Maha crispa . On emploie au même usage r Hibiscus clipeatus à Saint-Domingue , VH. mutahilis à Cayenne , VH. tiliaceus et VH. cannabinus dans les Indes. Les pétales de plusieurs Malvacées se distin- guent des autres parties de la plante par leur astringence ; cette propriété a déjà été remar- quée dans les fleurs d ' Alcea, et c’est à elle peut- être qu’il faut attribuer l’emploi des pétales de V Hibiscus rosa-sinensis , dont les Chinois se servent pour noircir leurs sourcils et le cuir de leurs souliers. Les fleurs d’une espèce de Peu* tapetes encore mal connue , et que les Indiens nomment Muchucunda , donnent un suc mu- cilagineux et réfrigérant , qui est employé dans les gonorrhées. La graine des Malvacées est en général douce et émolliente ; mais on trouve cependant des anomalies dans cet organe : ainsi celle de V Hi- biscus abedmoschus exhale une odeur de musc y celle de Tkeobronia , connue sous le nom de Cacao ? fournit une espèce de cire butyreuse , onctueuse ? un peu amère , qui fait la base du Chocolat. 6 .. ( 84 ) Les graines sont entourées , dans plusieurs genres de malyacées , de filamens laineux ou soyeux, dont l’industrie de l’homme a tiré des usages multipliés. Ces filamens sont sur- tout connus dans le Coton et le Boinbax. Dans le premier de ces genres, les filamens sont plus crépus , et sur-tout garnis de petites dentelures visibles au microscope. Cette circonstance de leur organisation les a rendus faciles à filer , à tisser, et explique comment leurs tissus irri- tent et égratignent imperceptiblement les peaux délicates , les pustules , les blessures ; dans le Boinbax , au contraire , les filamens ne sont pas dentelés ; aussi ne peuvent-ils se filer et se tis- ser qu’avec beaucoup de difficulté. C’est par la même raison que les soies des Apocinées 11e peuvent pas se filer sans mélange de Coton. Nous retrouvons parmi les poils végétaux , la même observation faite sur les poils des ani- maux ; savoir , que ceux qui , vus au micros- cope , paraissent dentelés , sont seuls suscep- tibles d’être feutrés. Au reste , la nature chimique du Coton mé- rite peut-être d’être citée ici : ces filamens con- tiennent une matière fibreuse , insipide , très- coinbustible , insoluble dans l’eau , l’alcool et l’éther , et qui diffère essentiellement de la ma- tière ligneuse , en ce que , traitée par l’acide ( 85 ) nitrique, elle donne, non pas du charbon , mais de l’acide oxalique. M. Thompson la nomme Coton ; mais pour éviter toute amphibologie, j’ai proposé ailleurs de lui donner le nom de Gossipine . ( Voy. Théor. Elém. , pag. 4 1 7*) 8. S TERCUIIACÉES. Sberculiaceœ.Y ent. , Malm. 91. DG. Theor. 214. Les propriétés des Sterculiacées sont encore mal connues 5 l’écorce de l’une d’elles ( Clom- panus minor Rurnph), est employée aux Mo- luques comme emménagogue , la graine de toutes les espèces est assez grosse et remplie par un périsperme huileux \ on en extrait dans l’Inde une huile bonne à brûler ; ce périsperme a une saveur assez analogue à celle de nos Noi- settes , comme je l’ai éprouvé sur la graine du Sterculia platanifolia , et comme les voyageurs l’assurent , de plusieurs autres ÿ la douceur de ce périsperme paraît mélangée d’un principe légèrement âcre : ïlumph observe que ces graines mangées en trop grand quantité, donnent quel- quefois mal à la tête ; la plus célèbre de toutes est celle du Sterculia acuminata , très-bien dé- crite par M. Palissot de Beauvois, et connue en Afrique sous le nom de Kola ; les nègres en font cas non pas tant par sa saveur qui laisse ( 86 ) dans la bouche un peu d’âcreté , mais parce que Teau , même saumâtre , acquiert une sa- veur agréable lorsqu’on la boit après avoir mangé du Kola. Le périsperme de la plupart des Hermanniées est trop petit pour qu’on en ait tiré quelqu’usage. 9. T I L I A C É E S. Tillaceœ. Juss. ? gen. p. 28g. Les Tiliacées, très - voisines des Malvacées par leur structure , ont aussi quelques rapports avec elles par leurs propriétés. En général elles renferment un mucilage doux et sain. On mange comme légume , en Egypte , le Chorchorus oli- torius ; les baies des Grewia ? du Flacurlia ramontchi (1) et de Y Apeib a emarginata , ser- vent aussi d’alimens dans divers pays. Les libres corticales du Corchorus capsularis fournissent dans l’Inde une filasse qui sert à faire des cordes et des filets pour la pêche. L’é- corce du Tilleul peut servir à faire des cordages comme celles de plusieurs Malvacées 3 sa graine, préparée comme celle du Theobroma , a pro- ( 1 ) M. Richard pense que le Flacurtia et la Rumea sont le type d’une nouvelle famille. ( 8 7 . ) duit une pâte qui avait quelques rapports avec le Chocolat. Le Bixa orellana qu’on place à la suite des Tiliacées ? est très-remarquable par la pulpe co- lorée qui entoure ses graines , et que l’on con- naît sous le nom de Rocou. Cette pulpe , prise à l’intérieur , est légèrement purgative et en même temps stomachique ; appliquée à l’exté- rieur ? elle tue les petits insectes qui se logent sous la peau. Les propriétés de cette pulpe sont isolées , comme l’organe lui-même dans la fa- mille. 10. ELÉOCARPÉES. Elœocarpeæ . Juss. y Ann. Mus. 1 1 , p. 235 . DC. Théor: 214. Cette famille , toute composée d’arbres exo- tiques , est très-mal connue quant à ses formes ? et moins encore quant à ses propriétés ; les fruits des Ganitres ( Elœocarpus ) sont mangeables } mais très-peu usités. 11. MARGRAVIACÉES. Marggraviaceœ. Juss. , Ann. Mus. 17, p. 377. DC. Théor. 214. Les propriétés de cette famille ? récemment établie., sont encore inconnues. / ( 88 ) i2. OCHNACÉES. Qchnciceœ . DC. Ann. du Mus. 17 ? p. 410. — Magno~ larumgen. Juss. Les plantes de cette famille sont tontes dé- pourvues de propriétés un peu prononcées $ leur suc est aqueux 5 leur écorce n’a pas une amertume bien remarquable. Les voyageurs citent seulement le Walkera $ errata , pour la saveur amère de sa racine et de son feuillage ; on l’emploie au Malabar en décoction dans l’eau et dans le lait comme tonique } stomachique et anti-émétique. i3. SIMAROUBÉE S. Simanibeœ . DO. Ann. Mus. 17, p. 422. — Magno - liarum gen. Juss. Le Quassia et le Simarouba sont les deux seuls genres qui composent cette famille très- analogue à la précédente et encore peu connue ÿ les écorces de ces deux arbres ? sont comme on sait , très - employées en médecine comme les amers les plus purs et les plus intenses que nous possédions ; ces écorces sont comptées à ce titre au nombre des meilleurs stomachiques $ toutes les espèces de cette famille , peu nombreuses il ( 8 9 ) est vrai , jouissent des mêmes propriétés ; le principe amer des écorces de cette famille pré- sente des phénomènes chimiques qui lui sont particuliers j ce principe est parfaitement so- luble dans l’eau $ son infusion ne subit aucun changement par son mélange, soit avec les sels ferrugineux , soit avec l’infusion de noix de Galle ; elle précipite les nitrates d’argent et de plomb abondamment en blanc (1). 14. RUTACÉES. Rutaceœ, Juss., gen. , p. 296. En attendant que la classification des genres réunis aujourd’hui sous la dénomination de Rutacées soit établie d’une manière rigoureuse 9 je continuerai ici à les réunir sous une dénomi- nation commune ; je ne prétends pas nier ce- pendant que les divers grouppes de cette famille ne puissent et ne doivent être avec avantage considérés comme autant de familles distinctes ; les caractères botaniques réclament cette divi- sion , et la différence cfes propriétés de chacun d’eux paraît la confirmer : on peut distinguer ici quatre tribus bien distinctes , les Zygophyl- lées , les Rutacées , les Diosmées et les Zan- thoxylées. ( 1 ) Voyez Thomson , Syst, Chim. , édit, 2. ( 9 ° ) Les Zygopliy liées comprennent des plantes 9 les unes herbacées ? les autres ligneuses ÿ les premières sont le plus souvent annuelles , et ont pour la plupart des propriétés peu exaltées , telles que les Fagonia > les Tribulus et une grande partie des Zygophyllum ; le Z, Tabago est cependant quelquefois employé comme an- thelmintique : les Zygophyllées ligueuses sont remarquables par l’extrême dureté de leur bois | cette dureté qui est connue dans le Gayac , se retrouve au récit des voyageurs dans le Zygo- phyllum arboreum : toutes les espèces de Gayac sont remarquables par leurs propriétés exci- tantes : le bois et l’écorce des Gayac uni offici- nale et sancium y sont d’une saveur un peu âcre et amère ? et s’emploient principalement comme sudorifiques , diaphoniques ou alté- rans : ils renferment une matière particulière * qui est le plus souvent désignée sous le nom de résine ou de gomme-résine ; mais qui diffère des résines , parce que , traitée par l’acide nitri- que y elle donne de l’acide oxalique et non du tannin. Cette matière ? qui jusqu'ici n’a pas été retrouvée hors de ce grouppe y porte le nom de Gayacine , Les Rutacées proprement dites ? qu’on doit réduire au genre Kuta et Feganuni . sont en général remarquables par leur saveur amère et ( 9 1 ) -un peu âcre , leur odeur nauséabonde et leurs propriétés excitantes $ elles paraissent agir prin- cipalement sur le système nerveux 5 la plupart, sur-tout celles où l’odeur est la plus prononcée, ont été vantées comme emménagogues : telles sont les Pv.uta grave olens et angustifolia , et le Peganum harmala ; on les a aussi indiquées soit comme anthelmintiques , soit comme sudori- fiques. Les Diosmées , que je réduirais volontiers au genre Diosma de Linné , qu’on peut diviser en plusieurs genres , ainsi que Wendland et Wil- derson l’ont proposé, les Diosmées, dis -je, sont remarquables au milieu de toutes les ïlu- tacées , parce que l’huile volatile renfermée dans les vésicules de leurs feuilles et de leur écorce est d’une odeur agréable ; la saveur en est cependant âcre : plusieurs d’entr’elles ont été vantées comme anti-spasmodiques. Enfin , les Zanthoxylées , où l’on pourrait réunir les genres Correct. , Jjlptolcena , Zieria , Phebalium , Dictamnus ^ Emplevrum , Jeun - boiifera , Calodendron > Evodia ? Meiicopa , Z atilhoxylon , Fagara , Ochroxylon , et peut- être Cusparia, Ticorea , Gaiipea , Monnieria , les Zanthoxylées , dis- je , paraissent toutes douées de propriétés âcres , stimulantes ou to- niques ) les Fagara sont la plupart connus sous ( 9 2 ) le nom de Poivriers , ce qui fait allusion à la sa- veur aromatique et piquante de leur écorce , de leurs feuilles et de leurs fruits $ les feuilles de presque tous les genres de cette tribu sont gar- nies de vésicules transparentes, pleines d’une huile essentielle aromatique , plus ou moins chaude et stimulante. Les Zanthoxylon clava , Herculis et fraxineum passent eji Amérique pour de puissans sudorifiques et diaphoniques $ ils sont sur- tout remarquables d’après M. Barton , parce qu’ils excitent violemment la salivation , non-seulement lorsqu’ils sont appliqués aux gen- cives, mais ce qui leur est tout particulier lors- qu’ils sont pris à l’intérieur 5 on s’est servi avec quelque succès de cet excitant soit contre le rhu- matisme , soit sur-tout dans les paralysies de la langue et des muscles de la bouche , moyen qui mérite une attention particulière de la part des praticiens expérimentateurs , et qui n’a point encore à ma connaissance, été tenté en Europe , malgré le poids que mérite le témoignage de M. Barton. Le Zanthoxylon carïbœum est re- gardé aux Antilles comme vulnéraire détersif et fébrifuge . Si le Cusparia (1) appartient réellement aux { 1 ) M. de Humbolt a découvert l’arbre qui porte l’écorce 4’Àngustura , et lui a donné le nom de Cusparia febrifttga , ( 9 ^ ) auxZantlioxylées (i), il se rapprocherait un peu par ses propriétés fébrifuges de celles du Zan* tlioxylon dont je viens de faire mention ; on sait que son écorce célèbre sous le nom de Cortex angusturae > est amère, astringente, tonique, stomachique , anti -"dysentérique et fébrifuge. Dirais-je encore ici que les fruits du Ttelea sont remarquables par leur saveur amère et aromatique qui les a fait essayer avec quelque succès pour remplacer le Houblon dans la fa- brication de la bierre ; mais la place du Ptéléa, dans Tordre naturel , n’est pas encore bien déterminée. 1 5. C ARIOPHYLLÉES. Cariophjlleœ . Juss. La nombreuse famille des Cariophy liées pres- d’après le nom de Cusparé qu’il porte dans son lieu natal : il l’a désigné ainsi dans sa Géographie des plantes. Quel- ques années après, Wildenow l’a décrit sous le nom de Bonplandia trifoliata , quoique le nom de Bonpîandia ait été donné par Cavanilles à un tout autre genre. ( 1 ) M. Wildenow rapporte ce genre aux Simaroubées^ M. Richard aux Meliacées , M. Rob. Brown à ses Bios- mées ou à nos Zanthoxylées ; peut-être les genres Cuspa • ria , Ticorea , Galipea et Monnieria devraient-ils être considérés ici comme une cinquième tribu des Rutacées. (94 ) que toute indigène de l’Europe , n’offre aucune propriété remarquable; toutes les plantes qui la composent sont insipides , quelques-unes doi- vent cependant être notées ici à cause de leurs propriétés savonneuses : telle est la Saponciria officinalis /telles sont la Gypsophila ostruthu/m y la Lychnis dioïca , et L, calcedonica , qui sont çà et là substituées à la Saponaire ; celle-ci a été vantée dans les maladies siphylitiques. GA- renaria peploïdes , soumise à la fermentation , forme une espèce de composé dont les Islandais se nourrissent. La décoction de la racine de Si- lène virghüca est , dit-on , employée comme anthelmintique dans l’Amérique septentrionale. 16. LINÉES. Lineœ . DC. Théor. élém. ,214. A la suite des Cariophyllées , nous trouvons le petit grouppe des Lins , qui nous intéressent , soit par l’usage immense des fibres de leur écorce, soit par leur graine demi-mucilagineuse et de- mi-huileuse, adoucissante, résolutive et émol- liente , soit enfin parce que les feuilles du Li - num cütkarticum sont douées de propriétés pur- gatives. Ces divers usages provenant d’organes divers , n’annoncent rien de contraire à la théo- rie, et la plupart sont communes à plusieurs ( 95 ) espèces. La nature du mucilage de la graine de Lin a été étudiée par M. Vauquelin j cet ha- bile Chimiste pense qu’il est composé d’une substance gommeuse , mêlée avec une substance animale , de l’acide acétique libre , des acétates de potasse et de chaux, du sulfate et du muriate de potasse , des phosphates de potasse et de chaux et de la silice : il attribue à l’acétate et au muriate de potasse les propriétés diurétiques de cette graine. Le Linum selaginoïdesip&s>sea.VL Pérou pour amer et apéritif, ce qui se rap- porte aux propriétés de notre JLinum cathar- licum . 17. CISTINÉES, Cistineœ. DC. Théor. 314, — Cisteœ, FL Fr. — Cisci. Juss. Les Cistes ne peuvent intéresser la médecine que par la production du ladanum, résine qui exhale une odeur agréable lorsqu’on la brûle , qui est légèrement stomachique et tonique , mais maintenant presque hors d’usage : on la retire principalement du Gis tus crelicus ; mais les C. laurifollus y Lam. , C. cyprins , Lam. , C. ladanifer , Lam., C. le don , Lam. , en don- nent aussi une quantité plus ou moins sensible, et toutes les autres en offriraient sans doute y (?ff) quelques indices , si on les observait sous ce point de vue. 18. VIOLACÉES. Violœ . Juss. p Vent. — Violaceœ . DC. Théor: Les principales propriétés des Violacées ré- sident dans leurs racines, qui paraissent toutes douées de vertus émétiques à un degré plus ou moins prononcé : tels sont , parmi les espèces dont la fleur n’est point renversée et qui cons- tituent le genre Pombalia de Vandelli, ou lo- nidium de Ventenat , les Viola parvifiora > V \ ipecacuanha , et V ’. itonbou , Aubl. , dont j’ai eu occasion de parler en détail dans mon Mémoire sur les diverses espèces d’Ipécacuanha: tels sont encore , parmi les véritables Violettes, les V '. odorata , V \ canina , et même le V \ tricolor , dont les propriétés , quoique faibles , ne peuvent être révoquées en doute. Cette der- nière espèce se distingue encore par l’utilité de ses feuilles et de sa tige dans les maladies cu- tanées : propriété qui a cependant besoin d’être démontrée par de nouvelles expériences. i 9 . PASSIFLORÉES. Fassiflorece. Juss., Ann. Mus. 6, p. 102.DC. théor. 214* Aucune espèce de la famille des Passiflorées n’est employée en médecine , leurs tiges et leurs feuilles ne paraissent douées d’aucune propriété notable ; leur fruit est charnu ou pulpeux , cette pulpe est gélatineuse , douce et bonne à manger dans presque toutes les espèces : 011 con- naît sous ce rapport en Amérique les fruits des Passiflorà coccinea 3 màlifovmis , et sur- tout du P. quadrangu la ris . 20. C AME L LIÉ ES. Caiiiellieœ. DC. Théor. 214* — - Theaceœ . Mirb. , Bull. Phiiom. Les Camelliées n’ont de rapports botaniques un peu prononcés qu’avec les Orangers , mais en diffèrent à beaucoup d’égards $ cette famille ne se compose que de deux genres -, le Thé et le Camellia 5 l’infusiom des feuilles de toutes les espèces de Thé est, comme on sait., as- tringente, assez agréable au goût , et remar- quable par l’action stimulante qu’elle paraît exercer sur les nerfs. Les feuilles des Camel- lia japonica et sesanqua sont souvent ern- • ployées en Chine et au Japon à la place de celles ( 9 « ) du véritable Thé , et toutes les espèces du genre Thea sont presqu’indifféremment employées les unes à la place des autres par les habitans de la Chine , du Japon et de la Coçhinchine (1). Observons que ni les feuilles des Thés , ni celles des Camellia n’ont de parfum, et que celui-ci leur est communiqué par la stratification qu’on en fait avec les fleurs de Y O Lea fragrans et du Camellia sesanqua . ,Les propriétés du Thé pa- raissent en opposition avec l’infusion des feuilles d’Oranger qu’on emploie souvent comme anti- spasmodiques et calmantes $ ces deux effets con- traires du Thé et de l’Oranger seraient -ils dus simplement à la différence d’intensité de l’ac- tion narcotique de ces deux plantes ? L’Opium offre des diversités plus grandes encore , et c’est sous ce rapport que Cullen a placé le Thé parmi les narcotiques \ on s’habitue en effet à son action comme à celle de tous les vrais narco- tiques $ si l’idée de Cullen est vraie , la diffé- rence apparente de l’action entre les feuilles du Thé et de l’Oranger rentrerait dans les lois gé- nérales. La graine des Camelliées paraît ren- (I) On peut consulter avec utilité, relativement à l’his- toire du Thé, un mémoire inséré dans le Journ. Pharm. , février i8i5, où M. Virey rapproche et analyse à-peu-près tous les faits connus sur le Thé. ( 99 ) fermer une certaine quantité d’huile ‘. celles dtt Camellia sesanqua fournissent au Japon une huile bonne à manger $ celles du Thea oleosa donnent aux Cochinchinois une grande quan- tité d’unç huile limpide* jaunâtre et qui sert soit pour l’usage de la cuisine * soit sur-tout pour l’éclairage. ai. H ESP BRIDÉES. Aurantia. Correa. , Ann. Mus. 6 > p. 87 6. — Mesperi - deœ. DC. Théor. 214.*— Aurantiorum gen. Juss. ■ — Hesperidearum gen. Vent. A l’époque de la première édition de cet Ou-* vrage * la famille des Hespéridées était encore si mal circonscrite * qu’elle renfermait des plantes hétérogènes par leurs propriétés aussi bien que par leurs formes > aujourd'hui que M. Correa l’a réduite dans ses vraies limites * toutes les espèces qui la composent offrent une grande uniformité de structure et de propriétés J ces arbres ont tous le bois remarquable par son tissu compact et serré $ les feuilles et les écorces sont munies d’un grand nombre de petits réservoirs vésiculaires pleins d’une huile volatile aroma- tique amère et excitante * qui donne à ces or- ganes des propriétés toniques et stimulantes assez prononcées * l’écorce du fruit participe â 7 A ( i0 ° ) ees propriétés : la pulpe de la baie est toujours plus ou moins acide comme nous le voyons dans les diverses espèces de Citrons et dans le Lima - nia acïdïssima ; cette acidité se retrouve quoi- qu’à un moindre degré dans les Oranges } les Pampelmousses ÿ ces propriétés acidulés ou Un peu amères rendent ces fruits rafraîchissans et utiles contre la fièvre et le scorbut. Dans les pays où les Hespéridées sont communes ? on substitue plusieurs espèces différentes les unes aux autres. as. M PLIA CE ES. Méliœ . Jliss. ? gen. 265, Les propriétés des Mélîacées sont mal con- nues y et le peu que nous en connaissons if’an- nonce pas uîné grande uniformité ; l’écorce du Caneîla alba , Mur. ? est aromatique , Un peu âcre , et sert d’assaisonnemens dans les Antilles ÿ celle du Ce dre La est odorante et ré- sineuse } celle du Ce dre la tuna est employée dans l’Inde comme fébrifuge 5 celle du Swie- ténia mahogoni est encore astringente , et passé pour fébrifuge ÿ cette proprété fébrifuge se re- trouve à un degré très prononcé dans le Swze- ! ténia febrifuga, connu dans l’Inde sous le nom de Soymida ; sa saveur offre une amertume X w ) nauséeuse et désagréable qui le rapproche des autres Méliaçées d'écorce du Guarea trichiloides est , d’après le téjnoignage d’Aublet, purgative et émétique. Le fruit pulpeux du JVLelia aze darach passe pour vénéneux, et a été employé à titre d’anthelmintique , aussi bien que la partie interne de l’écorce $ on l’emploie en substance ou en décoction \ ce médicament agit principale- ment contre les lombrics. Michaux assure qu’en Perse on se sert contre la teigne, de la pulpe qui entoure le noyau ; on en retire de l’huile au Ja- pon : sous ces divers points de vue , cet arbre qui vient très -facilement dans le Midi de la France , et qui y croît dans les plus mauvais terrains , mérite de fixer l’attention des obser- vateurs. Des propriétés analogues ont été ob- servées dans l’Inde quant au Meiia semper virens . On attribue des propriétés anti-spasmo- diques à l’ huile extraite du fruit du Me lia azedarachta . 23. SARMENTACÉES. Vîtes. Juss. — Sarmentacece . Vent. Les fruits des Sarmentacées sont des baies charnues et succulentes $ la baie de la Vigne cultivee.se distingue (les autres par l'abondance et la douceur du suc qu’elle fournit y mais '( I°2 ) ayant de regarder ce fait comme une excep- tion à la règle générale, il faudrait déter- miner la part que la culture a dans la produc- tion et l’améliorarion du raisin. Si la Vigne sauvage , qui se trouve dans le Midi de la France , et qu’on y nomme Lambrouche ^ La - brusque ou Labrot , est la véritable souche cle la Vigne cultivée , il faudra convenir que c’est presqu’entièrement aux travaux assidus de l’homme que cette espèce doit sa supério- rité sur les autres Sarmentacées \ les jeunes pousses de la plupart de ces plantes ont une saveur acidulé , saveur qui se retrouve dans plusieurs genres de la famille suivante. 2.4. G E R A N I É E S. Gerauieœ. Fl. Fr. — Gerania . Juss. , gen. 268. C’est sur-tout dans les fausses Geraniées que se retrouve cette saveur acidulé : ainsi les nombreuses espèces du genre Oxalis contiennent toutes une quantité plus ou moins considé- rable d’oxalate acidulé de potasse , qui leur donne une saveur acide agréable et des pro- priétés rafraîchissantes et très-légèrement laxa- tives. L ’ Oxalis ace lo sella en Europe , Y O, compressa au cap de Bonne-Espérance, Y O. fmîescens à la Martinique , et Y O. tuberosa ( î°3 ) au Chili , sont sur-tout remarquables par la quantité de sel d’oseille qu’elles renferment ; l ’ Oxalis dodecandra , et une autre espèce encore mal connue , sont employées au Pérou ; elles en ont été rapportées par Leubaz sous le nom de VinaigrilLa qui indique leur saveur $ il ob- serve qu’elles sont aussi astringentes et em- ployées dans les crachemens de sang 5 cette pro- priété rapproche les Oxalis des Géraniums dont nous parlerons tout-à-l’heure. Les Capucines et les Balsamines , rapprochées par M. de Jussieu des Oxalis , mais qui, de l’aveu même de ce naturaliste, en sont encore fort éloignées , ont été regardées comme diuré- tiques. Les premières sont sur-tout remar- quables par l’extrême rapport de leur saveur et leurs propriétés avec le Cresson et toutes les Crucifères. Aussi la chenille du papillon du chou ne vit que sur les Crucifères et sur la Capucine. Passons maintenant aux véritables Géraniées dont on a plus étudié les formes et la culture que les propriétés $ quelques - unes sont aci- dulés , et ce sont en général celles dont la feuille ou l’écorce est succulente $ plusieurs exhalent une odeur résineuse , quelquefois agréable , quelquefois si forte , qu’elle est nauséabonde. Le principe résineux est si abondant dans le ( i°4 ) Géranium spinosum , que sa tige brûle comme un flambeau en exhalant une odeur agréable. La propriété la plus générale parmi les Géra- nium , du moins parmi ceux d’Europe qui com- posent le vrai genre Géranium > est d’être astringens \ cette astringence se laisse recon- naître chimiquement en ce que leur suc teint en noir le sulfaté de fer \ elle est sur-tout re-^ marquable dans les G . robertianum et G . sanguineitm , qui Tun et l’autre passent pour vulnéraires dans les G. moschatum , pratense , etc. > dans lesquels elle est unie à un léger principe aromatique , et qui ont été indiqués comme utiles pour arrêter les flux séreux et sanguins soit dans l’homme , soit dans les bes- tiaux y comme aussi pour chasser le calcul y pro- priété attribuée à tous les astringens légers et aromatiques quiagissent ici comme diurétiques $ la propriété astringente des Géraniums se rer trouve aussi dans le G. maculatum qui croît abondamment près de Philadelphie et dont la racine, bouillie dans du lait, sert contre le choiera des enfans \ M. Barton pense qu’on pourrait l’employer contre le néphrétis et les diarrhées anciennes à la place de gomme kino. ( 105 ) 25. GUTTIFÈR ES. Guttiferœ. Juss. , gen. a55. Les Guttifères seraient sans doute d’une grande importance pour la médecine et pour les arts , si elles n’étaient pas exclusive- ment réservées aux climats brûlans voisins de l’équateur $ elles contiennent toutes , ainsi que leur nom l’indique , un suc gommo-rési- neux, ordinairement jaune, âcre ou amer, et employé rarement à l’intérieur 5 la gomme gute qui provient du Garclnia cambogia , et aussi, selon Hermann , du G-arciniamorella , est , comme on sait, un purgatif qui excite souvent fcdes douleurs dans l’estomac et des vomissemens pénibles , et qu’on emploie dans l’hydropisie et comme antlielmintique $ le sue des autres Guttifères paraît analogue à la gomme guttç \ on se sert dans les Antilles du suc du Mammea pour tuer les chiques , petits insectes qui s’introduisent sous les ongles des doigts des pieds ; c’est peut-être autant pour leur qualité vermifuge que pour leur nature résineuse qu’on emploie en guise de goudron le suc du Moronobea à Cayenne , du Clusia alba , et du C. rose a aux Antilles , etc. L’écorce de quelques espèces-, et sur-toivt ( io6 ) celle de leur fruit, paraît astringente et tnt peu vermifuge ; c’est ce que les voyageurs ob- servent relativement à plusieurs Garcinia , la pulpe des G -. mangostana , G. camhogia et G . celeblca , du Aïammea americana , est un peu acidulé, très- agréable au goût, et ordonnée comme rafraîchissante. Dans le Gricis , on cueille les fruits avant leur maturité complète ; on les confit à l’huile ou au sel, et ils servent ainsi d’alimens à l’homme. 26. H Y P E R I C I N É E S. Ilypericineœ. Juss. , Ann. Mus. 20, p. 4 %• — 5 Hyperica. Juss. , gen. 2.Sy. Les Hypéricinées touchent de près aux Gutti- fères par leur suc gomrno-résineux , jaune , visqueux, un peu amer, souvent purgatif ou anthelmin tique , et tellement analogue à la gomme gut te , qu’il a reçu le nom de gomme gutte d’Amérique , dans ¥ Hypericum bacci- ferum > L. , H. cayennense , L. , et H . sessi - Ufotium , Aubl. La plupart des Hypéricinées ont une saveur amère , un peu astringente qui les a fait quelquefois employer comme fébri- fuges \ Plusieurs exhalent une odeur résineuse due à une huile volatile renfermée dans des * glandes pellueides \ l’infusion des Millepertuis ( l0 7 ) rougit l’huile et l’esprit de vin ; les vertus anti-spasmodiques et vulnéraires attribuées à quelques espèces , ne sont pas bien prouvées. % 7 . H Y P P O C 11 A T I C É E S. Hippocraticeœ. Juss. , Ann. Mus. 18 , p. l \ 83 . Cette famille est encore mal connue des botanistes , et les propriétés du petit nombre de plantes qui la composent sont tout-à-fàit inconnues. 28. MALPIGHIACÉES. Malpighiaceæ. Juss. ? Ann. Mus. 18, p. 47^. Les Malpighiacées sont toutes exotiques et peu connues quant à leurs propriétés 5 le bois de plusieurs - espèces de Malpi ghia et de P Erythroxylon offre une belle couleur rouge et pourrait peut-être servir dans Fart de la teinture 5 l’écorce du Malpighia moureila d’Aublet , est employée à Cayenne comme fébrifuge \ le fruit charnu de plusieurs espèces de ce genre est bon à manger. 29. ACERINÉES. Acerinece . Juss. ? Ann. Mus. 18 ; p. 477* Cette famille en comprend véritablement ( xo8 ) deux très-distinctes par leur structure , et qu’on réunit ensemble à cause du petit nombre d’espèces que nous connaissons dans chacune d’elles ; ces deux familles sont les Maronniers et les Erables. Le grouppe des Érables se distingue par la sève douce et sucrée que contiennent presque * tous les arbres de ce genre $ Y Acer sacchari - num et VA, rubrum , ont une sève si sucrée qu’on en extrait du sucre dans PAmérique septentrionale ; cette même saveur se retrouve dans nos Acer pseudo-plaianus , camp es tris et platanoides ; ce dernier suinte une espèce de sucre concret. Les Maronniers sont remarquables par leur fruit amer, qui a été quelquefois employé comme sternutatoire , qui contient une assea grande dose de potasse pour servir de savon pu de cosmétique > et une quantité considérable de fécule qui le rend nourrissant pour plusieurs animaux et propre à fabriquer l’amidon. Cet arbre intéresse sur-tout la médecine par son écorce astringente , amère , fébrifuge et qui peut dans quelques cas suppléer le quinquina. ( 109 ) 3 o. SAPINDACÉES. Sapindi. Juss. , gen. 246. — Sapindaceæ. Juss., Ann» Mus. 18 ,p. 476* Cette famille exotique ést trop peu connue pour que nous possédions encore aucune gé- néralité sur les propriétés des plantes qui la composent ; on sait que l’écorce du fruit du Sapindus saponaria , L. , est savonneuse , et a été employée dans la chlorose; la pulpe qui entoure le fruit des Euphoria , des Melicocca est douce , agréable au goût et extrêmement estimée dans les Indes. L’amande de toutes les espèces de Vekea , d’Aublet , du Saouari glabra du même auteur, du Bertholietia (1) et du Cu- pania de Plumier , est bonne à manger , et donne , par expression , une huile analogue à celle d’amandes douces. Nous voyons par ces exemples que les espèces des mêmes genres ou de genres très-voisins sont employées aux mêmes usages. (1) MM. de Humboldt et Bonpland ont désigné sous ce nom , cher à tous les amis des sciences 7 l’arbre qui porte la Châtaigne du Brésil ? fruit dont les graines sont très- grosses , et pleines d’huile douce et comestible. La Ber - tholletia , le Pekea et le Saouari , paraissent former une famille particulière. ( uo J 3 i. DROSERACÉES. Droseracece . DC. Théor. 214 . — Capparidearum gen: Juss. Les feuilles fraîches des Drosera et no- tamment du Z), rotundifolia , ont une sa- veur légèrement acide et sur- tout âcre et un peu corrodante; elles font cailler le lait ; on assure qu’elles nuisent aux bestiaux qui les mangent ; leur emploi en médecine ? après avoir été beaucoup préconisé , est tombé en désuétude. 3 a. RESÉDACÉES. Resedaceœ. DC. Théor. 214* — Capparidearum gen, Juss. Les Résédas ne sont point employés en mé- decine ; la propriété qu’a la Gaude ( Réséda luteola ) de fournir une couleur jaune pour la teinture , paraît se retrouver ? quoiqu’à un moindre degré ? dans les autres espèces. 33 . CAPPARIDÉES. Capp arides, Juss. ? gen. 242. Les Capparidées participent aux propriétés des Crucifères , dont elles se rapprochent par ( 111 ) la structure 5 ainsi les Câpres sont stimulantes , et regardées comme anti-scorbutiques et apé- ritiyes. L’écorce de la racine du Câprier passe pour diurétique comme plusieurs Crucifères j de même plusieurs espèces de Cleome , ont une saveur âcre que plusieurs voyageurs ont com- parée à celle de la moutarde : la racine du Cleome dodecandra s’emploie comme vermi- fuge dans les Etats-Unis d’Amérique. Le Cleo- me icosandra , appliqué sur la peau , y pro- duit de l’inflammation, et est employé à la Co- chinehine , soit comme sinapisme , soit dans l’économie domestique comme assaisonnement. 34. CRUCIFÈRES. Cruciferœ. Juss., gen. 237. Tous ceux qui se sont occupés des sciences naturelles , savent combien les Crucifères pré- sentent d’uniformités dans leurs caractères botaniques , chimiques et médicaux : et sous ce point de vue , il est peut-être superflu d’en- trer dans aucun détail à leur égard. Toutes les Crucifères renferment un prin- cipe volatil fort âcre , long-temps attribué à l’alkali volatil , qui était regardé par plusieurs chimistes comme tout formé dans ces plantes. Il est vrai de dire que dans leur putréfaction , ( ) elles en dégagent une assez grande quantité y et que par la distillation on en obtient sou- vent une certaine dose $ mais leur eau distillée , ni leur suc récemment extrait ne donnent le moindre indice d’aikalescence : on pense donc que l’ammoniaque n’existe point toute formée dans les Crucifères , et qu’elle se développe dans certaines circonstances , à cause de la grande quantité d’azote que ces plantes ren- ferment. C’est probablement à cet azote qu’il faut rapporter l’odeur animale des Crucifères corrompues et leur facilité même à se putréfier ; c’est peut-être le besoin qu’elles ont de ce prin- cipe , qui fait que le plus grand nombre des Crucifères vit naturellement auprès des habi- tations des hommes ou des animaux. Quant au principe âcre de ces végétaux , il tient à une certaine quantité d’huile volatile qui s’en extrait par divers procédés chimiques , qui offre l’odeur et la saveur des Crucifères > et qui passe en petite quantité dissoute ou mélangée dans l’eau dis tilée. Ce principe rend les Crucifères éminemment stimulantes : s’il est concentré , comme on le voit dans les graines des moutardes (1), par exemple, et dans les ( i ) Ce ne sont pas seulement les Moutardes d’Europe comme les Papaveracées , et non corné , comme les Re- nonculacées ; 3 .° le port du Podophyllum est beaucoup plus semblable au Jeffersonia et au Sanguinaria qu’à au- cune Renon culacée. Au reste , quant à l’objet de cet ouvrage, la question est de peu d’importance car il y a des racines purgatives dans les Renonculacées et dans les Papaveracées. Le Podophyllum se place assez bien entre les Papaveracées et les genres herbacés des Berberidées*. ( “9 ) La graine de toutes les Papavérâcées est de nature oléagineuse , comme on le voit dans le Payot d’Orient , duquel on tire l’huile si im- proprement nommée huile d’OEillet. Cette huile est très-saine ÿ les graines elles-mêmes et la pâte qui reste après l’expression , servent d’aliment habituel dans plusieurs pays , et ne participent nullement aux propriétés narcotiques de la plante. On assure que la graine d’Argémone sert de purgatif aux Mexicains. Si le fait est vrai , il forme une légère exception à l’unifor- mité qu’offrent les graines des Papavéracées. 36. N Y M P H É A C É E S. Nymphœaceœ . Salisb. , Ann. bot. 2 , p. 6g. Les propriétés sédatives et anti-aphrodisiaques des fleurs et des racines des Nymphæa ont eu, dès la plus haute antiquité, quelque réputation ; quoiqu’elles ne soient pas bien démontrées , il est à remarquer que la même opinion s’est éta- blie dans divers pays sur diverses espèces de Nénuphar 5 ce qui est plus certain , c’est que leur racine est un peu amère et astringente, et a été sous ce rapport conseillée dans la dysen- terie } cette racine renferme une assez grande quantité de fécule, et celle du A. lutea est quel- quefois employée en Suède dans les années de ( 12 © ) disette * pour mélanger dans le pain avec Pé~ corce interne du P mus suives tris. 3 7 - BER B ER IDE ES. Berberides. Juss. , gen. 286. Tout le monde sait que les baies des Epines- Vinettes sont acides et astringentes , qu’on em- ploie leur suc comme rafraîchissant , et qu’a- douci avec du sucre , il devient agréable au goût 5 l’acide que ces baies renferment est de l’acide nialique ; les autres genres de cette fa- mille ont des capsules , et ne peuvent offrir les mêmes propriétés. Le suc de la tige et l’écorce des Epines -Vinet tes est extrêmement astrin- gent et employé sous ce rapport par les teintu- riers. J’ignore si cette propriété se retrouve dans d’autres genres de la famille $ au reste , quelques-uns de ces genres ont des rapports bo- taniques peu intimes. 38 . F R ANG IJL ÂGÉES. Franguîacece . Fl. Fr. — Rhamni. Juss. 9 gen. 076. La famille des Frangulacées offre plus de vé- gétaux importans que les dernières que nous venons de passer en revue , et contient de même un grand nombre de plantes dont on ignore les ( 121 ) propriétés : ce qu’elle peut offrir de plus cu- rieux , c’est le rapport cjui existe dans les pro- priétés de la baie et de l’écorce intérieure. Ainsi , dans la plupart des espèces qui compo- sent le genre Nerprun , tels que les Rhamnns catharticus , R. frangula > Ri. sa xaûlis J etc. $ dans V Evonymus europaeus , et les autres es- pèces de ce genre , la baie est assez fortement purgative , et devient quelquefois vomitive à plus forte dose ÿ le Liber est aussi purgatif, et devient plus facilement encore vomitif. Ori réu- nissait autrefois au genre des Nerpruns celui des Jujubiers (Zizyphus ) , qui en diffère non- seulement par des caractères saillans dans le port et la fructification , mais encore parce que tous ses fruits sont mucilagineux , bons à man- ger et nullement purgatifs : quelques-uns , tels que le Zizyphus lotus , font la nourriture ha- bituelle de certains peuples barbares. Ici nous voyons des propriétés faire , il est vrai, une exception dans la famille , mais se rattacher aux caractères génériques ; ajoutons cependant, pour diminuer cette anomalie , que les fruits des Nerpruns sont avidement mangés par les oi- seaux , ainsi que ceux du Schœjferia frutescens aux Antilles ; les baies de presque tous don- nent , par diverses préparations chimiques , des couleurs vertes on jaunes y tels sont les Rham- ( laa ) nus catTiarticus , R. infectorlus , R.frarigula > etc. Les feuilles cle quelques Frangulacées don- nent une infusion légèrement amère et styp- tique , employée à la place du Thé par divers peuples ; tel est le Rkamnus leezans , que les pauvres Chinois substituent au Thé ; le Ceano - thus americanus qu’on désigne quelquefois sous le nom de Thé de la nouvelle Jersey; le P rinos giaber , qui partage avec le suivant le nom de Thé des Apalaches ; et sur-tout le Cas- sina peragua , qui est le véritable Thé des Apalaches, et qui se rapproche particulièrement du Thé , parce qu’il produit une légère sorte d’ivresse , ce qui dénote une action sur les nerfs. L’écorce du Ceanothus ccærulea , joli arbuste nouvellement introduit dans nos jardins, passe au Mexique pour un bon £ brifuge : propriété qui mérite d’autant plus d’être examinée , que ce végétal pourrait vivre en pleine terre dans nos climats : j’en dirai autant de l’écorce du Prinos verdcillatus , qui est astringente, amère, tonique et fébrifuge ; on la substitue au quin- quina dans les États-Unis d’Amérique : elle lui est peu inférieure, sur- tout à titre de roborant, et souvent préférable d’après le témoignage de Barton. Cet arbuste vient très - bien en pleine terre dans nos jardins. ( 123 ) La décoction des jeunes rameaux du Celas - trus maytenus sert au Chili en lavage contre les enflures produites par l’ombre vénéneuse d’un arbre nommé Lithi. 3 g. PITTOSPORÉES. Pittosporeœ . Brown. , gen. rem., p. 10 . Les Pittosporées sont connues depuis très-peu de temps , et leurs propriétés n’ont pas encore été assez observées pour que j’ose les mention- ner ici 5 l’odeur forte qu’exhale l’écorce du JPittosporurn tobira et la madère résineuse qu’elle renferme , l’espèce de glu résineuse qui entoure les graines de toutes les espèces de ce genre , sont autant d’indices que ces arbustes pourront un jour faire partie de la matière mé- dicale. Si le Billardiera appartient réellement à cette famille , il s’y distingue , parce que la chair de son fruit est bonne à manger. 4o. SAMYDÉE S. Samydece , Vent., Merci, inst. Les propriétés sont encore inconnues $ l’écorce et les feuilles paraissent un peu astringentes. ( *4 ) 4 i. JUGLANDÉES. Juglandeœ, DC., Théor. 21 5 . L’uniformité des propriétés de tous les Noyers est trop connue pour que je fasse autre chose * que la mentionner 5 dans tous , l'amande a une saveur analogue et donne par expression une huile grasse, salubre et remarquable, dans cette sorte de produits végétaux, par sa propriété sic- cative 5 l’enveloppe du fruit et l’écorce intérieure ont une vertu astringente et une odeur fétide très-prononcée ; quand le principe astringent domine, on les emploie comme styp tiques et roborans ; quand le principe fétide est plus pro- noncé , on s’en sert comme anthelmintiques et comme cathartiques ; c'est ce qui a lieu parti- culièrement pour le Juglans cinerea . Le Noyer ordinaire ( J . regia ) a une saveur assez sucrée , et M.TBanon dit être parvenu à en extraire, par quintal , environ deux livres et demie de sucre cristallisable par des procédés analogues à ceux qu’on emploie pour les Erables. 42. TÉRËBINTH ÂGÉES. Terebinthaceœ. Juss. , gen. 568 . La famille des Térébinthacées offre en géné^ C 125 ) ral assez d’uniformité -, mais presque tous les arbres qui la composent étant exotiques , nous ne connaissons bien ni la nature chimique des sucs qu’on en extrait , ni leurs caractères bota- niques , ni conséquemment les véritables limites entre les sections de cette famille , et même entre lès Térébinthacées, les Zanthoxylées , les Légumineuses et les Amentacées. Commençons d’abord^ selon les principes établis plus haut, par distinguer les organes de ces plantes. La graine de toutes les Térébinthacées paraît être de nature oléagineuse : tout le monde con- naît cette propriété dans le Pistachier y elle se retrouve dans le Canarium commune , et pro- bablement dans X A nacardium et le Man g fera. Il faut même remarquer que dans toutes ces plantes , la pellicule qui recouvre l’amande est amère. La nature huileuse de la graine se re- trouve dans les Noyers ? les Amentacées et dans plusieurs Légumineuses , telles que l’Arachide et la Noix de Ben ( Guilandina moringa ). Autour des noyaux se trouve une pulpe or- dinairement aqueuse , douce et plus ou moins acide : cette acidité est très-remarquable dans les Averrhoa aeidissimd et bilimhi, qui sont pour cette raison employés aux Indes à faire des boissons rafraîchissantes pour les fiévreux ; elle se retrouve à un moindre degré dans VA- ( 12 * ) verrhoa carambola , L. > le Pis tac la atlantïca , Desf, \ le Spondias monbin , le Spondias miro - balanus > le Spondias citherea ? le Mangifera indica , qui servent d’alimens dans divers pays y dans le Schinus molle , qu’on emploie comme vinaigre , et dans le Khus conaria > qui en a reçu le nom de Vinaigrier . Dans quelques genres, au contraire , la pulpe du fruit peu développée , offre un principe astringent \ dans tous,, la par- tie extérieure du fruit ou son écorce , participe aux propriétés générales de l’écorce de l’arbre , c’est-à-dire qu’elle renferme dans des vésicules des sucs résineux ou de l’iiuile volatile plus ou moins âcre et caustique $ lorsque la pulpe est très-abondante , ce mélange d’huile volatile les rend simplement aromatiques 9 lorsque la pulpe est en moindre proportion , alors l’écorce de- vient prédominente. On a attribué aux fruits de deux arbres de cette famille, le Cassuvium occidentale j, Lam., et Y Anacardium orientale , Larn. , la singulière propriété d’exciter l’action du cer- veau , de manière à développer l’esprit et la mémoire ( 1 ). Sans doute cette assertion a besoin d’être vérifiée et analysée ; mais il est (i ) Voyez le Mémoire de M. Virey , inséré Bulletin Eli arm. 1814? p« 271. ( 12 7 ) digne de remarque, quant au but qui nous occupe , que toute extraordinaire qu'elle est , elle a été laite sur deux végétaux de la même famille. Le tronc même de toutes les Térébinthaeées renferme ou transsude des sucs résineux , odo~ rans, qui, selon leur degré de force, jouissent de propriétés très-diverses , et dont plusieurs Ont reçu le nom général de baume ; tel est le baume de Tolu , produit au Pérou par le Tb- luifera ; le baume de la Mecque , qui suinte des A my ris gileadensis , et A* opobalsamum ; le baume Acouchi produit par Y le ica acuchini > d'Aublet j la résine élémi , qui provient , selon les uns, de VAmyris elemifera ; selon d’autres 3 de Y Icica heptaphylla , Aubl. , et peut-être de tous les deux ; le mastic , produit en Arabie par le Pistacia atlantica, Desf. , et dans l'Archipel par le Pistacia lentiscus ; la térébenthine de Scio , qui suinte du Pistacia therebintkus : toutes ces matières résineuses se rapprochent beaucoup par leur odeur , leurs propriétés sti- mulantes, toniques et anti-septiques. Indépen- damment de ces matières que le commerce nous transmet, il en est d’autres utilisées dans leur pays natal pour les mêmes objets auxquels nous employons celles que je viens de citer $ ainsi ,1a résine concrète qui suinte du Schinus malle 9 ( 128 ) L. , sert an Péruviens à corroborer les gencives £ comme le mastic aux Orientaux. Le suc du Bur- sera gummifera est employé en Amérique com- me vulnéraire extérieur , aussi bien que nos baumes de l’Orient. Le bois et le suc de tous les le ica, du Canarium , de Y A my ris balsamifera (i), sont employés dans différens pays en guise d’encens pour brûler dans les temples et pour parfumer les appartemens. Le suc de Y A my ris guyanensis , de plusieurs espèces de Rhus , est employé dans la fabrication des vernis et peut servir de goudron $ Y Amyris ambrosiaca pro- duit à Cayenne une résine suave qu’on nomme résine de Coumia , et qu’on emploie soit comme encens à cause de son parfum., soit contre les diarrhées chroniques : enfin , le Boss'wellia ser- rata de Roxburgh , qui appartient à cette fa- mille , produit dans l’Inde le véritable encens , sous le nom duquel on répand dans le com- merce un grand nombre d’autres matières ré- sineuses ou térébinthinacées. Telles sont les propriétés générales de la fa- mille des térébinthacées , qui jusqu’ici mérite à juste titre le nom de balsamiers ? qui lui a été donné par Lamarck y mais à côté de cette uni- formité se trouvent des exceptions singulières : .(1) Bois de Rhodes de la Jamaïque. ( 12 9 ) cet arôme volatile qui, dans la plupart des cas* est si agréable , qu’on l’a comparé à l’encens , prend un autre caractère dans le Comocladia dentata et l 'A'ilantus , dont l’ombre passe en certains pays pour vénéneuse ^ ou du moins pour mal-saine ; dans les Rhus toxicodendron , radicans > vernix et typhinum , dont le simple contact cause souvent des pustules et des érysi- pèles , et détermine un genre particulier de vé- sication ; dans Y Amy ris toxifera , dont le suc passe pour vénéneux. Bien plus, nous trouvons dans plusieurs térébintliacées des traces pronon- cées d’un principe astringent qui manque dans la plupart $ ainsi l’écorce de Brasilia s truin sert à teindre en brun $ le suc des Comocladia ilici folia et C . dentata, teint la peau en noir pres- que indélébile 5 l’écorce du Britcea est employée comme astringente dans les dysenteries $ celle du Rhus glabrum comme fébrifuge et comme mordant pour les couleurs rouges , et celle du Rhus coriaria est utile aux corroyeurs pour préparer la peau des animaux. La présence de ce principe astringent confirme , comme on, voit , le rapport botanique entre les Térébin- tliacées et les Amentacées* Je ne cite point ici l’action vive et stimulante des poils qui couvrent les capsules des Cnestis et qui leur ont fait donner le nom de Grat tiers $ 9 ( 13 ° ) cette propriété est évidemment une action pu~ rement mécanique , analogue à celle des pois à gratter ( Mucuna ), ou à l’irritation produite par les petits poils fragiles des Raquettes ; en outre la place du Cnestis dans l’ordre naturel n’est pas encore bien déterminée. 43. TREMANDRÉES. Tremandreœ. Brown., gen. rem. , p. 12 . Propriétés nulles ou inconnues. 44. POLYGALÉES. JPolygaleœ . Juss. , Ann. Mus. 14 , p. 386. Il n’y a encore qu’un petit nombre de Poly« gala dont les propriétés aient été explorées ; leurs feuilles ont en général une saveur un peu amère et astringente qui les a fait employer comme stomachiques m y leur racine participe à cette amertume et à cette astringence ; mais on y trouve de plus une saveur un peu âcre et rési- neuse ? bien sensible sur-tout dans le P. seize ga , qui est employé en Amérique contre les mor- sures des serpens, et qui agit comme sudori- fique , ou diurétique , ou sialagogue , ou ca- thartique, ou un peu émétique, selon la ma- nière et la circonstanqe oh il est administré. L@ ( i3i ) Potygala sanguinea peut ? d’après Bartan ; remplacer le Senéga ; et Kiernander dit que le T o ly gala vulgaris d’Europe a des Ter tus tout™ à-lait analogues. La racine du Monnina polys- tachia , connue dans l’Amérique Espagnole sous le nom de Yalhoi , a les plus grands rap- ports avec les propriétés du P. senega , et est particulièrement employée contre ladysenterie : les propriétés toniques et sur-tout astringentes du Krameria iriandra , que les Espagnols d’A- mérique connaissent sous le nom de R.atanliia , s’éloignent très-peu des précédentes , si ce n’est en ce que le principe astringent y est plus pro-. noncé. La racine de Ratanliia contient , d’a- près M. Cadet , de l’acide gallique , mais point de tannin ni de résine. 45. LÉGUMINEUSES. Leguminosœ. Juss. ? gen. 345. La famille des Légumineuses, quoique établie d’après des caractères de première importance , offre cependant un si grand nombre d’espèces et des anomalies botaniques si singulières , que jious pouvons prévoir d’avance que ses pro- priétés nous offriront peu d’uniformité. Nous nous attendrons encore à de plus nombreuses exceptions , si nous réfléchissons que le prin- ■9"' ( 132 ) cipe chimique qui se retrouve le plus abondam- ment dans tous les organes des Légumineuses , et auquel on doit rapporter leurs principales propriétés , est l’extractif $ nous avons déjà en effet remarqué que ce principe, soit par sa pro- pre nature , soit par sa faculté fondamentale d’être uni à différentes matières , soit peut-être parce que , loin d’être un principe unique , il n’est qu’un mélange de diverses matières 5 nous avons, dis -je, déjà remarqué que l’extractif produit beaucoup moins d’uniformité dans les résultats , que tout autre élément des végé- taux. C’est sans doute à la présence de l’extractif, en dose plus considérable , que plusieurs Légu- mineuses doivent leurs propriétés purgatives , propriétés communes à plusieurs extraits , et que plusieurs chimistes attribuent à l’acétite de potasse qu’on y trouve presque toujours uni. Ainsi les feuilles et les gousses foliacées du Cassia senna , Lin. (1) , du Cassia lance o- lata , Forsk. (a) , du Cassia emarglnata des Antilles , du Cassia marylandica employé aux Etats-Unis , du Colutea arbores cens , du spar- tium purgans y et peut-être aussi du Coronilla (1) Séné d’Italie. (2) Séné d’ Alexandrie» ( 133 ) ernerus , purgent toutes d’une manière assez active , et en excitant souvent des vents et des douleurs d’entraiiles. Le suc du CoronïLla varia excite le vomissement et peut même devenir vénéneux lorsqu’on le prend à trop haute dose. C’est probablement par un principe diffé- rent que la pulpe renfermée dans les gousses de plusieurs Légumineuses agit sur le corps humain ; elle purge doucement sans exciter la moindre douleur , et doit être regardée comme laxative plutôt que purgative. Tel est le caractère de la pulpe sucrée qui existe dans le Cas sia jistula , Lin. , dans le Tamarindus indica , Lin. , dans le Ceratonia siliqua , et probablement dans les Mimosa inga et M. fagifolia qu’on mange en petite dose dans les Antilles , mais qui , pris en plus grande abondance , aurait le même effet que nos Ca- roubes. Il est quelques fruits de Légumineuses, tels que les Sophora et les Gleditsia à gousses renflées , dans lesquelles on trouve un suc qui entoure , il est vrai , les graines comme le pré- cédent, mais qui en diffère tout-à-fait par sa saveur très - astringente et un peu nauséa- bonde y la nature et les propriétés de ce suc mériteraient d’être examinées par les chimistes et donneraient sans doute des lumières sur la ( * 34 ) nature des Légumineuses : je suis porté à croire que le suc astringent des Sophora est une sécré- tion du péricarpe ? tandis que le suc douceâtre et purgatif de la Casse serait une secrétion de la partie externe de la graine ; mais cette hypo- thèse a besoin d’être vérifiée \ ce qui m’y con- duit est la saveur ordinaire des gousses : dans les Caroubes j par exemple , la gousse est astringente et la pulpe douce et laxative. Mais revenons aux propriétés qu’on peut attribuer à l’extractif. C’est sans doute à quelqu’une de ces modifi- cations f mais qui se retrouve dans plusieurs plantes de cette famille ? qu’est due la singulière propriété par laquelle les Piscidia et plusieurs Galega sont employées en Amérique y pour endormir les poissons qu’on prend parce moyen comme avec la coque du Levant. La décoction de la racine du Galega virginiana passe en Amérique pour un puissant vermifuge. Dois-je encore rapprocher de ces faits l’action rubé- fiante que les feuilles fraîches de ’ plusieurs Légumineuses , appliquées en cataplasme , exercent sur la peau , comme on le voit par l’exemple de V Omithopus scorpioides en Eu- rope^ de 1 ’ Hyperan thera jnoringa dans l’Inde ï C’est ? ce me semble > au mélange plus ou moins considérable de l’extractif avec la fécule ( i35 ) qui compose la semence , qu’on peut attribue*? les propriétés diverses des graines de Légumi- neuses» Est-il en petite dose? La graine pourra servir alors d’aliment à l’homme et aux ani- maux, comme on le voit dans les Haricots , les Pois, les Lentilles, les Pois-Chiches, les Fèves ? le Cajan , le Labia b , le Haricot de la Chine , etc. Qu’il y soit en dose plus considérable , il les rendra purgatives ou vomitives , comme dans les Oytisus laburnum , l ’ Anagyris fœtida , et même dans plusieurs Coronilles , etc. Il est en effet remarquable sous ce point de vue que les caractères botaniques soient rigoureusement d’accord avec les propriétés des graines des Légumineuses : on peut diviser’ celles-ci en deux sections , savoir : i.° celles dont les coty- lédons sont épais, remplis de fécule , dépourvus de pores corticaux et qui dans la germination ne changent point d’état et nourrissent la jeune plante au moyen de ce magasin d’aliment pré- paré d’avance. 2. 0 Celles dont les cotylédons Sont minces , très-peu féculens , munis de pores corticaux , susceptibles de se changer en feuilles à l’époque de la germination et d’éla- borer la nourriture de la jeune plante. Toutes les graines de la première section sont em- ployées comme aliment dans divers pays ; aucune de celles de la seconde ne l’est nulle ( 135 ) part ; le Cajan classé long-temps parmi les Cytises faisait une exception apparente à cette règle générale 5 l’observation l’a fait disparaître. Guidé en effet par la connaissance de ses pro- priétés , j’ai observé plus attentivement ses formes et j’ai prouvé , dans les notes qui accom- pagnent le catalogue du jardin de Montpellier , que les Cajan s forment un genre particulier beaucoup plus voisin des Haricots que des Cytises , et appartiennent à la première des sections que je viens d’indiquer. Les graines des Légumineuses présentent encore beaucoup d’autres anomalies plus difficiles à réduire à quelques lois fixes, ainsi on en trouve qui contiennent une assez grande quantité d’huile fixe, telles sont la graine de Y Arac/iis hypogœa , introduite en ces derniers temps dans l’agri- culture européenne , et celle du Guilandina moringa qui produit l’huile de ben $ il en est dont la saveur et l’odeur sont un peu âcres : telle est la graine du Coumarouna odora d’Aublet, qui, sous le nom de fève Tonga ou Tongo , sert à aromatiser le Tabac $ il en est qui , comme le Pois-Chiche , présentent une saveur un peu amère et des propriétés exci- tantes qui le font employer contre la jaunisse. Il en est comme celles des Andira dont l’amer- tume est assez forte pour qu’on les emploie à ( > 3 7 ) Java et an Brésil comme toniques, alexitèreset vermifuges. Serait-ce enfin à une modification de l’ex- tractif qu’on pourrait attribuer les propriétés apéritives et diurétiques que l’on observe dans l’herbe et la racine de plusieurs Légumineuses ? telles que lesGenets, les Fèves , l’Ononis, les Guilandina riuga et moringa 3 Y Anthyllis cretica } etc. ? Il est au contraire d’autres racines qui , étant munies de tubercules , c’est-à-dire de réservoirs de fécule , offrent à l’homme un aliment sain , comme on le voit dans le La - thyrus tuberosus que l’on mange en Hollande , le Dolichos tuberosus et le D. bulbosus , dont les Indiens font usage comme aliment. Les racines de la Réglisse ont une saveur sucrée et mucilagineuse , qui est bien connue de tout le monde , et qui , unie à un principe âcre et jin peu excitant , la fait employer comme bé- chique et pectorale; l’analyse de cette racine , publiée par M. Robiquet , prouve qu’indépen- damtnent de son squelette ligneux , on y trouve de la fécule amylacée comme dans les racines tubéreuses que nous venons de citer; on y voit que la saveur âcre des décoctions de Ré- glisse, tient au peu d’huile résineuse qu’elle ren- ferme et que sa matière sucrée n’a rien d’analogue ayec le sucre ordinaire , puisqu’elle est insoluble ( i38 ) dans feau froide , soluble dans l’eau chaude et dans l’alcool ? qu’elle n’est point susceptible de fermentation et ne donne , par l’acide nitrique y aucun des produits du sucre. Je dois ajouter ici j relativement au but particulier de cet ouvrage > que la saveur sucrée et les propriétés du Réglisse ne sont pas particulières à ce genre ; ainsi on les retrouve dans les racines du Trifo- lium alpinum, vulgairement connu sous le nom de Réglisse de montagne ; dans celles de F A brus precatoriiis ; qui servent dans l’Hindoustàii à préparer une boisson pectorale nommée Vetti x Q te. Les écorces de quelques arbres de la famille des Légumineuses ? sont remarquables par leur amertume et employées comme fébrifuges $ les diverses espèces de Geoffrœa présentent cette propriété amère et fébrifuge avec une inten- sité remarquable : on se sert dans l’Inde y sous le même rapport , de l’écorce de Y Æschino- mena grandijlora 3 et -de celle du Cœsalpînia bonducella. Plusieurs écorces de Légumineuses sont aussi remarquables par leur qualité as- tringente due à la quantité de tannin qu’elles renferment ; c’est ce qu’on observe dans Y Aca- cia catechù qui donne le cachou y dans Y Aca- cia arabica qui sert à tanner les cuirs y etc» On sait que presque toutes les matières colof- ( i3 9 ) rantes sont dues à l’extractif \ et s’il est vrai que ce principe est abondamment répandu dans les Légumineuses , nous devons y trouver un grand nombre de couleurs employées par nos teinturiers : c’est en effet à cette famille qu’appartiennent la plupart des couleurs bleues , connues sous le nom d’indigo ( \ ) , et retirées de toutes les espèces d ' Incügofera et de quelques ~Galega ; les couleurs rouges qu’on extrait de toutes les espèces de Cœsal- pinia , d ’ H œmatoxy Ion ( 2 ). Pourrions-nous rapprocher de cette classe les sucs rouges qu’on retire des Pterocarpus draco et Santaünus (3) , (1) Il est aujourd’hui bien connu que l’Indigo est un des matériaux immédiats des végétaux , et peut par con- séquent se retrouver identique avec lui-même dans des végétaux d’ailleurs très-différens. Ainsi on en extrait parmi les Légumineuses de divers Indigofera et Galega, parmi les Crucifères de VIsutis , parmi les Apocinées du Mars- dénia , etc. , etc. , etc. (a) Le principe colorant du bois de Campêche réside dans une matière particulière découverte par M. Che- vreuil , qui lui a donné le nom à? Hématine. ( 3 ) Le principe colorant du Santal rouge est , d’après M. Pelletier, analogue aux résines par plusieurs proprié- tés 5 mais il en diffère par plusieurs caractères , tels que d’être presque insoluble dans l’eau • très-soluble dans l’alcool j l’éther, l’acide acétique, les solutions alcalines 5 ( i4° ) sons le nom de Santal et de Sang-Dragon ; de Y Erythryna monosperma , sons le nom de gomme-lacque , et dn JDalberpia monetaria ? Ces sucs paraissent très-différens entr’eux $ mais leur histoire et leur analyse sont encore trop incertaines pour donner aucune importance à ces rapprocliemens ou à ces différences. Nous trouverons plus d’anomalies encore si nous observons la nature des sucs exotiques que nous employons à divers usages ? et que nous regardons comme produits par des Légumi- neuses ; tel est , par exemple ? le baume de Copahu , qui provient du Copdifera , mais la place de ce genre dans l’ordre naturel est en- core décisive $ tel est le baume du Pérou , pro- duit ? selon Mutis , par un Myroxilon ; tel est le Cachou y qu’on a reconnu être du tannin presque pur , et qu’on regarde comme le pro- duit du Mimosa catechu (i) 5 telle est encore la presque insoluble dans les builes fixes et volatiles 5 de donner par l’action de l’acide nitrique les produits des résines, plus de l’acide oxalique 5 de former de vraies combinaisons avec les oxides métalliques 9 et d’agir ? quand il est dissout , dans l’acide acétique comme une substance astringente sur les matières animales. (ï) Les Butea frondosa et superba exsudent parleur écorce un suc rouge très-astringent ? et encore peu ou point connu des Européens. ( lis ) résine animé , qu’on pense être produite par Y Hymenaea courbaril ; telle est enfin la gomme qu’exsudent les écorces et les racines de plu- sieurs Légumineuses, par exemple , les Acacia senegalensis , A. nilotica , A. arabica 9 etc,, qui produisent la gomme arabique | les Astra- galus creûcus , A . gummïfer , A . ver us ? etc* ^ qui suintent la gomme adragant ; Y Hedy&a- rum alhagi , qui produit une espèce de manne. J’avoue qu’au milieu de tant de faits con- tradictoires , et dont plusieurs sont connus in- complètement , je ne saurais saisir le lien qui peut les unir $ et je regarde la famille des légu- mineuses, considérée dans son ensemble, comme contraire à la théorie quoiqu’elle s’en rapproche dans plusieurs cas ; il est même juste de remar- quer qu’elle s’en rapproche dans les points dont l’histoire est bien connue , et qu’elle paraît s’en éloigner davantage dans ceux dont l’histoire est est obscure et incertaine. 46. ROSACÉE S. Rosaceæ. Juss., gen. 35zj. Ce même principe astringent que nous ve- nons de remarquer dans la famille précédente , nous l’observerons avec plus de développement dansles Rosacées que nous connaissons mieux, ( *4 a ) parce qu’elles sont à proportion plus nombreuses dans nos climats. Ce principe est généralement répandu dans les divers organes de ces plantes ; quelques-unes ont été , par cette raison , conseil- lées comme fébrifuges ; plusieurs sont encore employées dans divers pays pour arrêter les hé- morragies , les diarrhées et les dysenteries. C’est sur-tout dans l’écorce de la racine que ce principe se fait sentir , comme on le voit dans la racine cle la Tormentille , qui sert pour le tannage dans l’île de Féroë ; du cerisier Capol- lin du Mexique , dont la racine en décoction sert contre les dysenteries ; du Cerasus virgi - niana , dont l’écorce sert de fébrifuge aux Etats- Unis m 9 de la T? ote ntilla reptçuis > qui a été van- tée comme fébrifuge $ de la P. anserina , qui , dit-on , a été employée autrefois par les tan- neurs y de la Spirea filipendula, où il est affaibli par la fécule qui se trouve dans les tubercules ÿ du Geum urbanum (1) , et du G . rivale , qui * en Europe et en Amérique , ont été mis en pa- rallèle avec le quinquina , etc. Cette même propriété astringente se retrouve à un degré plus faible clans l’écorce, et par conséquent {1) La racine du Geum urbanum contient environ •— de son poids de tannin, d’après l’analyse de M. r * Méi» landri et Moretti. * { 14 ^ ) clans les feuilles de plusieurs plantes analogues , tels que le Fraisier , le E-Osier , la Tormen tille, les Spirées , les Pimprenelles , les Pruniers , les Alchemilles , et probablement toutes les Rosa- cées \ c’est à cause de ce principe que les feuilles du Dry as octopetala sont employées dans le Nord de l’Europe pour faire une espèce de Thé» On a de même employé comme succédanées du Tiré les feuilles du Pubus arcticus en Norvège 9 et celles du Prunus s p inos a , du Ce ras us avium , du Posa l'ubiginosa en Europe* Les calices participen t toujours aux propriétés des feuilles ; et comme dans cette famille le ca- lice fait souvent corps avec l’ot aire , on con- çoit que nous pourrons retrouver ce même principe astringent dans les fruits des Rosacées à ovaire adhérent : c’est en effet ce qu’on ob- serve dans tous avant la maturité 5 et dans quel- ques-uns , telles que la Nèfle* la Sorbe, la Poire , la Pomme sauvage, cette saveur astringente existe encore à la maturité parfaite (1)5 elle est au contraire presque nulle , et se trouve ordi- nairement remplacée par un. mélange d’acide et de matière sucrée dans les Rosacées à ovaire (1) Voyez ci-après quelques observations sur l’altéra- tion particulière des fruits charnus et à ovaire adhérent au calice , consignée» dans l’article 76 , famille des Ébéna- c ées. ( 44 ) libre , telles que les Fraisiers ? les Framboisiers 9 les Ronces , les Cerisiers ? etc. L’écorce de la racine de la Spiræa trîfoliata se rapproche de ses congénères par son astrin- gence , mais elle offre une singulière anomalie 9 parce qu’elle est émétique : on l’emploie aux Etats-Unis sous le nom d’Ipécacuanha ; elle se donne à la dose de trente grains , et a , comme l’Ipécacuanha , une action tonique jointe à l’action émétique. Il paraît qu’il existe aux États-Unis une autre Spirée émétique; peut- être retrouvera-t-on cette propriété dans celles des autres pays ; le grouppe des Spirées diffère beaucoup des autres Rosacées , et il n’est pas extraordinaire qu’il présente quelques proprié- tés particulières. On assure que l’écorce du Ludia heterophylla est un bon émétique pro- pre à suppléer l’Ipécacuanha. Il existe , dans quelques Rosacées ? un prin- cipe destructeur de l’irritabilité animale ; c’est celui que l’eau distillée du Laurier-cerise nous présente dans son plus grand état de pureté 9 s’il est permis d’employer ce ternie , relative- ment à un poison dangereux ; ce principe pa- raît être de l’acide prussique ? naturellement formé dans ces végétaux. Voyons si cette pro- priété est réellement isolée dans la nature , comme elle semble l’être au premier coup-d’ceil ; ( 45 ) remarquons d’abord que la pulpe qui entouré le noyau du Laurier-cerise est douce, mangée avb dement par les oiseaux, et aussi saine que celle dé la Cerise ordinaire $ le principe délétère n’existé que dans le noyau et les feuilles^ l’eau distil- lée de ces organes , prise à très-petite dose, agit tantôt comme un violent purgatif, tantôt com- me émétique : à plus forte dose , elle détruit l’irritabilité sans exciter aucune inflammation | les mêmes phénomènes se retrouvent , quoiqu’à un degré plus faible , dans les amandes amères, qui sont , comme on sait , la souche naturelle des amandes cultivées $ nous retrouvons cette même amertume dans l’amande et les feuilles des pêchers, et leur eau distillée produit des effets dangereux sur l’économie animale \ les amandes douces elles -mêmes sont encore de légers narcotiques ; je pense que tout le grouppo des Drupacées participe plus ou moins aux pro- priétés délétères des feuilles et du noyau du Laurier-cerise $ ainsi les feuilles et les drupes du Prunus virginiana sont connues aux Etats- Unis comme vénéneuses pour plusieurs animaux. Si f on s’étonne de voir une section de la famille des Rosacées jouir de propriétés si différentes , je ferai remarquer que ces propriétés résident spécialement dans le noyau , qui fait le carao 1ère distinctif de ce'cte section ; et dans les 10 ( 146 ) feuilles qui offrent aussi des différences tran- chées dans l’organisation. Ces mêmes drupacées se distinguent encore par un autre caractère chimique qui les rapproche des Légumineuses \ c’est l’exsudation, d’une matière gommeuse très- analogue à la Gomme arabique , et connue sous, le nom de Gummi nostras . 4 7 . S ALI CAIRE S. Salicariœ. Juss,., gen. 33o. Leurs propriétés sont mal connues et parais- sent très-voisines de celles de la famille précé- dente 1 la Salicaire est utile comme astringent contre les diarrhées invétérées j Y Apanxaloa d’Hernandez , qui est une espèce de Lythrum , est employé au Mexique comme astringent et vulnéraire 5 les Law sonia , dont les Arabes se servent pour colorer leur peau , sont aussi re- gardées comme astringentes : mais une espèce de Ginoria que MM. Sessé et Moçino ont ob- servée au Mexique , est très - remaquable par l’énergie de propriétés, qui paraissent contraires aux précédentes 5 son suc exprimé et pris à la dose de quatre onces , excite violemment les sueurs , les urines et les selles ; les Mexicains qui donnent à cette plante le nom de Hanchi - nol , disent qu’elle guérit les maladies véné- ( 47 ) riennes avec une grande rapidité ; observons cependant que plusieurs matières astringentes sont déjà connues comme diurétiques. 48. MELASTOMÉES. Melasiomœ . Juss. y gen. 528. La famille des Mélastomées a quelques rap- ports avec la suivante par ses caractères bota- niques ; mais elle en diffère sur-tout par l’ab- sence presque totale de l’huile essentielle \ ses feuilles paraissent douées d’un principe astrin- gent 5 il a été formellement observé dans le Melastoma incilabathrica , L. C’est probable- ment a| même principe qu’est due la couleur noire que forment les M. longfolia et parvi - frora d’Aublet ; serait -ce enfin à une légère astringence qu’on doit attribuer l’usage des ha^ bitans de la Guianne , qui lavent les blessures avec le suc des Melastoma suce osa et M . ala- ta d’Aublet ? Le fruit de toutes les Méîastomes est une baie succulente et bonne à manger clans le plus grand nombre , telles que les M. suc- cosa, Aubl. , M. arborcscens , Aubl. , M* fia- is escens y Aubl. ? M . crispata y L. y M\ tnala- bathrica , L. , M. elegans y Aubl. , M. agrès - tis y Aubl. , M . macrophyllay Lain. 5 dans quel- ques-unes y et entr’autres dans le Toc oc a guya- IQ , ( M8 ) nensis , Àubl. , le suc de la baie est assez noir pour être employé comme de l’encre $ c’est de cette propriété qu’est tiré le nom de Melastome ( Bouche noire ) , qui indique que le suc de leurs fruits teint en noir la bouche de ceux qui les mangent. 49. M Y R T ï N É E S. Myrù. Juss., gen. Saa. Les Myrtes ont été célébrés, par les poètes non-seulement à cause de l’élégance de leurs formes , mais encore pour la suavité de leur odeur $ cette odeur qui annonce la présence d’une huile volatile, rend ces arbustes précieux dans l’économie domestique et médicIR. On peut distinguer dans les Myrtinées , deux classes de propriétés 5 celles qui tiennent à leur huile volatile , et celles qui dépendent d’un principe astringent ; l’une et Pautre résident dans l’écorce depuis la racine jusqu’au fruit , et elles sont conséquemment le plus souvent réunies ensemble, mais à diverses proportions. L’huile volatile se trouve dans de petites vésicules qui existent dans toute la partie corti- cale , et qu’on aperçoit dans les feuilles par leur transparence 5 lorsqu’on l’extrait pure ( 149 ) comme on le fait pour l’huile de Cayepnt , extraite du Melaleuca cajeputi , et peut-être aussi du Melaleuca leucadendron et de quel- ques espèces voisines \ pour l’huile de gérofle qu’on retire des calices du Géroflier avant l’épanouissement des fleurs 5 pour l’huile de myrte qu’on extrait de sa baie , mais qui est peu employée , etc. 5 lors , dis-je , qu’on obtient pure l’huile volatile des Myrtinées $ on la trouve très-aromatique , un peu âcre, presque caustique , et à un moindre degré de force tonique et stimulante pour là fibre musculaire et même anti-spasmodique 5 c’est à la présence, en quantité plus ou moins considérable , de cette huile volatile que diverses Myrtinées doivent leur odeur et leur saveur , tels sont , par exemple y les clous de Gérofles qui , d’après l’analyse de M. Tromsdorf en contiennent-^ de leur poids et qui deviennent presqu’in- sipides lorsqu’on les en a dépouillés. Le principe astringent existe sur-tout dans l’écorce de la racine et des fruits avant leur ma- turité 5 mais on le retrouve dans l’écorce de la plante entière. Tout le inonde l’a senti dans l’écorce de la Grenade y nous le retrouvons dans le Mgrtus ugni et le Mgr tus luma de Molina , dont les racines donnent une décoction employée au Pérou contre la dysenterie ; dans ( i5o) YEugenia maltaccensis , L. , dont l’écorcè offre le même secours aux Indiens; dans la résine extraite, à la Nouvelle-Hollande, de Y Eucalyptus resinifera et qui a été souvent confondue avec plusieurs autres produits as- tringens sous le nom très-impropre de gomme kino. Nous le retrouvons sur- tout dans les fruits de toutes les Myrtinées, qui sont astrin- gens et acerbes avant leur maturité. Lorsque le parenchyme de ces fruits prend de l’accrois- sement et que la matière sucrée s’y développe, alors le léger principe astringent et le léger arôme qui s’y trouvent réunis , les rendent agréables au goût ; ainsi les fruits du Grenadier , du Jambosier , de YEugenia jambolana , Lam. , des Esydium pyriferum et P. pomiferum , tuent leur principal mérite de la légère astrin- gence mêlée au mucilage de leurs fruits , tandis que le Myrtus ugrû; le Myrtus pimenta, et probablement Y Alarigium deçapetalum 9 doivent leur réputation à l’aromate de leurs baies. Les feuilles de plusieurs plantes de cette famille sont employées en guise de Thé , et ici on a autant recherché l’aromate que l’astrin- gence ; tels sont le Myrtus ugni, le Leplosper- mum scoparium , etc. La seule anomalie que présente la famille ( iSi ) des Myrtes , est la propriété de purgatif hydra- gogue, attribuée par les Malais aux Alangimn decapetalum et A . hexapetalum de Lamarck ; encore ces racines offrent-elles le même aromate que les autres Myrtinées ; mais probablement elles sont dépourvues du principe astringent. 5o. COMBRETACÉES. Combreiaceæ, Brown. , prod. 1 , p. 55 1. Les propriétés médicales aussi bien que les limites botaniques de cette famille sont encore peu connues , mais tout annonce qu’elle pourra un jour intéresser l’art de guérir. L’écorce de plusieurs de ces plantes paraît jouir d’une propriété astringente, comme on le remarque dans le Bucida huceras qui est connu aux Antilles sous le nom de Chêne français et y sert à tanner les cuirs; le suc propre des Termmalia fournit une matière qui paraît résineuse et susceptible de former des vernis , comme par exemple le T. vernix qui fournit le fameux vernis de la Chine ; ce suc est caustique et ses exalaisons sont dan- gereuses; le suc du T. henzoiii paraît fournir le véritable benjoin; l’amande de plusieurs espèces de Terminalia sert clans les Moluques- sait comme fruit mangeable; soit pour fournir 1 ( 152 ) tine huile fixe remarquable par la propriété qu’elle a de ne point se rancir. Ces faits encore isolés et la plupart mal connus annoncent que cette famille jouit de propriétés exaltées qui mériteront d’être étudiées en détail. 5i. LOASÉES. Loaseœ. Juss. Ann. Mus. 5 , p. 21 . Propriétés inconnues. 52. ON AG R AI R ES. Onagrariœ. Juss. ? Ann. Mus. 3, p. 3i5. Les propriétés des Onagraires sont nulles ou mal connues 5 le Santalum album , qui se distinguait dans cette famille par son aromate } en a été exclu par les botanistes et forme le type d’une famille voisine des Lauriers. Le Trapa natans est remarquable par la grandeur de sa graine qui sert d’aliment à l’homme. On emploie , dit-on , la racine de Y JEnothera biennis comme salade , et les feuilles de la Jussiœa perunana comme cataplasme émol- lient, ( i53 ) 53. FICOIDES. Ficoideœ. Juss. , gen. 3i5. Les Ficoïdes ont en général des feuilles charnues et aqueuses à l’intérieur $ quelques- unes servent d’aliment à l’homme, par exemple le Sesuvium portulacastrum dans les Antilles , le Mesembry anthemium edule&w cap de Bonne- Espérance et dans la Nouvelle-Hollande ( 1 ) , et la Tetragonia expansa à la Nouvelle- Zélande : mais ces plantes nous intéressent sur-tout par la quantité de matières salines toutes formées qu’elles contiennent , et qui en suintent quelquefois naturellement : ainsi la plupart d’entr’elles , lorsqu’elles croissent sur les bords de la mer, servent à la fabrication de la soude ; elles contiennent d’autres ma- tières salines lorsqu’elles croissent loin de la mer : ainsi le R eaumuria vermiculaîa , cultivé au Jardin des Plantes de Paris , exsude par ses pores corticaux un mélange de muriate de soude et sur-tout de nitrate de potasse ( 2 ). (1) La plante de la Nouvelle-Hollande est une variété très-notable de celle du Gap et peut-être une espèce dis- tincte. (1) Voyez Bull. Philom. , a.° 80. ( 154 ) serait-ce à cette quantité de sel contenu dans les Ficoïdes ? qu’il faut attribuer l’emploi du Mesembryanthemum nodijlorum pour les pré- parations du maroquin ? Au reste , voyez les observations sur la formation de la soude , à l’article des Chénopodées , n.° 100. 54 . PORTULACÉES. Portulaceœ. Juss. 7 gen. Sis. Le Pourpier est , comme on sait 9 un légume légèrement rafraîchissant ; son suc est un peu âcre avant d’être cuit. Le Claytonia perfoliata f Wild., ou C. cubensis , Humb. et Bonpl. ? à une saveur très-analogue au Pourpier or- dinaire ; il forme un légume agréable , soit cuit et accommodé comme le Pourpier 9 soit cru et en salade (1). Les propriétés des autres plantes de cette famille sont peu ou point connues ; elles sont ? en général ? insipides et inodores. cultivés pour l’usage de la cuisine y au moins dans le Midi de la France 5 elle y prospère très-bien dans les lieux ombragés 9 s’y resème chaque année d’elle-même , et a l’avantage de donner ses feuilles au premier prin- temps et avant l’apparition de presque tous les autres lé- gumes; celui-ci est d’ailleurs très-délicat. (1) Cette plante mériterait de faire partie des végétaux.. ( *55 ) 55. PA RONYCHIÉES. JParonjchieœ. St.-Hil. et Juss. , Ann. Mus. Propriétés foibles et peu connues 0 Les Herniaria et quelques Paronychia sont rai peu astringentes, et des traces de cette propriété semblent se retrouver dans le Scleranthus et les genres voisins. 56. T AM ARI S CI NÉE S. Tamariscincœ. Desv. Les propriétés des Tamarix ne sont un peu. connues que dans les deux espèces communes en Europe; leur écorce est un peu amère, astringente et probablement tonique : le Ta- marix de Narbonne ( Zi gallica ) et probable- ment aussi le Z. af ricana, qui croît mêlé avec lui sur les côtes méridionales de la France , sont remarquables par la quantité de sulfate de soude que leurs cendres renferment et que quel- ques pharmaciens du Languedoc ont souvent extrait avec profit. ( i56 ) 57 . N O P A L É E S. JSopaleœ. Juss. med. — Cactonnn gen . Juss. > gen. Tons les Cierges ont entr’eux de grands rapports malgré l’extrême diversité de leurs formes extérieures ; leur parenchyme est épais peu on point sapide $ leurs fruits sont charnus , aqueux , peu savoureux , les uns tellement petits et insipides qu’on les néglige entière- ment y les autres servent de rafraîchissemens dans les pays chauds à cause de la grande quantité d’eau qu*ils renferment. L’usage du fruit du Cactus opuntia offre cette particula- rité , que les urines de ceux qui en mangent prennent une couleur rouge qu’on attribue au premier instant à un mélange de sang , mais qui n’est qu’une simple coloration inno- cente de l’urine. Le suc du C. mammillaris est remarquable par sa teinte un peu laiteuse \ mais contre la propriété ordinaire des sucs laiteux ? celui-ci est doux et insipide. 58. GROSEILLE RS. Grossulariæ. Fl. Fr., vol. IV, p. 4o5. — Caciornm gen . Juss., gen. Cette famille est en apparence fort différente ( l5 7 ) de la précédente par le port et la plupart des caractères $ mais le Cactus pereskia , nommé vulgairement Groseiller d’Amérique , établit leur véritable liaison. Tous les Groseillers ont une baie très-aqueuse , fade et douceâtre dans la plupart des espèces et notamment dans le Groseiller des Alpes , aigrelette clans le Groseil- ler rouge , aromatique dans le Groseiller noir qui porte sur ses feuilles et sur ses baies des glandes odoriférantes j les fruits des Cierges et des Groseillers sont employés comme tempé- rans et rafraîchissans : ceux du Cassis sont stimulans et toniques. Cette différence de propriétés tient à la présence d’un organe qui lui est particulier. 5 9 . CRASSULACËES. Crassulaceœ. DC. , FJ. Fr. 4 , p. 382. — Semper vivœ. Juss. Les Crassulacées ont, ainsi que leur nom l’in- dique , des feuilles épaisses , succulentes ; elles sont presque toutes employées à l’extérieur comme réfrigérantes et abstergentes ; elles sont aussi légèrement astringentes : dans quelques- unes , telles que le Sedum acre , Lin., il se développe un principe tellement âcre, que le suc de cette plante pris à F intérieur, excite des ( i58 ) déjections par le haut et par le bas , et a même été employé contre le scorbut : le même prin- cipe âcre me semble se retrouver , quoiqu’à un très-faible degré, dans les Crassulacées qui pa- raissent presqu’insipides 3 ainsi les feuilles du Sedum telephium , mangées comme légume , laissent àTentree de l’œsophage une petite irri- tation désagréable. M. Vauquelin a trouvé du malate de chaux dans le suc de la Joubarbe et de plusieurs sédums. La racine odorante du lihodiola rosea , Lin. , mérite d’être remar- quée comme une légère exception. 60 . S AX IF R AGEES. S axif rageas. Juss., gen. 5o8. On n’emploie plus depuis long - temps les Saxifrages comme lithontriptiqu.es 3 Pline y rap- porte l’étymologie de leur nom , qui me semble dériver bien plus clairement de la manière dont ces plantes vivent dans les fentes des rochers. Il faut cependant observer que ces plantes pa- raissent toutes un peu astringentes , et que les boissons astringentes sont employées utilement pour exciter l’action des reins et chasser les calculs 3 1 ’ Heuchera americana est connue aux Etats-Unis sous le nom & Aluni- Root et sa ra- cine qui est très- astringente , fait la base d’une ( i5 9 ) poudre employée avec quelque succès dans ce pays contre les affections cancéreuses. 61. CU NO NI ÂGÉES. Gunoniaceœ. Brown. ? gen. rem. Propriétés à-peu-près inconnues ; une espèce de W eirunannia qui croît aù Pérou, y sert au tannage des cuirs , et on mêle souvent en Iran de son écorce avec le Quinquina. Les Wein*- mannia de l’Inde , qu’on y connaît sous le nom de T an- rouge , paraissent avoir les mêmes pro- priétés. 62. ombèllifères. Umbelliferœ. Juss. ? Gen. 218. De toutes les familles de plantes dont nous traçons ici rapidement les caractères médicaux , il n’en est aucune qui mérite une attention plus scrupuleuse que celles des Ombellifères , soit à cause de son importance dans la diététique et la thérapeutique , soit à cause des anomalies qu’elle présente ; ici il sera nécessaire de re- courir avec soin à la distinction exacte des dif« férens organes , et même à celles des diff/érens sucs. Toutes les anomalies apparentes de la fà- ( 1(5 ° ) mille des Ombellifères me semble s’expliquer, en admettant que leur extractif est narcotique, et leurs principes résineux plus ou moins sti- mulans et aromatiques $ ou , en d’autres termes, que leur sèye à moitié élaborée est narcotique , tandis qu’au contraire elle devient aromatique ou stimulante lorsqu’elle est transjjlrmée en véritable suc propre. Suivons les conséquences de cette hypothèse , en l’appliquant à chaque organe en particulier , et aux phénomènes gé- néraux que présentent les Ombellifères. La Physiologie végétale nous apprend que l’humidité du sol pénètre dans la plante par l’extrémité des radicules , qu’elle s’élève dans le corps de la racine , puis monte dans le tronc jusqu’à l’extrémité de la plante ; là, par des chemins encore inconnus , après avoir été éla- borée , elle se change en suc propre , et redes- cend le long de l’écorce jusque dans la racine. Celle-ci est donc composée d’une grande quan- tité de sève non encore élaborée , et d’une cer- taine quantité de suc propre qui redescend de l’écorce \ par conséquent , d’après notre hypo- thèse , la racine des Ombellifères doit être un mucilage aqueux plus ou moins fade et plus ou moins aromatisé par le suc propre , elle doit n’être nullement dangereuse puisqu’elle con- tient peu ou point d’extraçtif , et être par con- ( 1*1 ) séquent propre à la nature de Fliomme. Ce sont là en effet les propriétés générales des racines de Carottes , de Panais , d’Angéliques , de Pa- nicauts , de Lasers , de Berles , etc. , etc. , où nous ne voyons de différences qu’une plus ou moins grande quantité de principes sucrés aro- matiques 3 les racines même des Ombellifères vénéneuses sont quelquefois salubres , comme on le voit par l’exemple curieux de l’ Ænanthe pimpinelloïdes , dont les tubercules radicaux servent d’aliment , à Angers , sous le nom de JouanetteSy et à Saumur sous celui de Méchôns . Plusieurs racines d’Ombellifères présentent une quantité notable de matière sucrée 3 ainsi on en. trouve, d’après M. Drapier, 14 pour 100 dans les racines de Carottes desséchées , 12. \ dans celles de Panais , 8 dans celles de Chervi. Dans l’herbe , au contraire , nous trouvons une quan- tité notable d’extractif mélangé dans la sève , et qu’on extrait par l’infusion ou la décoction dans l’eau 3 à l’extérieur, c’est-à-dire dans l’é- corce, une quantité variable de suc propre , plus ou moins aromatique , plus ou moins résineux 3 conséquemment dans l’état naturel des choses , l’extrait des herbes d’Ombellifêres doit être nar- cotique , comme on le voit dans le Conium ma - culatum^ le Cicuta virosa } Y Ælhus a cynaphnn , etc. , tandis qu’au contraire les sucs propres ex- il ( Ife) traits de l’écorce, soit par une incision , soit par des préparations pharmaceutiques , seront to- niques , stimulans ou aromatiques , comme on le voit pour le Galbamim , l’ Opopanax ^ la Liyêche , Y Ass a fœtida , etc. De plus , si l'on emploie à-la-f bis l’écorce et le tronc , c’est-à-dire la sève et le suc propre réunis , les propriétés de ce mélange varieront selon les proportions de l’un et de l’autre principes. Enfin , si nous employons les graines , comme nous n’y trouvons point de sève , du moins à leur maturité , mais une quantité notable d’huile volatile logée dans leur tunique extérieure , nous devons nous attendre à ce qu’aucune ne sera dangereuse , et que toutes seront aroma- tiques , stimulantes et toniques j et , en efïèt , ees propriétés sont communes aux graines de toutes les Ombellilères dans tous les pays. Allons plus loin , et nous verrons que l’hy- pothèse que j’ai présentée plus haut , explique jusqu’aux variations que le sol , l’âge , la cul- ture , apportent dans les propriétés des Ombel- Kf'ères. Ainsi nous savons, en général, que les plantes aquatiques contiennent, à proportion » gardée , une quantité plus considérable de sève que de suc propre, plus de mucilage et d’extrac- tif que d’huile et de résine ; ainsi nous ne se- rons point surpris de voir les Ombellilères d’au- ( ) tant plus narcotiques , qu’elles croissent plus clans l’eau $ d’autant plus chaudes et aromati- ques , qu’elles naissent dans un lieu plus sec ; de même nous concevrons comment celles qui sont étiolées contiendront une sève à peine élaborée , et pourront être ainsi assimilées aux racines $ tandis qu’au contraire celles qui seront exposées à une lumière vive contiendront plus de suc propre. D’après ces considérations , je crois que la famille des Ombellilères rentre dans les lois de l’analogie , telles du moins que je les conçois : c’est-à-dire, que chaque suc, que chaque or- gane conservent la même nature et les mêmes O propriétés dans chaque famille. Ajoutons que l'organe qui fournit le vrai caractère botanique de la famille , c’est-à-dire , la graine , est celui où la chimie et la médecine trouvent le moins d’anomalies. 63. ARALIACÉES. Araliœ . Juss. , gen. 217» Les Arallacées ne sont presque qu’une section des Ombellilères , et ont les mêmes propriétés , à l’exception de celles qui tiennent aux graines, parce que c’est en effet dans cet organe que résident les différences botaniques de ces deux familles. 11.. ( i«4 ) Leur écorce suinte une gomme-résine aro- matique , comme on le voit sur -tout dans P Aralia umbellifera . La racine de la plupart des Araliacées paraît douce , légèrement toni- que , et a le goût de celle du Panais dans les A . racemosa et A» nudicaulis . Le Ginseng , qui appartient à cette famille , s’en distingue par ses propriétés toniques , restaurantes et aphrodisiaques , mais il paraît qu’elles ont été fort exagérées ; et supposé même que les récits Chinois fussent véridiques , il faudrait déter- miner encore l’influence du mode de prépara- tion et du sol sur cette racine , avant de la re- garder comme une exception. 64. ÇAPRIFOLIACÉES. Caprifolia. Juss. , Ann. Mus. 12, p. 292. La famille des Caprifoliacées est composée de plusieurs grouppes tellement prononcés , qu’on pourrait , sans diffiulté , les regarder comme autant de familles distinctes , mais cependant réunies par certaines alliances. Nous ne devons donc pas nous étonner si nous trouvons dans cette famille des anomalies assez nombreuses de genre à genre, et nous pouvons regarder que l’analogie est suffisamment conservée , si les espèces d’un même genre offrent des vertus ( iG5 ) semblables. Depuis peu de temps on a divisé cette famille en deux autres qui ont fait dispa- raître la plupart des anomalies qu’on y obser- vait. On peut dire, en général , que les Capri- foliacées ont l’écorce astringente : celle du Lo- nicera corymbosa est employée à teindre en, noir par les habitans du Chili \ celles du Lin- naea et de plusieurs Cornouillers , donnent aussi des indices d’un principe astringent. L’écorce du Cornus Jlorida est en particulier remarquable par sa propriété astringente , et est, à ce titre , employée aux Etats-Unis , soit contre les fièvres intermittentes , soit même contre certaines épizooties des chevaux , qui paraissent tenir de la nature des fièvres mali- gnes. L’infusion des fleurs y est aussi employée avec quelque succès dans les coliques venteu- ses. L’écorce du Cornus sericea , y est encore substituée au quinquina , et lui est peu infé- rieure en activité , d’après le témoignage de Barton. Les sureaux se reconnaissent à leur odeur fétide , à leurs fleurs odorantes et sudorifiques , à leurs feuilles et à leur liber qui agissent comme émétiques ou comme purgatifs drasti- ques , propriété qu’on retrouve dans leurs grai- nes aussi bien que dans celles du Lierre et du Cheyrefe aille. Les Cornouillers portent un fruit ( 1 66 ) remarquable par la réunion d’un principe as- tringent et styptique , avec une huile fine assez abondante pour en être extraite sans trop de perte. Le Lierre , que les botanistes regardent comme intermédiaire entre les Caprifbliacées et les Araliacées , touche aux premières par les qualités délétères de son fruit ? et nous annonce le voisinage des secondes , par le suc gommo-résineux et aromatique ( 1 ) qui découle de son écorce. Le Triosteum perfolialum , qui tient le milieu entre les Caprifbliacées et les Rubiacées , est aussi intermédiaire par ses pro- priétés : sa racine est purgative comme celle de rièble $ mais , à plus forte dose, elle devient émétique comme celle de ripécacuanha \ on dit même que dans quelques circonstances elle agit comme diurétique. 65. LO R A NT HÉES. Lorantheœ. Rich. et Juss. , Ann. Mus. ia , p. agsr. Cette famille , nouvellement détachée des Caprifbliacées , s’en rapproche à plusieurs (i) D’après M. Pelletier, le suc du lierre contient» 0,7 de gomme, 0,23 de résine, 0,69^ de lignine et un atome d’acide malique. ( »«7 ) égards : l’écorce de presque tous les arbres et arbustes qui la composent est astringente. Celle du Rhizophora gymnorhizci , Lin. , sert dans les Indes pour la teinture en noir ; les médecins ont souvent parlé de la propriété astringente du Guy de Chêne , qui peut-être n’est que le Lo- ranthus (1). On peut , au reste, distinguer dans cette famille deux grouppes parfaitement distincts. Dans les Lorant liées proprement dites , les baies renferment une matière glutineuse qui qui n’est soluble ni à l’eau , ni à l’alcool, et qui est analogue à la Glu ou à quelques égards au Caoutchouc 5 ces baies sont insipides et 11e ser- (1) J’ai parcouru toute la France et la plupart des pays voisins : j’ai vu le Guy ( Viscum album ) , croître sur tou- tes sortes d’arbres , même sur des Sapins. Je ne ï’ai jamais vu sur aucune espèce de Chêne. J’ai , au contraire , trouvé aux environs de Parme , le Loranthus croissant sponta- nément sur toutes les espèces de Chéries indigènes 9 et il res- semble tellement au Guy , qu’il en a reçu le nom vulgaire, et qu’on peut facilement s’y méprendre. Si le Guy avait existé sur le Chêne du temps des Druïdes , On le trouve- rait encore. Mais si le Guy des Druides était le Loran - thus , on concevrait qu’il a pu être détruit dans les provin- ces où le culte Druidique était en vigueur, et qu’il n’existe plus que dans celle où on n’en a pas détruit la race 5 oü concevrait sa rareté toujours croissant^ , etc* ( i68 ) vent point d’aliment à l’homme. Dans les Rhi- zophoréesou Palétuviers, dont MM. de Lamarck et ïlob. Brown ont fait une famille distincte, on remarque que le bois et l’écorce exhalent sottvent une odeur un peu analogue à celle du soufre : leurs fruits se mangent dans divers pays , mais les Européens les trouvent en général de mauvais goût et de digestion dif- ficile. 66 . R U B IA CEE S. Hubiaceœ. Juss. , gen. 196. DG. Ann. Mus. 9, p. 216. La Garance , le Quinquina , l’Ipécaçuanha , le Café, plantes de première utilité pour l’hom- me , appartiennent à la famille des Rubiacées , et fixent d’abord notre attention sur les prin- cipales propriétés de trois organes très-divers , la racine , l’écorce et la graine. Voyons si les propriétés qui distinguent ces plantes précieuses sont isolées dans la nature. Quant aux racines , nous voyons toutes les espèces de Garances munies de racines rouges et susceptibles de donner cette même couleur, soit à l’eau dans laquelle on les fait macérer , soit aux étoffes sur lesquelles on fixe la couleur par des mordans. Cette même propriété se re- trouve dans la plupart des Rubiacées indigènes ( 169 ) qui appartiennent à la même section que la Garance 5 telles sont les Asperula arvensis , A . tinctoria , les Gallium mollùgo 9 G . sylvati- cum 3 G . aparine , G . verum ; les Indiens de Masulipatan se servent de la racine de l’ Olden- landia umbellata pour teindre le coton en cou- leur nankin $ ceux du Malabar emploient pour teindre leurs calicots une espèce de Garance qu'ils nomment Manjith ; et parmi les Rubia^ cées qui , par leurs feuilles non verticillées , leur fruit polysperme et leur tige ligneuse , s’é- loignent de celles de nos climats , nous en trou- vons encore plusieurs qui participent à la même propriété ; ainsi , les racines du Morinda um- bellata aux Moluques , et du Morinda citrifo - lia dans l’Inde , servent à la teinture en rouge et en brun $ X Hydrophylax maritima 3 le Patabea coccinea y dont les voyageurs ont remarqué la teinte rouge , pourraient sans doute offrir la même utilité ; M. du Petit-Thouars vient de la trouver dans le JDandis de Commerson. Les éminentes propriétés du Quinquina ne se trouvent pas abondamment répandues parmi les écorces des Rubiacées ; on sait cependant que toutes les espèces du vrai genre Cincho - na (1) participent , avec de légères modifica- (1) Voyez po^r Pénumëration méthodique des espèces C i 7° ) tions , à ses propriétés toniques , astringentes et fébrifuges. On sait, cfaprès le témoignage de Michaux, que le Pinkneia , genre voisin du Cinchona , est aussi employé comme fébrifuge dans le Sud de l’Amérique septentrionale. Les auteurs de la Flore du Pérou nous apprennent qu’on mêle avec les vrais Quinquinas , l’écorce du Macro cnemum corynbosum qui s’en rap- proche par l’apparence extérieure et par la sa- veur amère \ mais cette saveur a quelque chose de visqueux , et sa couleur est blanche à l’in- térieur , caractères qui servent à reconnaître la fraude. On retrouve l’amertume du Quinquina dans le Guettarda coccinea , et sur-tout dans le Rortlandia grandiflova . Ses propriétés astrin- gentes ont été remarquées dans l’écorce et les racines de V Antlrrhe a , dont les liabitans de l’Ile-de-Bourbon se servent pour arrêter les hé- morragies ; dans le Morinda rogoc qui sert à faire de l’encre , et enfin jusque dans les Gal- lium , les Asperula et les Rubia , quoique ces plantes herbacées soient assez éloignées dp Gin- chona dans la famille des Rubiacées. Ces pro- priétés astringentes se retrouvent sur-tout et à de Cincliona et des genres voisins , le mémoire insère par H* Virey, dans le Bulletin de Pharmacie, novemb. t&ra, |L 481. ( U 1 ) un degré très-intense dans le suc ou les sucs im- proprement connus sous le nom de Gommé kino y et qui sont produits par le Nauclea gamheer , de Hunier* ou l’ U ne aria gambe er , de Rnxburgh y si tant est que ces deux plantes soient différentes. Les analyses très-mufti pliées que divers Chi- mistes du premier ordre ont faites des Quin- quinas , nous ont fait connaître assez! bien leur composition * et les propriétés des matériaux dont ils sont formés : nous savons mainte- nant (i ) qu’outre le squelette ligneux * les Quin- quinas renferment un principe muqueux , insi- pide et une certaine quantité de tannin * ma- tières qui se retrouvent dans un grand nombre d’autres plantes * mais ils renferment en outré trois principes qui leur sont particuliers : 1 ,° Y a- cide cinchonique, observé d’abord par M. Grin- dal * puis étudié avec soin par M. Vauquelin; cet acide s’y trouve en combinaison avec la chaux : il est très-remarquable par l’intensité de $on acide , sa cristallisation particulière et la solubilité des sels qu’il forme avec les alhalis * les terres et les oxides des métaux blancs y 2,^ (1) Voyez Y analyse des Quinquinas par M. Vauqnelin * Ann. Cïiinï. , août 1806 , p. 1 13 f et eelle de M. Reuss. ? Joürn. Pliarm. ? novemb. i 8 i 5 ? p. 488. ( * 7 * ) le principe amer du Quinquina ou, comme le nomme M. Reuss, Y amer cinchonique ne res- semble à la matière amère des autres plantes que par sa saveur , mais il s’en distingue par sa solubilité dans l’eau et dans l’alcool , par la couleur verte qu’il donne aux sels ferrugineux , et par le précipité qu’il dépose avec la noix de Galle 5 3.° la matière colorante du Quinquina, ou ce que M. Reuss nomme le rouge cincho - nique se caractérise par son insipidité , sa cou- leur rouge , sa grande solubilité dans l’alcool , son peu de solubilité dans l’eau , son altérabi- lité par l’oxigène , son affinité avec le principe amer du Quinquina et les précipités qu’il forme avec les sels métalliques : c’est dans l’amer et le rouge cincbonique , et sur-tout dans la réu- nion de ces deux principes qui forme ce qu’on nomme improprement résine de Quinquina que résident essentiellement les propriétés actives et spéciales de ce médicament $ on conçoit main- tenant pourquoi les tentatives faites pour le remplacer avec des végétaux appartenant à d’autres familles ont eu si peu de succès ; ce serait maintenant un beau et utile sujet de re- cherches chimiques , que d’analyser les écorces d’un grand nombre de Rubiacées pour savoir si on ne pourrait point retrouver chez quel- ques espèces faciles à cultiver les principes par- ( 173 ) ticuliers à quelques genres de cette famille. Déjà on a trouvé dans le Café un principe qui, comme l’amer du Quinquina , précipite très- abondamment le sulfate de fer vert et rouge en vert foncé , et se dissout également dans l’eau et dans l’alcool , mais qui ne précipite pas la Noix de Galle \ observons que ce n’est pas dans les fruits , mais dans les écorces de Ru- biacées qu’on doit rechercher les principes ana- logues à ceux des Quinquinas. On sait que quelquefois le Quinquina pi- ton (1) excite le vomissement ; on sait encore que Tlpécacuanha jouit de propriétés astrin- gentes 5 cette double ressemblance ne tend-elle pas à rapprocher les vertus des Quinquinas et des Ipécacuanhas . Mais les propriétés émétiques de ces derniers se retrouvent dans plusieurs plantes de la même famille 5 ainsi , on sait que le Vsychotria emetica , au Pérou ? et le Cal - licocca ipecacuanha au Brésil , fournissent l’un (1) C. floribunda , Sw. — - C. montana , Bad. — Ces espèces, long-temps confondues avec les vrais Cmchona , en ont été , avec raison , séparées par MM. Humboldt et Bonpland , qui en ont fait un genre particulier sous le 110m «B Exostemma , à cause de ses étamines saillantes. Il est remarquable que tous les vrais Cinchona sont éminem- ment fébrifuges , et les Exostemma souvent émétiques. ( *74 ) et l’autre les racines que le commerce nous transmet ; il paraît encore , d’après le témoi- gnage de Dandrada , que le Psyçotria herha - cea jouit des mêmes propriétés. Quant aux graines de Rubiacées , on peut soupçonner qu’elles participent plus ou moins aux propriétés du Cale qui sont trop connues pour que je les rappelle ici. Cette opinion est fondée sur ce que les propriétés de la graine du Cafeyer résident dans le périsperme corné qui en fait la majeure partie, et qui se retrouve de même dans les graines de la plupart des Rubia- cées ; sur ce que la saveur et l’arome du Café ne se développent bien que par la torréfaction qu’on n’a encore tentée que sur un petit nom- bre de graines; sur ce qu’enfin les semences du Gratter on ( Gaïium aparine ) ont, comme je l’ai dit plus haut , offert une saveur analogue ; celles du Psychotria herbacea torréfiées sont employées par les nègres de la Jamaïque en guise de Café , et puisqu’on retrouve quelque analogie entre deux plantes qui sont placées aux deux extrémités de la famille , il est bien probable que les intermédiaires suivent la même loi. Mais on ne doit point chercher à l’étendre aux Rubiacées à périsperme charnu , telles que les genres voisins du Cinchona et du Guet- ta nia j car la saveur du Café résidant dans le C *7 5 ) périsperme ? il est conforme aux principes que nous avons admis , que la nature du périsperme étant changée , entraîne un changement dans les propriétés dé cet organe. 6 7 . OPERCÜLAIRES. Operculariœ. Juss. , Ann. Mus. 4 } p. 4*8- Le petit grouppe des Operculaires est inter-* médiaire entre les Rubiacées et les Valérianées ; ses propriétés sont encore inconnues : M. de Jussieu a observé que les oiseaux dévorent avi- dement les jeunes pousses des Operculaires comme celles des Mâches 5 il se sert de cette observation pour confirmer le rapport que ces plantes ont avec les Valérianées plutôt qu’avec les Rubiacées. Je cité cette observation parce que le soin qu’un botaniste d’un ordre aussi élevé a mis à le relater ? prouve qu’on peut ? dans plusieurs cas , tirer des conséquences de l’étude des propriétés pour celle même de la classification . 63. VALÉRIANÉES. F'alerianeœ. DG. Fl. Fr. 4 ? P» 4*6* J uss * Ann. , Mus. 10 , p. 3o8 . — Dipsacearum gen. Juss., gen. ? p. ig3. Les Valérianées se séparent des Dipsacées non- ( I7«) seulement parce que leurs fleurs sont distinctes j que leur port est fort différent, mais encore parce que leur ovaire est constamment adhérent au calice, que ce calice est simple et non pas double , que leur fruit contient souvent plus d’une graine , et que cette graine est toujours dépourvue de périsperme. Elles s’en distinguent par des propriétés médicales bien prononcées ; les racines des V* ofjicinalis , V, phu , V cel- tica y et probablement .de toutes les Valérianées vivaces , sont amères , toniques , aromatiques , anti - spasmodiques et vermifuges ; on les a même conseillées quelquefois comme fébrifuges ; leur saveur aromatique paraît tenir à une petite quantité d’huile volatile que l’analyse y a re- connue , leur saveur âcre à de la résine , et leur arrière goût sucré à un extrait mucilagineux. L’odeur des racines des Valérianées vivaces nous paraît en général fort désagréable \ cependant, les Orientaux font ramasser avec soin sur les montagnes d’Autriche les racines du V aîeriatia celticcLy ou Nard celtique des anciens , dont ils se servent pour aromatiser leurs bains , et les Indiens estiment beaucoup le parfum de la V z- leriana jatajnansi qui étaient déjà célèbre du temps des anciens sous le nom de Nard indi- que y et qu’on emploie dans l’Inde contre l’hys- térie et l’épilepsie , précisément comme nous ( *77 ) faisons de notre Valériane. Leurs feuilles n’ont qu’une légère amertume ; aussi nous servent- elles d’aliment dans leur jeunesse , comme les Mâches cultivées dans nos potagers, et la Va- lériane rouge qu’on mange en Sicile. 69. DIPSACÉES. Dipsacearum gen.Juss, gen. 19/^ excl. , §. 2. Les Dipsacées proprement dites âont de peu d’utilité et paraissent légèrement amères et to- niques, quelques Scabieuses ont été employées comme diaphorétiques et comme anti-siphyliti- ques p mais elles sont maintenant presque hors d’usage , sur-tout sous le dernier rapport. 70. COMPOSÉES. Compositœ. Adans., fam. 2 , p. io 3 . DC. Fl. Fr. 4, p. 1. Les Composées forment l’une des familles les plus nombreuses du règne végétal $ considérées dans leur ensemble , elles offrent deux proprié- tés communes à presque toutes les espèces , savoir , l’amertume des tiges et la nature liuileuse des graines ; mais pour étudier ces faits avec plus d’utilité, il convient de pas- ( 178 ) ser successivement en revue les trois principales tribus; je ne dis rien de celle des Labiatiflores, vu que ces plantes étant toutes exotiques et à peine décrites par les botanistes , nous sont tout-à-fait inconnues quant à leurs propriétés. §. I. Corimbifères. Juss. I Dans les Corimbifères, nous trouvons cette amertume que j’ai dit tout-à-l’heure commune à toutes les Composées , mais elle y prend un caractère particulier; elle s’y trouve combinée à un principe résineux qui en exalte d'ordi- naire les propriétés. Les anomalies , en appa- rence , nombreuses de cette famille , s’ex- pliquent , les unes par la proportion diverse de résine mêlée à leur mucilage , les autres par l’état plus ou moins complet de cette résine. Citons rapidement quelques exemples de ces deux causes de variations. Que la résine se trouve en faible quantité et mélangée à un mucilage ainer ou astringent : alors nous re- trouvons les propriétés toniques , stomachiques et fébrifuges des Cynarocéphales , comme dans le Tussilago farfara , la Camomille , i’Inule , la Verge d’or, la Matri caria part/ienium , le S le via febrifuga du Mexique , Y Eupatorium perfoliatum employé comme tonique et febri» ( m ) fuge aux Etats-Unis , etc. ; que cette quantité de résine augmente , et nous trouverons une augmentation clans les propriétés stimulantes de ces plantes. Les unes serviront d’anthel* min tiques, comme les Armoises , les Tanaisies , les Santolines; d’autres joueront le rôle d’em- ménagogues , comme les Matricaires , les Achillières et ces mêmes Armoises. Quelques- unes seront sudorifiques , comme les Eupa - torium , les Achille a , les Artemisia 9 les C el- le ndu la ; d’autres diurétiques , comme les Lia - tris : quelques-unes à volonté sudorifiques ou diurétiques , comme Y Eriger on philadelphE cujji ; on en trouvera de sternutatoires , comme la Vtarmica y Y Arnica y et d’autres qui , appli- quées sur les gencives exciteront fortement la salivation , comme les Spilanthus , le Siges - beckia orientalis , Y Anthémis pyrethrum , le Coreopsis bidens , le Bidens tripartita ; que ce même principe résineux , au lieu d’être complètement solidifié, reste à l’état d’iiuile volatile : alors nous aurons des plantes qui, à-la -fois amères et aromatiques , deviendront toniques et anti-spasmodiques , comme les Achillières , les Camomilles , les Armoises , les Tanaisies, les Eupatoires , etc. Toutes les plantes qui sont amères , toniques , excitantes, ou violemment sudorifiques , ont été célébrées ( 180 ) dans divers pays pour leur utilité contre les morsures des serpens ; un grand nombre de Coriinbiiêres présentent toutes ces propriétés réunies et sont citées au nombre des meilleurs alexitères : je n’en citerai que deux exemples très-célèbres , cet Eupaiorium du Brésil , connu sous le nom de Aycipana , et le fameux Guaco ou Huaco du Pérou , qui paraît être P Eupatorium satureiaefolium de Lamarck . Peut - on , dans toutes ces propriétés diverses , dont plusieurs sont réunies dans les mêmes plantes , ne pas reconnaître les modifications du prin- cipe résineux uni à un principe extractif plus ou moins amer ? Ce mélange se retrouve dans toutes les parties des Corimbifères usuelles , et n’est sans doute que plus affaibli dans les espèces inusitées où il semble manquer entière- ment. Qu’il me soit permis de citer ici un fait qui, quoique peu important en lui-même, tend à montrer jusque dans quels détails on peut , en. certains cas , retrouver cette analogie de propriétés dans des plantes analogues : tout le inonde connaît la saveur agréable que l’Es- tragon ( Aïiemisia dracuncuLus ) communique au vinaigre , mais on ne sait pas aussi généra- lement que dans les Alpes on fabrique du •vinaigre tout - à - fait semblable à celui d’Es- tragon avec les ciifï'érens Genipi, qui sont les ( 181 ) Achillôa nana , Ariemisia glacialis , Art. rupestris et Art. spicata ? toutes plantes ana- logues qu’on emploie indifféremment l’une pour l’autre. Les propriétés amères , aromatiques et un peu astringentes des Corimbifêres font que plusieurs d’entr’elles ont été proposées comme succedannées du Thé : telles sont certaines espèces d ' A chilien , de Bellis , d ’ Ariemisia et notamment 1 * Ariemisia abrotanum. D’après M. Braconnât , l’Armoise doit son amertume à une matière animalisée extrême- ment amère qui forme les de son poids ; cette plante renferme en outre de l’huile vola- tile et un acide qu’il croit nouveau et qui s’y trouve combiné avec la potasse : il sera utile de voir ? par des analyses comparées , si ces matériaux se retrouvent dans d’autres Corirabi- lères. Les graines des Corimbifères sont toutes plus ou moins huileuses 3 et plusieurs ? parmi les Armoises et les Tanaisies, sont regardées comme aiithehnintiques $ mais la difficulté qu’on trouve souvent à les dégager de leur enveloppe commune ? fait qu’on les emploie ordinairement mélangées avec les folioles cle l’involucre ? les réceptacles et les sommités des plantes qui contiennent de l’huile volatile r en ( î 82 ) sorte qu’il est difficile de déterminer exacte- ment les propriétés de l’huile fixe contenue dan| les graines. Cette huile est même en cer- tains cas tellement abondante , qu’on l’extrait avec profit du Madia saliva nommé Æadi au Chili, et du Verbesina' saliva qui, dans l’Inde, est connue sous le nom de Huts’ ella : nous pourrions aussi tirer parti cle celle de YHe- lianthus . Le genre Heliatiihus nous présente une légère anomalie par la nature douce, nutritive et muciiagineuse des tubercules que porte la racine de Y Helianthus luberosus . Mais je renvoie , pour la solution de cette difficulté, aux observations que j’ai faites sur ce sujet dans la première partie de cette disser- tation. §. II. Cinarocêphales. Juss. Les Cinarocêphales forment un grouppe plus distinct par le port que par les caractères , et lié de très-près avec la tribu précédente et avec la suivante. Elles possèdent en général, dans leur tige et dans leurs feuilles , une amer- tume souvent très-forte, et qui paraît tenir à un principe extractif uni avec la gomme qui , dans quelques-unes , telles que les Atractilis , est en grande abondance. Cette amertume les a fait employer quelquefois comme stoma- ( i83 ) chiques, tel est le Chardon béni \ ailleurs comme légèrement fébrifuges , tels sont Je Chardon-Marie, la Chausse- trape , le Binet, l’Artichaut ; quelquefois enfin ce principe tonique à un plus faible degré , agit connue: sudorifique ou diaphorétiqueq on le voit dans le Chardon béni , la Bardane , etc. Ici , comme dans les familles précédentes , nous employons à notre nourriture cette amer- tume, avant qu’elle soit bien développée, et lorsqu’elle est encore délayée pour ainsi dire dans un mucilage insipide. C’est ainsi qu’on mange en divers pays les jeunes feuilles des Chardon s -Maries , des Carthames , des Chausse- trapes y et c’est probablement par la même raison que les réceptacles de plusieurs Cinaro- eéphales se trouvent bons à manger avant l’épanouissement des fleurs , comme nous le voyons tous les jours dans l’Artichaut ; et comme on le retrouve dans l’Onopordon, les Carlines (1) , le Carduus eriopkorus et proba- blement dans toutes les Çinarocéphales peu li- gneuses. (1) Le réceptacle du Carlin a açanthifolia , qui est très- gros et très-charnu, est d’un usage habituel dans les Pyrénées , les Cevennes et les Alpes méridio nales , où cette belle espèce est assez commune. ( iS4 ) On se sert en Espagne de la fleur de VEchi- nops strigosus pour en préparer une espèce d’amadou. Les corolles de l’Articliaut , du Cardon , et de la plupart des Chardons , ont la propriété particulière de faire cailler le lait , et sont sous ce rapport , employées en guise de présure , dans diverses provinces de France. Les graines de toutes les plantes de cette tribu sont huileuses et d’une saveur légèrement amère : leurs propriétés , éprouvées dans un petit nombre ? offrent quelques différences ; les unes sont purgatives comme dans le Car- thame , d’autres diaphorétiques comme dans le Chardon béni $ quelques-unes réunissent ces vertus comme celles de Bardane qui passent pour diurétiques diaphorétiques et un peu purgatives. §. III. Labiatiflores . DG. et Lag. Proprités inconnues. « §. IV. Chicoracées. Juss. Les Chicoracées sont un peu plus douces que les Campanulacées ? mais leur ressemblent absolument par les caractères médicaux et chimiques. Cette ressemblance pourra être re- gardée comme une exception à la loi de l’ana- ( *85 ) logie par les botanistes systématiques; mais ceux qui marchent dans la science , guidés par les lumières de l’anatomie et des rapports natu- rels , ne voient dans ces plantes que des grouppes très-rapprocliés. Les Campanulacées leur offrent des fleurs aggrégées dans le Jasione , des corolles fendues longitudinalement dans le Goodenia , des anthères réunies dans le Lo- be lia et le Jasione . Que ces trois caractères se trouvent uu jour réunis sur la meme plante , et il n’existera d’autre différence entre ces familles , sinon que dans la première le fruit sera polysperme , et dans la seconde monos- perme. Le Brunonia , décrit récemment par M. Smith, semble tenir tout- à-fait le milieu entré les Chicoracées et les Campanulacées. Le suc des Chicoracées est ordinairement laiteux , amer , un peu astringent et narco- tique. Ces propriétés se trouvent dans presque toutes les espèces sauvages , à un degré plus ou moins prononcé : on les remarque sur-tout réunies dans les Lactuca sylvesüls et virosa (i) ; (1) L’emploi de l’extrait de Lactuca virosa à la place de l’Opium, devient chaque jour plus général, et mérite d’être recommandé aux praticiens} cet extrait remplace bien. l’Opium comme narcotique j et ne cause presque ja- ( i86 ) mais le principe astringent domine presque seul dans les Cliicoracées non -laiteuses , telles que la Moselle ; l’amertume dans les Cliicoracées laiteuses 5 telles que la Dent-de-Lion, la Chi- corée ÿ et si les Lac tue a syîvestrîs et virosa , L. , ont des propriétés délétères , elles les doi- vent probablement au mélange de ces deux principes : on peut en effet rendre le suc de la Laitue vénéneuse aussi anodin que celui de la Laitue cultivée , en le traitant avec l’al- bumine des œufs ^ c’est-à-dire, en lui enlevant son tannin. Mais nous avons déjà vu souvent qu’un faible degré d’astringence ou d’amertume , mélangé avec le mucilage , forme un composé qui , sans être dangereux , est agréable à notre palais , et qui quelquefois même a d’utiles propriétés médicales. Nos efforts se sont donc dirigés vers ce but , et nous avons saisi les moyens d’utiliser les Cliicoracées , avant que leur suc propre fut entièrement formé : ainsi , presque toutes servent d’alimens dans leur jeunesse , c’est-à-dire , à l’époque où le muci- lage est le plus abondant} telles sont les jeunes pousses de Tragopogou , les jeunes feuilles de niais les accidens déterminés 7 dans certains individus , par l’usage de l’Opium pris même à petite dose e ( 187 ) Taraxacum , de Lai trou , de Laitue , etc. : ailleurs nous cherchons à prolonger cette jeu» liesse par la privation de la lumière , et nous étiolons , pour les rendre propres à notre nour- riture , les Laitues , les Chicorées , etc. Enfin nous nous servons, dans le même but, des parties de la plante qui sont naturellement étiolées , telle que la racine \ c’est ainsi que nous tirons un usage précieux des racines des Salsifis , des Scorsonères , de la Chicorée , de la Dent-de-Lion , du Vzcrzs echioïdes , etc. C’est ainsi qu’on mange dans le Midi de la France , les racines et les feuilles naissantes du Scolymus liispaziiczis > qui y est connu sous le nom de Cardouilles . Seroit-ce enfin à cette mêriie privation de la lumière que les graines de toutes les Chicoracées devraient leurs qua- lités froides anodines, comme on le voit dans les Chicoracées , les Laitues , etc. P 71. C A M P A N U L A C É E S. Campanulaceæ . Juss., Ann. Mus. 5,p. 4 26, 18, p. 1. Les Campanulacées renferment en général un suc propre laiteux comme dans les Chicora- cées , mais plus doux, moins amer et tendant plutôt à l’âcre té lorsqu’il n’est pas insipide , les- racines et les jeunes pousses de plusieurs ( i88 ) Campanules , telles que les G . rapunculus , trac hélium 9 celles du Lhyteuma spicata , etc. r servent d’alimens en Europe y les habitans des Canaries emploient au même usage le Ganarina i O campanula > et je ne cloute point qu’on ne pût employer de même plusieurs autres espèces de cette famille. 72. LOBELIACÉES. Lobeliaceæ. Juss. ? Ann. Mus. 18 , p. 1. Les Lobeliacées comprennent trois grouppes assez distincts , savoir > les Lobéliacées propre- ment dites ? les Gouclenoviées et les Stylidées ; mais ces grouppes doivent plutôt être considé- rés comme des sections de la famille des Cam- panulacées que comme des ordres réellement distincts. On ne connaît presque rien sur les propriétés des Gouclenoviées et des Stylidées ; ce qu’on, connaît des Lobelia annonce quel- ques rapports avec les Campanulacées ( aux- quelles M. Rob. Brown les réunit ) , mais une âcreté beaucoup plus grande : plusieurs d’entre elles ont un effet délétère sur l’économie ani- male : telles sont les Lobelia ureris , L, cir si- folia y L. longiflora ? et sur-tout le L. tupa , dont le suc appliqué à l’extérieur ? agit comme caustique ? et pris à l’intérieur excite des vo- ( i8 9 ) missemens , des douleurs d’entrailles et souvent la mort. Ce suc paraît d’une nature plus douce dans la racine du Lobelia syphilitica , qui, pris à dose légère , agit comme diaphorétique et à dose plus forte comme diurétique ou purgatif, enfin à plus grande encore comme émétique \ c’est probablement à la réunion des deux premiers moyens qu’est due son utilité contre les mala- dies syphilitiques ; des expériences faites depuis lors en Europe, ont retrouvé la même propriété parmi les Vhyteuma > qui appartiennent aux vraies Campanulacées. L’infusion du Liobelia injlata est employée aux Etats-Unis dans la leucorrhée \ la racine du Liobelia cardinalis sert de vermifuge aux sauvages de l’Amérique sep- tentrionale. 7 3. CUCURBITACÉES. Cucurbitaceœ. Juss. , gen. 3()3. La famille des Cucurbitacées paraît s’éloigner de la loi de l’uniformité par l’anomalie la plus bizarre ; les fruits de ces plantes sont en général formés d’une chair pulpeuse , aqueuse, douce ou légèrement acidulé , toujours rafraîchis- sante et ordinairement agréable au goût $ c’est çe qu’on voit dans la plupart des Courges , des ( *9° ) Concombres , des Momordiques et même dans les Papayers , qui , sous d’autres rapports , s’é- loignent des Cucurbitacées ; mais au contraire îa Coloquinte , Y Elaterium et le Trichosanthes amara se distinguent par leur fruit amer, qui , pris à l’intérieur , agit comme un violent pur- gatif drastique , ou comme émétique ; obser- vons cependant que le Cucurhita lagenaria a la pulpe amère et purgative dans son état naturel, et que les Egyptiens la mangent cepen- dant après l’avoir fait cuire. Ajoutons que le Concombre , la Citrouille , le Melon sont laxa- tifs à forte dose ; remarquons que les proprié- tés purgatives des Coloquintes tiennent à un principe résin eux ; on adoucit beaucoup sa vio- lence en mélangeant ce suc avec de la gomme ; de sorte qu’on peut présumer que la diversité de ces fruits tient à une proportion diverse de résine et de mucilage aqueux; j’ai ouï dire à un homme de poids que l’on était parvenu à rendre le suc des Citrouilles purgatif en le pri- vant de son mucilage ; mais je n’ai pu retrou- ver de détails sur cet objet : il ne serait pas improbable que les sucs qu’on extrait du fruit de ces plantes eussent réellement une origine différente ; que les uns , par exemple , fussent formés par le sarcoearpe et d’autres par l’en- docarpe. ( * 9 » ) Les graines des Cucurbitacées ne participent point aux qualités de la pnlpf qui les entoure ; elles sont douces , calmantes , de nature hui- leuse , et susceptibles de prendre facilement la forme d’une émulsion : les quatre grandes Se- mences froides appartiennent à cette famille» Les feuilles des Cucurbitacées ont en général une saveur amère qui se retrouve dans les ra- cines , et qui leur donne sans doute la propriété de purgatif hydragogue observée dans les Bryones : ces mêmes racines de Bryones ren- ferment une fécule saine et assez abondante qui, séparée du principe amer, peut servir de nourriture à l’homme ; on assure même qu’il suffit pour cela de faire cuire à l’eau la racine de la Bryone d’Abyssinie. La plupart des ra- cines vivaces de Cucurbitacées sont remplies d’un suc amer et drastique , comme on le voit par l'exemple de toutes les espèces de Bryonia et du Momordica elaterium (i) $ parmi les pro- duits inédecinaux rapportés du Pérou par Leu- baz , on remarque une racine de Cucurbi- tacée d’une saveur très-amère , et qu’il dit utile (1) C’est à tort ’qu’on cite dans tous les livres cette plant© comme annuelle $ elle est décidément vivace dans son scd natal , et a même une très-forte racine. ( 1 9 2 ) contre les douleurs qui suivent les maladies vénériennes invétérées 5 les racines de Cucurbi- tacées annuelles sont presqu 'insipides. Je dois ajouter au reste que la famille des Cucurbi- tacées n'a que des rapports éloignés avec les familles dont elle est ici rapprochée , d'après l'opinion de Bernard de Jussieu, et dont elle paraît en effet s’éloigner moins que de toutes les autres. 74. GESSNERIÉES. Gessneriece . Rich. et Juss. ? Ann. Mus. 5 , p. 4 28 . Propriétés inconnues. 7 5 . VACCIN I É Ë S. Faccinieœ. DC. Théor. 216. Les Vacciniées qui diffèrent fort peu des Ericinées par leurs caractères botaniques , s’en rapprochent tout-à-fait aussi par leurs proprié- tés $ leur écorce et leurs feuilles sont astrin- gentes , un peu toniques et stimulantes : les fruits sont charnus , sains et mangeables 3 leur saveur est douceâtre ? comme on le voit , dans le Vaccmium myrdllus , qui est fort commun dans une grande partie de l’Europe , et qui se mange tantôt cru ; tantôt en forme de confl- it ( 193 ) ture ou cîe tourte ; quelquefois le suc des baies de Vaccinium est un peu acidulé , rafraîchis- sant et agréable au goût ; telles sont , par exem- ple , le Vaccinium oxycoccos > qu’on mange dans le Nord de l’Europe après l’avoir fait cuire avec du sucre ; telles sont encore celles du ]/ accinium macrocarpum , qui sert au même Usage dans la Canada, et dont sir Joseph Banks a introduit la culture en Angleterre. Les An- glais désignent sous le nom de Cran-Berry > non-seulement le Vaccinium oxycoccos , qui le portait primitivement, mais encore ce Vac- cinium macrocarpum dont on apporte les fruits du Canada en Angleterre pour l’usage de la cuisine. On reconnaît toujours dans la plupart des Airelles , un arrière-goût un peu styptique qui tient au calice , lequel est adhérent au péricarpe comme dans les Myrtinées» 76. ERI'CINÉES. Ericineæ. Desv. , Journ. Bot. iBïS, p > Rhodo* dendra et Ericæ . Juss. Cette famille , qui diffère à peine de la pré- cédente par sa structure , s’en rapproche aussi par des propriétés semblables ; les feuilles , et sur-tout les écorces des Ericiuées , sont astrim- ï3 ( M ) geiites comme, par exemple , Y Azalea procum- bens y les Rhododendron ferrugineum et chry- santhuiiL y le Ledum palustre y et quelques autres plantes qui appartiennent à la tribu des Rhodoracées $ telles sont encore parmi les Eri- cinées proprement/ dites , les Pyroles , l’ Andro- meda poüfolia y Y Arbutus ma ursi : il y a plus , les anciens ayaient-donné aux Bruyères le nom à’Erica y qui signifie briser , parce qu’ils attri- buaient à la Bruyère la vertu de dissoudre le calcul ; la même propriété a été , dans les temps modernes , attribuée à Y Uva-ursi y et même, quoique probablement à tort (1), au Vitis- idea ; on a depuis apprécié à leur juste valeur les prétendus Litliontriptiques , mais on ne peut nier que Y Uva-ursi n’ait été utile dans plusieurs cas , non pour dissoudre, mais pour expulser le gravier et sur-tout les calculs rei- naux : cet effet est attribué par plusieurs pra- (1) L’infusion de X* Uva-ursi précipite la gélatine et le sulfate de fer , et cette plante contient par conséquent du tannin et de l’acide gallique. L’infusion du Vitis idœa ne précipite ni la gélatine ni le sulfate de fer , d’après les observations de M. Braconnot , et ne renferme par consé- quent ni tannin ni acide gallique , au moins en quantité notable. Le Vitis idœa , substitué par erreur ou par fraude à l’ Uva-ursi , paraît avoir causé les contradictions des mé- decins sur l’emploi de çe dernier médicament. ( * 9 5 ) ticiens aux âstringens qui agissent ici comme diurétiques , toniques et stimulans. La discus- sion de cette question est hors de mon sujet $ il me suffit d’observer que la même propriété a été observée dans plusieurs plantes voisines ? et notamment dans lePyrola umbellataii). L’in- fusion des feuilles de VUva-ursi est aussi em- ployée avec succès, à titre d’astringent, dans les gonorrhées anciennes. Les feuilles astringentes des arbustes de cette famille ont été souvent proposées comme succédanées du Thé , telles sont celles du Gaultheria prociunbens , du Vaccinium oxycoccos > du Rhododendron chry-* santum > etc. Les baies de toutes les Ericinées à fruit char- nu , servent d’alimens dans différens pays : on leur attribue une saveur agréable $ ainsi , on se nourrit à Saint-Domingue du Brossaea cocci~ Tiea} en Laponie , de YArbutus cilpina ; dans (i) Le Pyrola umbellata est appelé par les Canadiens Herbe à pisser . Son usage a été introduit dans la médecine anglaise. On l’emploie sous forme d’extrait, en pilules, à la dose de cinq scrupules par jour 5 on donne aussil’extraifr dissous dans l’eau bouillante. Le docteur Somerville cite plusieurs cas remarquables de l’utilité de ce médicament dans les bydropisies. (Ann. Méd. 4* j P» 320.) LL* ( * 9 « ) l’Orient, des Arhutus andrachne et intêgnfolia ; aux terres Magellaniques , de V Arbutus mucro- nata ; dans la Nouvelle-Hollande , de plusieurs Styphelia , et notamment de celui auquel M. de la Bilîardière a donné le nom de Spyphelia Richei , parce que ses fruits ont été leseul ali- ment qui ait soutenu le naturaliste Riche égaré dans un désert ; en Europe , des Arbutus uva~ ursi et unedo . Ce dernier , pris en trop grande dose , devient, dit-on, narcotique. Cette même propriété semble se retrouver dans quelques autres espèces de la même famille ; mais cepen- dant, il faut l’avouer , d’une manière un peu obscure : on assure que le JLedum excite des maux de tête , et qu’employé dans la fabrica- tion de la bierre , comme on le fait quelquefois en fraude , il rend cette boisson narcotique $ on a souvent attribué la même propriété à divers Rosages, et sur-tout au Rhododendron chrysan - thum ; dirai-je enfin que les fleurs de \Azalea ponûca exsudent un nectar qui , pompé par les abeilles , rend leur miel vénéneux ? Xénophon rapporte que plusieurs soldats ayant mangé de ce miel près de Trébisonde , en éprouvèrent des effets pernicieux. On retrouve des indices de ces qualités délétères dans plusieurs espèces de la tribu des Rhodoracées ; ainsi , le Rhododen- dron maximum passe pour vénéneux aux Etats- ( 197 ) Unis ? comme le Rhododendron maximum en Asie ÿ le Kalmia latifolia pris en infusion , est aussi vénéneux ; la décoction d ’ Andromeda ma - riana et de Gaultheria procumbens agit comme narcotique. On emploie dans F Amérique septen- trionale l’infusion Ru. Rhododendron maximum contre les rhumatismes chroniques ? et en Asie celle dû Rhododendron ponticum contre la goutte et les rhumatismes. La poudre brune qui adhère aux pétioles des feuilles de presque toutes les espèces de Kalmia , d’ Andromeda et de Rhododendron , ainsi que celle qui entoure leurs graines , est populaire- ment employée aux Etats-Unis comme ster- nutatoire. 77. AQUIFOLIACÉES. Aqiiifoliaceœ . DG. Théor. 217. Les baies du Houx commun sont assez âcres 9 et ingérées dans l’estomac agissent comme pur- gatif ou comme émétique ÿ cette dernière action est plus prononcée dans 1 Alex vomitoria , qui est aussi un des plus forts diurétiques que l’on connaisse ÿ le liber ou l’écorce interne dix Houx sert en Europe à la fabrication de la glu y matière très-particulière et qui a pris place au nombre des matériaux immédiats des ( * 9 ») végétaux; il est très-probable que les espèces étrangères présenteraient, si on les soumettait aux mêmes opérations , cette matière si rare d'ailleurs dans le règne végétal ; l’extrême analogie du tissu de leur bois et de leur écorce semble l’indiquer. 78. M Y R S I N É E S. Myrsineœ. Brown., prod. 55 2 . — Ardisiaceœ. Juss., Ann. 1 5 , p. 35o. Propriétés inconnues. 79. S A POTÉE S. Sapotœ. Juss. , gen. i5i. Ces arbres ,*tous exotiques , sont encore peu connus , sur- tout relativement à leurs pro- priétés ; il paraît que leur plus grande utilité consiste dans leur fruit dont on mange la pulpe *. ainsi celle du Mimusops elengi y L. , de Ylm- bricaria malabarica y Lam. , du Sideroxylon spinosum > L. , du Chrysophyllurn cainito , L. , du C. jamaicense Jacq. , C. oliviforme y Lam. , C. macoucou y Aubl. , de YAchras connu à Guatimala sous le nom de Néflier , etc. , servent d’aliment à l’homme dans les pays où ces arbres croissent naturellement , et les voya« ( *99 ) geurs attribuent à presque tous une sayeur douce et un peu acidulé. Les graines de toutes les Sapotées sont hui- leuses j celles de Y A diras sapota sont regardées comme apéritiyes et diurétiques. L’huile que ces graines renferment est peu fluide et paraît de nature à se concréter facilement de manière à prendre la consistance du beurre : les grai- nes du Bassza buiyracea (1) sont employées sous ce rapport à la côte de Coromandel \ peut- être l’arbre de beurre , observé par Mongo- Park au Bam barra , appartient-il aussi à la fa- mille des Sapotées ? assez répandue sous les tropiques. Les écorces de quatre espèces d’Achras sont , au rapport de Brown , assez astringentes et fébrifuges pour être substituées au quinquina. Le suc de toutes les Sapotées est laiteux 5 ce lait paraît être d’une nature plus douce que celle des autres familles à suc laiteux 3 il paraît (1) Cet arbre est connu dans l’Inde sous les noms de 3V[ava , Aïahva ou NLadhucci > ses graines sont si nom- breuses et si huileuses qu’un arbre rapporte jusqu’à trois quintaux d’huile \ celle-ci sert habituellement à l’usage de la cuisine. Les Fleurs sèches du Mahva se mêlent aussi dans les alimens des Indiens , et les naturels de Chatra savent même en extraire une sorte d’eau-de-vie. ( Asiat. Iles. 1 } p. 3 oo et 309. ) ( 200 ) même que c’est à la famille des Sàpotées qu’ap- partient le fameux Arbre de la Vache > célèbre dans l’Amérique méridionale , et dont , au rap- port de M. de ïïumboldt , on extrait le lait pour servir à la nourriture des hommes, 80 . EB E N A C É E S. Ebenaceœ. Vent. , Juss. , Ann. Mus. 5 , p. 4*7» — ■ Gujacanœ . Juss. , gen. i55. Cette famille ne nous offre que deux organes qui aient quelqu’intérêt par leur emploi : les fruits et les bois. Quant aux premiers, on mange les baies de plusieurs Ebénacées dans divers pays, par exemple , Diospiros virginiana en Amérique septentrionale , JD» sapotanigra au Mexique, JD. kaki au Japon , JD. decandra en Cochinchine , JD. chloroxylon , Boxb. , à la côte de Coromandel. Ces fruits sont tous re- marquables par la saveur très-acerbe qu’ils ont avant leur maturité , et ne peuvent servir que lorsque , comme les Nèfles, ils ont été adoucis par cette espèce de décomposition particulière que certains fruits acquièrent à leur maturité et qui leur a fait donner, par le vulgaire, le nom de JJlets ou Bleches , nom qu’il faut bien admettre puisqu’il n’y en a pas d’autres (i) j (i) Il est assez. curieux que cet état particulier des fruits ( 201 ) les fruits charnus paraissent présenter des pro- priétés analogues , lors même qu’à cause de leur petitesse , on néglige d’en faire usage. L’é- corce des Ebénacées présente des indices de ce même principe astringent et tonique ; celîe du Diospyros virginiana est utilement em- ployée aux Etats-Unis contre les fièvres inter- mittentes. Le bois des Ebénacées est très-re- marquable par son extrême dureté qui a fait donner à plusieurs le nom d ' J rbre-de-Fer > et par la couleur noire qu’il acquiert souvent en vieillissant et qui est très-connue dans l’Ebène* Le grouppe des Simplocos , aujourd’hui réuni aux Ebenacées, mais qui sera sûrement un jour considéré comme une famille distincte , s’en écarte aussi par ses propriétés : les feuilles des arbustes de ce grouppe sont généralement astringentes comme on le voit dans 1 ' Alstonia blets ne se retrouve que dans ceux chez lesquels la sa- veur acerbe a été très-prononcée : ainsi, parmi les fruits susceptibles de devenir blets, se trouvent les fruits des Diospyros , les Nèfles, les Sorbes, les Poires 5 il semble que cet état soit dû à ftne modification du principe acerbe» Il est encore digne de remarque que le principe acerbe ne se trouve bien développé que dans les fruits composés de l’ovaire et ciu calice soudés ensemble : de sorte qu’on ne rencontre de fruits blets que dans les familles à ovaire adhérent, ( 202 ) l’un des succédanés du thé : les feuilles de cet Alstonia teignent la salive en verd jaunâtre ; le Hopea tinctoria sert dans l’Amérique sep- tentrionale pour la teinture en jaune $ ces végétaux sont au reste encore très-peu connus ? sur-tout quant à leurs propriétés. Quant aux.Aliboufiers {Styrax } , ils inté- ressent davantage la médecine , puisqu’ils nous fournissent le benjoin qu’on retire du Styrax benjoin de Dryander , et le Storax qui est pro- duit dans le Levant par le Styrax officinale . Ces deux baumes , qui sont composés de résine et d’acide bensoïque (1) , répandent une odeur suave , et sont employés dans les maladies du poumon ; ces propriétés fort différentes de celles des Ebénacées ? semblaient faire dans cette famille une exception bien prononcée ; mais on a reconnu , depuis la première édition de cet ouvrage , que les Styrax ne différaient pas moins des Ébénacées par leurs formes les plus essentielles que par leurs propriétés , et le seul doute qui existe encore à leur égard , est de savoir s’ils doivent former une famille particu- (1) Le benjoin, renferme en outre, d’après l’analyse de Bucholz, un principe aromatique particulier soluble dans l’eau et dans l’alcool. ( 203 ) Hère avec les Simplocos, comme le pense M. Ri- chard, ou être rejetés parmi les Méliacées, comme le veut M. de Jussieu. 81. TERNSTROMIÉES. Ternstromiœ, Mirb. Les propriétés de cette famille sont encore inconnues, et ses limites botaniques nesontpas encore bien déterminées $ je dirai seulement que loin d’appartenir aux Hespéridées, les genres qui la composent ont de grands rapports avec les Ebénacées et les Simplocées $ qu’outre les genres Ternstromia et Fresiera qu’on y rap- portait, on doit y joindre le Palava de la Flore du Pérou , le Saurauja. de Wiidefiow , et le Scapha de Noronha , qui probablement ne diffère pas du précédent. Dans un de ces arbres de Java, Noronha remarque que le fruit est acidulé , d’une saveur un peu analogue aux Tomates et qu’il sert d’aliment aux Javanais êous le nom de K oie ho. ( 2 °4 ) 82. O L E I N É E S. Oleineœ. Hoffm. et Linck. ? Flor. Port. Les Oleinées , considérées botaniquement, offrent entr’elles assez de différences pour que divers auteurs les aient séparées en deux fa- milles , et même après cette division , certains genre , tel que le Frêne , s’éloignent encore du grouppe dans lequel on les place , et se rapprochent par divers caractères des Erables avec lesquels la saveur sucrée de leur sève semble leur donner quelque analogie chimique : mais un examen plus aprofondi des organes de leur fructification , a engagé les botanistes à lai&er réunis en un seul grouppe les genres à fruit sec et à fruit charnu. Les différences botaniques existent dans le péricarpe qui nous présente aussi des usages fort divers $ ainsi l’Olivier porte , comme tout le monde sait, une drupe dont la chair est huileuse , et cette utile propriété existe dans toutes les espèces de ce genre $ il est à présu- mer que les fruits de Phillyrea , qui ressem- blent si parfaitement aux Olives ? renferment aussi une certaine quantité d’huile fixe, Pte- marquons que c’est ordinairement dans la ( ?o i> ) graine que l’huile se rencontre et que la famille des Oleinées semble être la seule ou l’huile fixe soit logée dans le péricarpe. Les fleurs des Oleinées offrent peu de diffé- rences botaniques , et nous retrouvons dans plusieurs d’entr’elles une odeur agréable; on se sert des fleurs de Y O lea fragrans pour aro- matiser le Thé. L’écorce et même les feuilles de la plupart des Oleinées , sont amères et astringentes ; la propriété astringente de l’Olivier est connue depuis long-temps ; dans ces dernières années ôn a même proposé de le substituer au quin- quina (î) ; mais l’écorce du Frêne réunit ces qualités à un degré tel , qu’elle a long- temps été employée comme fébrifuge avec succès. Le genre des Frênes , qui s’éloigne des autres Oleinées par le port et même par la fructifica- tion , s’en éloigne encore par la nature de son suc : on sait que les exsudations de l’écorce des Frênes produisent le purgatif doux et (1 ) Les propriétés des feuilles d’Olivier paraissent tenir , d’après l’analyse de M. Ferrât , ou a une matière rési- neuse qui fait à-peu-près la onzième partie de leur poids, ou à un extractif en partie oxigénable qui en fait plus de 5 il paraît que la teinture alcoolique serait la meil- leure forme sous laquelle on pourrait les utiliser. ( 206 ) utile connu sous le nom de Manne ; on la re- tire sur- tout du Fraxinus rotundifolia > Lam. , mais dans le Midi elle se retrouve, quoique en moindre quantité, dans les Fraxinus ornus , L. , F.excelsior, Lam., et F. parv i/o lia > Lam. Cette singulière substance mérite l’attention des chimistes ; peut-être l’analyse comparée des Mannes de Frêne , d’Alhagi , de Melèze , de Prunier , de Chêne , de Saule , nous donnerait- elle l’explication de la présence d’une matière semblable dans des végétaux si diverse La famille des Oleinées , même débarrassée des Jasmins qu'on y avait réunis , semble encore composée de végétaux peu analogues entr’eux 5 il est cependant assez remarquable que les arbres prennent tous de greffe les uns sur les autres , ce qui annonce l’analogie de leurs sucs et de leurs fibres $ ainsi les Lilas se greffent avec les Frênes , les Cliionanthus , le Fontanesia , et je suis même parvenu à faire vivre deux ans le Lilas de Perse greffé sur le FhylLirea latifolia ; FOlivier se greffé avec le Fhyllirea et je suis parvenu à le greffer sur le Frêne lui-mêiiîe $ on ne réussit point au contraire à greffer les Jas- mins sur les Oleinées , ce qui confirme la $épa~ ration de ces deux familles. ( 20 7 ) 83. J AS MINÉE S. Jasmineœ. Brown. 9 prod. 5 zo . — Jasminearum gen\ Juss. Les Jasininées proprement dites , long-temps réunies avec les Oleinées , n’en diffèrent pas beaucoup quant à leurs propriétés : leurs feuilles sont légèrement amères ? notamment dalis le Mogorium undulatum : leurs fleurs sont très-remarquables par leur odeur ; celle-ci tient à une huile aromatique qu’on en peut extraire et qui peut se fixer sous forme de par- fum 9 ainsi les Jasminum officinale et gran- diflonim donnent la vraie huile essentielle de Jasmin; \e Mogorium sambac fournit une huile tellement semblable à la précédente , qu’elle en. a souvent porté le nom ; le parfum du Nyc- tanthes arbor tristis > du Mogorium undula- tum 9 etc. , a frappé les voyageurs , et celui des Jasmins est connu de tout le monde. 84 . P E p A L I N É E S. Pedalineœ. Brown. ; prod. 619. Propriétés inconnues. ( aô8 ) 85 . STRYCHNÉES* Strychneæ . DC. , Théor. 217. La famille des Strychnées est mal connue quant à ses caractères botaniques, et à la cir- conscription des genres qui doivent la compo- ser ' y ses propriétés sur l’économie animale n’ont encore été étudiées que sur un petit nombre d’espèces ÿ mais elles sont si exaltées , qu’elles méritent une attention particulière. Toutes les parties de la plupart des Strychnées sont douées d’une amertume remarquable , et présentent aussi un principe âcre et délétère dont la na- ture paraît toute particulière , le principe amer est remarquable principalement dans la Noix vomique , la Fève de St. -Ignace, souvent em- ployées à titre d’amers dans la médecine euro- péenne , et même dans le Titan-cotte dont 011 se sert dans l’Inde pour purifier l’eau à laquelle elle donne un saveur légèrement amère j etc* Il se retrouve dans le bois , l’écorce , les feuilles «t même dans la pulpe du fruit avant sa matu- rité parfaite -, cette pulpe mûre devient man- geable , sur-tout lorsqu’elle est acide comme dans le Strie fin os nux vomie a ; mais elle laisse dans la bouche une saveur astringente qui in- dique le danger d’en faire trop d'usage. ( ) L’analyse de la Noix vomique , publiée par M. Braconnot, annonce une composition chi- mique assez singulière ; on trouve dans cette graine, entr'autres produits, Une matière cornée végétale fort abondante et d’une nature parti- culière , une matière animalisée peu sapide , une matière animalisée extraordinairement amère , et une huile verte butyriforme 3 il est probable que c’est à la matière amère que cette graine doit ses principales propriétés , et que cette matière se retrouvera à dose plus ou moins con- sidérable dans les autres Strychnées. L’analyse publiée par M. Desportes, quoiqu’un peu diffé- rente de celle de M. Braconnot , fait aussi men- tion de cette matière amère d’une nature par- ticulière. On assure que l’Arack distillé avec des fruits de Strychnos , devient vénéneux Le principe âcre et délétère des Strychnées se reconnaît non-seulement par les effets per- nicieux de toutes leurs parties prises par l’œso- phage en quantité trop considérable 3 mais il agit avec plus d’énergie et de rapidité encore , lorsqu’on l’introduit dans la circulation soit par une inoculation , soit en le mettant en con- tact avec quelque surface absorbante 3 il résulte des expériences très -curieuses faites à cet égard d’abord par M. Desportes et sur-tout ensuite par MM. Delile et Magendie, que le suc de ( 210 ) toutes les Strycimées amères une fois absorbé détermine un véritable tétanos , et que cet efïet extraordinaire a lieu d’autant plus vite , que le suc absorbé a pu arriver plus tôt à la moelle épi- nière. Ce singulier mode d’action a eu lieu éga- lement avec le suc du fameux Upas - Tieuté observé à Javapar M. Léchenault, avec la Noix vomique (1) et avec la Fève de St.- Ignace (2). Les Strychnos dans lesquels la saveur amère (1) On. a dit que la Noix vomique, qui est un poison terrible pour la plupart des animaux, même ingérée dans l’estomac , ne l’était pas pour les ruminans ; MM. Du- fresne et Dunal ont bien voulu à ma demande répéter cette expérience sur un mouton : iis ont commencé par lui don- ner une faible dose de noix vomique mêlée avec ses ali— mens , et bien loin d’en souffrir , l’animal semblait n’en avoir acquis que plus de force et d’appétit. Ils ont aug- menté graduellement la dose au point de lui en faire prendre jusqu’à 5 gros à-la-fois : l’animal a succombé, et sa, inoffe a offert les symptômes de tétanos propres aux empoison- nemens produits par les Strycbnées. (2) On emploie souvent pour fève de S. -Ignace des nié- dicamens entièrement différens. M. Dunal a observé qu’il n’est pas rare de trouver dans le commerce V Anacardiurn, officinale ( Gœrtn. ) , vendu à la place de la vraie fève de S. -Ignace. M. Morin© m’ayant communiqué le dessin de l’arbre qui produit au Mexique une graine fort semblable à la fève de S. -Ignace , et qu’on y vend sous le rnêm® même nom, j’ai reconnu que ce n’était point un Styclr- ( 211 ) tf est pas prononcée , n’offrent aucun indice de cette singulière et dangereuse propriété $ ainsi le Titan-Cotte et la Pomme de Vontac parais- sent tout -à- fait innocens 5 les expériences faites avec les Strychnos contribuent à prouver ( pour me servir des expressions de M. Delile) « que les plantes d’un même genre , pourvues » des mêmes sucs , ont aussi les mêmes pro- *> priétés , et que plusieurs espèces du même » genre étant privées de certains sucs , ne pos- *> séden t plus l’ensemble des mêmes propriétés, j» Au reste , de la connaissance acquise il y a peu de temps 9 de la manière d’agir de la Noix vo* inique 9 on sait qu’on a déduit une conséquence pratique très-remarquable ; c’est de l’employer dans les cas de paraplégie pour exciter faction de la moelle épinière et des nerfs qui sont sous sa dépendance. Le succès de cette méthode est un exemple remarquable de Y. heureux emploi qu’on peut faire en médecine , de l’analogie fondée sur les connaissances exactes de l’His- toire naturelle et de la Physiologie expéri- mentale. nos, mais un nouveau genre de la famille des Rubiacé@Sj auquel nous avons donné le nom de Phaloé . i4»- ( 312 ) 86. APOCINÉES. Apocineœ . Juss., gen. 143. Nous trouvons dans les Apocinées des pro- priétés nombreuses , et qui pourraient nous paraître très-diverses , si elles n'étaient souvent réunies dans les mêmes espèces : cette famille se rapproche , par ses vertus et par ses usages , des Convolvulacées , des Gentianées et des Ru- biacées , dont elle se rapproche par les formes extérieures. On peut dire en général des Apocinées qu'elles sont âcres, stimulantes et un peu astringentes. O 11 conçoit que ces propriétés , lorsqu’elles sont faibles , peuvent devenir utiles ; tandis que poussées à l’excès , elles doivent former des poisons dangereux $ dans plusieurs cas , ces plantes agissent sur les nerfs d'une manière qu’on a mal-à-propos assimilée à l’action des plantes narcotiques , mais qui serait mieux dé- signée sous le nom de stupéfiante , puisqu’elles arrêtent l’action motrice des nerfs sans causer le sommeil. Si nous descendons dans les détails, nous trouverons qu’en général leurs racines sont vi- vement âcres et stimulantes ; de sorte que plu- sieurs d’entr’elles sont employées comme émé- ( 213 ) tiques ; c’est ainsi que les racines du CynâncJmm vomitorium > Lam. , de Y Asclepias procera > Forsk. , du Cynanchum tomentosum , Lam. 7 du Periploca emetica , Fetz , de Y Asclepias curassavica > Lam., sont employées dans di- vers pays à la place de l’ipécacuanha , comme j’ai eu occasion de le développer en détail dans mon Mémoire sur les diverses espèces d’ipéca- cuanha , imprimé par extrait parmi ceux de la Société médicale d’érnulation (vol. 1 , p. 2,38). Les émétiques agissent souvent comme diapho- rétiques ou sudorifiques ; ainsi l’infusion de la racine de Y Asclepias decumbens a la singulière propriété d’exciter la perspiration générale , en augmentant très-peu la chaleur du corps ; c’est sous ce point de vue qu’on l’emploie en Vir- ginie contre la pleurésie avec un succès assez constant. La racine de Y Ophioxylon , au lieu d’agir comme émétique , est purgative : cette racine est fort amère ; elle passe parmi lès In- diens pour tonique , fébrifuge , et pour l’anti- dote des morsures de serpens. La propriété purgative de cette Apocinée se retrouve dans les racines de Y Asclepias de- cumbens > vantée en Virginie contre la dysen- terie; dans celles de Y Asclepias tuberosa ; dans l’écorce du Cerbera mangkas , Lam. ; les autres écorces d’Apocinées , ou du moins plusieurs d’entr’elles , sont employées comme astringentes et fébrifuges : telle est sur-tout celle du Nerium antidysentericum > et de VEchites antidysen- terica 9 employés l’un et l’autre dans l’Inde contre la dysenterie : les feuilles de Pervenche sont assez astringentes pour avoir été employées à tanner les cuirs ; on les emploie aussi pour arrêter certaines hémorragies. Les feuilles du Laurier-rose ( Nerium oleander ) renferment une quantité notable d’acide gallique qui paraît y être à l’état libre. Le suc des Apocinées est laiteux ^ âcre, plus ou moins caustique et amer $ l’âcreté de quel- ques espèces est assez considérable pour les faire placer au rang des poisons ytel est l ’ Ycotli du Mexique qui appartient au genre Gerbera . Il est très-probable qu’on peut tirer du Caout- chouc du suc de la plupart des Apocinées , comme le font présumer quelques essais incom- plets faits sur Y Asclepias cyriaca (1) , et sur* tout l'exemple du Vahea de Madagascar et de Y Urceo la elastica de Roxburg. Mais , par une exception hisarre , nous trouvons ici Y Asclepias lactifera > dont le lait est , dit- on , très-doux et si abondant , que les Indien s l’emploient comme (i) M. John y trouve sur ïoo parties d’un© substance élastique. ( 2l5 ) aliment ; avouons cependant que l’histoire de cette plante est encore mal connue $ peut-être ce lait est-il employé seulement dans la jeunesse de la plante , et alors l’activité du suc des Apo- cinées est peu ou point développée \ ainsi les jeunes pousses de plusieurs plantes de cette famille servent d’aliment à l’homme dans di- vers pays : je citerai pour exemples Pergularia. edulis , Wild. , Periploca esculenla , Apo- cynum indicum y Asclepias asthmatica , L. , (qui est la même plante que le Cynanthum vomitorium , Lam.) , Asclepias aphytla , Lam. , Asclepias stipitacea, Forsk , etc. Les fruits des vraies Apocinées sont peu em- ployés y mais on se sert utilement des fruits des Apocinées munies de haies , telles que les Cerbera , qui paraissent agir comme vo- mitifs. Malgré les légères Anomalies que nous avons observées, la famille des Apocinées paraît of- frir une uniformité de principes et de vertus proportionnée à celle de ses caractères exté- rieurs. ( 216 ) 87. GENTIANEES. Gentianeœ. Juss. ,gen. 141. ïl est peu de familles 011 l’analogie des formes et des propriétés se fasse sentir avec plus de force que dans celle des Gentianées $ toutes ces plantes ont une saveur amère , qui réside dans leur herbe et sur-tout dans leur racine 5 elles sont conséquemment employées comme toni- ques , stomachiques et fébrifuges. Ces utiles propriétés sont sur-tout connues dans la racine de la Gentïana lutea , employée en France et en Angleterre , de la G . rubra , qu’on lui subs- titue en Allemagne, et de la G . purpurea y qui tient sa place en Norvège : on les retrouve dans le G. cenîaurium , dont on a tort , selon l’observation judicieuse de Cullen , de prescrire les sommités fleuries , puisque les fleurs sont insipides, et que l’analogie porte à attribuer plus d’efficacité aux racines. Si nous parcourons ra- pidement les genres qui composent cette famille, nous trouverons parmi les plantes indigènes le G.amarella , G. campestris. G, cruciata, Cf do- ra perfolïata ? Mejiyantkes trifoliata > VilLarsia nsymphoïdes , qui jouissent d’une saveur amère et qui ont été employées comme toniques ou fébri- fuges : parmi les plantes exotiques , nous trou- ( 21 7 ) vons le Villarsia ovata. Vent. , dont Pamertuma a été remarquée par les voyageurs ; le Gen - tiana peruviana employé par les Péruviens sous le nom de Cache 11; la Ckironia angularis , con- nue populairement aux Etats-Unis sous le nom de Centory , et employée comme amère tonique et fébrifuge 5 la Frasera walteri employée sous le même point de vue quoique un peu inférieure à la précédente 5 la Gentiana que les Indiens nomment Chirayita, et que , d’après leur exem- ple , les Anglais commencent à employer comme fébrifuge et stomachique $ les Couloubea alba elpurpurea, auxquels les habitans de la Guyane attribuent les mêmes vertus \ Y Ophiorhiza, dont la racine passe pour utile contre la morsure des serpens , comme on le dit d’un grand nom- bre de plantes toniques ; le Spigelia anthelntia qui jouit aussi bien que Y Ophiorhiza des pro- priétés vermifuges ; le Spigelia marylandica dont la racine est employée aux États-Unis en poudre ou en infusion aqueuse comme antliel- mintique , ou en infusion vineuse comme fébri- fuge ; enfin , le Potalia amara d’ Au blet , qui^ placé par sa forme entre les Gentianées et les Apocinées ? est amer comme les premières , âcre et propre à servir d’émétique comme les secondes. La racine des Gentianes ; malgré son amer- ( «8 ) tiune , renferme une certaine quantité de ma- tière sucrée,, et est susceptible de fournir de l’eau-de-vie, lofsqu’après l’avoir fait macérer dans Fean, on. la soumet à la distillation : cette propriété est connue populairement dans quel- ques parties de la Suisse , où Fou ..exploité* sous ce point de vue , la- Gentiane jaune. 83 ’ B I G N O’N î'A'CÉ E S. Bignonice* Juss. ,-gen. 137. Leurs propriétés sont presque inconnues , et leurs caractères botaniques encore mal fixés. Le bois de plusieurs Bignoniacées est réputé inat- taquable par les vers ; par exemple , B. longis- sima , Jacq. , B. pentaphylla , L. , etc. Les feuilles de la B. indica sont réputées émol- lientes , ainsi que celles des Sésames : les graines des Sésames donnent une huile fixe et inodore qui manque dans les vraies Bignoniacées 5 mais ce genre qui avait d’abord été associé aux Bsg- nones, mérite d’en être séparé, et M. de Jus- sieu le considère maintenant comme le type d’une nouvelle famille. ( 21 9 ) 89. POLÉMONIDÉES. Polemonia, Juss. , gen. i 36 . Propriétés milles ou peu connues. / 90. CONVOLVULACÉES. Convolvuli. Juss, , gen. i 32 . Murray observe que le genre des Liserons est éminemment favorable à ceux qui croient à la possibilité de juger les vertus des plantes d’après leurs affinités botaniques ; et en effet , les ra- cines de presque toutes les espèces de ce genre sont remplies d’un suc laiteux plus ou moins âcre, et qui est éminemment purgatif; nous employons déjà à cet usage le suc de plusieurs espèces de Liserons ; par exemple , la Scammo- née , qui, d’après Sibtborp , est produite dans le Levant par le Convolvulus scammonia , et une autre espèce du même genre (1) ; le Jaiap, (1) D’après l’analyse publiée par MM. Bouillon-La- grange et Vogel j la Scam menée d’Alep contient o,6o de ré- sine , et o,o 3 de gomme ; celle de Smyrne 0,29 de résine, et 0,08 de gomme. Il est probable que ces médicamerts proviennent de deux espèces différentes. Leur effet sur U corps offre au reste peu de différences» ( 220 ) que donne le C . jalapa ; le T urbith , tiré du C. turpethum ; le Méchoacan , extrait du C . mechoucana . Mais, outre ces espèces usuelles , il est nécessaire d’ajouter que l’on emploie au même usage les Convolvulus septum , C . ar- vensis et C. soldanella , en Europe ; le C. pan- duratus , aux États-Unis ; le C macrorhizos , à Saint-Domingue ; le C. macro car pus , à la Martinique; le C . mantimus , dans les Indes et dans le Brésil (1) ; et même la saveur amère qui caractérise tous ces purgatifs , se retrouve dans plusieurs espèces du même gçnre et dans les genres voisins, tels que Y Hydrolea , etc. Cette faculté purgative des Liserons est due à la résine qui est contenue dans leur suc , mais comme la proportion de résine varie beaucoup d’espèce à espèce, et quelquefois même d’indi- vidu à individu , il en résulte que la dose de ces racines est variable, et que souvent, pour éviter ces anomalies , on emploie leur résine isolée ; de cette proportion variable de résine résultent quelques anomalies dans la famille ; si la partie résineuse se trouve mêlée avec peu de mucilage , et , au contraire , répandue dans une substance dure et ligneuse , il en résulte ( t ) L’espèce qui sert de purgatif aux Brésiliens , est peut-être le Convolvulus b ras l 'liens is , Lin. ( 221 ) un médicament âcre et qu’on ne peut employer utilement qu’à l’extérieur 5 c’est ainsi que la racine des Liserons ligneux sert de stemuta- toire , comme on le voit par l’exemple du bois de Rhodes fourni aux Canaries par les Convoi - vulus jloiidus et C. scoparius , et par celui de Ylpomœa quamoclit , dont la racine peu char- nue sert de sternutatoire aux Indiens. Si ? au contraire ? cette résine se trouve en très-petite quantité dans une racine charnue et très-muci- lagineuse , alors elle ne sert plus que d’aromate , et cette racine peut être un aliment sain et agréable 5 c’est ce qui arrive aux racines du Convolvuius edulïs , dont les Japonais se nour- rissent ; et du Convolvuius batatas que mangent les Américains. Je ne parle point de la Cuscute ? qui s’é- loigne beaucoup des Liserons par ses caractères botaniques , à laquelle on a attribué des pro- priétés fort diverses et dont la nature est peut- être influencée par celle des plantes dont elle tire sa subsistance. 91. BORRAGINÉES. Borragineœ. Juss. ? gen. 12.S. Les Borraginées sont , en général , mucila- gineuses , douces > émollientes j leur mucilage ( 222 ) est quelquefois plus abondant dans la racine y comme dans le Symphytum , le Cy no gloss um ? qui est légèrement narcotique. Quelquefois ce meine mucilage est plus abondant dans les feuilles , comme dans les Pulmonaires et les Bourraches , qui servent d’alimens dans plu- sieurs pays ? et que la pharmacie emploie comme émoliiens et légers caïmans. Le suc de plusieurs Borraginées paraît con- tetur du nitre tout forme ; on Pa découvert dans celui de Bourrache , et on en soupçonne l’existence clans les Anchusa et quelques autres Borraginées , parce qu’elles décrépitent légère- ment au feu. L’éçorce de la racine de plusieurs Borraginées est d’un brun rougeâtre , et dans quelques-unes cette écorce donne une couleur rouge , lorsqu’on la met en infusion dans l’eau ou l’esprit-de- vin y mais sur-tout dans l’huile ou la graisse $ c’est ainsi qu’on confond sous le nom d’Orca- nette y Y Anchusa tinctoria qui paraît originaire d’Orient , le JLithospermum iinctorium , L. y sauvage aux environs de Montpellier et en Hongrie : on lui substitue l ’ Onosmçi echio'ides 9 qui a les mêmes propriétés. L’Orcanette d’Orient paraît être la racine de YEchium rubrum ; les Américains emploient aux mêmes usages Y An- chus a virginie a et le Lithosperm um iinctorium ( 22,3 ) de la Flore du Pérou. Ces racines colorantes sont à l’intérieur fades , mucilagineuses , comme celles de toutes les Borraginées. La matière colorante du L>ithospermum tinctorlum , et pro- bablement de toutes les autres Borraginées , est d’un rouge brun 5 lorsqu’elle est obtenue en masse , elle a du rapport ayec les résines , mais elle en diffère principalement : i.° en ce que ? traitée par l’acide nitrique , elle fournit de l’acide oxalique et une petite quantité de ma- tière amère ; 2 ,° que les alkalis se combinent avec elle avec énergie et changent sa couleur rouge en un beau bleu 5 3 .° que l’eau distilée la précipite de sa dissolution concentrée dans l’alcool. Il semble donc d’après ces faits , dus aux expériences de M. Pelletier , que cette ma- tière, particulière jusqu’ici à la famille des Borraginées * pourra être ajoutée au nombre des matériaux immédiats des végétaux. Le grouppe des Sebesteniers , dont Ventenat avait formé une famille particulière ? paraît différer un peu du reste de la famille ; les pro- priétés des végétaux qui en font partie sont cependant trop mal connues pour rien affirmer à leur égard 3 iis diffèrent des vraies Borragi- nées par leurs fruits charnus ; la chair de ces fruits est mucilagineuse , adoucissante : les Sebestes produites par les Cordia myxa et sebestena en sont des exemples. ( 224 ) 92. SOLANÉES. Solaneœ. Juss. ? gen. 124. La famille des Solanées semble réunir à-la- fois , et des preuves nombreuses de la ressem- blance qu’ont les propriétés des plantes ana- logues , et en même temps des exceptions dont nous ne pouvons trouver aucune solution. Il paraît cependant que ces exceptions dispa- raîtront au moins en grande partie lorsqu’on aura étudié d’une manière plus exacte les pro- priétés de ces plantes d’organe à organe , et dans chaque genre en particulier. On regarde les Solanées considérées en gé- néral , comme des narcotiques , et en effet fac- tion narcotique se retrouve avec plus ou moins d’intensité dans plusieurs organes et dans la plupart des espèces ; mais on a souvent exa- géré leurs propriétés vénéneuses : une seule espèce dont l’action est vraiment très-intense et très-délétère , paraît avoir été la cause de l’opinion reçue sur les propriétés de la famille : c’est Y A trop a belladonna , désignée successive» ment sous les noms de Solanum maniacujn , S. furiosum , S. Lt thaïe. Il paraît résulter des expériences et de l’analyse de la Belladonne , faite par M. Vauquelin , que le principe délé- { 225 ) tère de cette plante est mie matière amère et nauséabonde , soluble dans l’esprit de vin , for» ma nt avec le tannin une combinaison insoluble et fournissant de l’ammoniaque par sa décom- position au feu. Il serait curieux de vérifier ? par des analyses comparatives, jusqu’à quel point ce principe se retrouvé dans les autres Solanées. Si nous examinons successivement ce qu’on sait des propriétés de chacun des organes de ces plantes , nous y trouverons plus d’analogie qu’il ne le paraît au premier coup-d’oeil , ainsi les vraies racines de diverses espèces ont une action narcotique plus ou moins prononcée , telles sont les racines de Belladonne , de Man- dragore, de Jusquiame , etc. Les tubercules souterrains qui se développent dans les Spla- num tuberosum et montanum (1) ^ et qui, au moins dans la Pomme - de - terre , naissent plutôt sur des organes analogues aux tiges que sur de vraies racines , ces tubercules , dis- je 9 composés essentiellement de fécule, ont offert aux Américains et ensuite aux Européens l’un (t) M. Valenziiiela vient de découvrir en Amérique une troisième espèce de Spianum à racine tubéreuse , qui diffère de la Pomme-de-terre par ses fruits oblongs ? et qu’on a proposé de nommer S. valenzuelœ. l5 1*26 ) des ali mens les plus sains et les plus utiles qu'ils possèdent. Ce fait rentre dans l'observation générale faite plus haut sur les propriétés des exostoses farineux \ toutes les objections faites contre l’usage des Poimnes-de-terre sont au- jourd’hui presque oubliées , et lors même qu’on parviendrait, ce qui n’a pas encore été fait , à en extraire quelque peu d’extractif nar- cotique , il ne faut pas perdre de vue que tous nos alimens renferment une petite dose d’un principe excitant qui , s’il y était en plus grande quantité, pourrait être nuisible, mais qui y est nécessaire pour leur servir de condi- ment naturel. Les feuilles de la plupart des Solanées pa- raissent jouir d’une propriété excitante et nar- cotique , mais à des degrés d’intensité très- divers dans les diverses espèces $ c’est ce que nous offrent les feuilles et les parties herbacées des Atropa , des Tabacs , des Jusquiarnes , des Piiysalis , des Datura , des Solanum , etc. L’in- tensité d’action nous offre tous les degrés in- termédiaires entre celles de Y Atropa bella- donna , qui excite des vertiges, des convulsions, des vomissemens , jusqu’à celles de certains Solanums de la section des Maurelles , qui servent d’alimens comme légumes. On employé au États-Unis le suc du Datura stramanium , ( 227 ) à la dose de 20 à 3 o grains , dans les car d'épilepsie ou de manie sans lièvre. On sait que le suc de V Atropa boltadonna 3 administré soit à l’intérieur , soit en frictions , jouit de la singulière propriété de produire la dilatation et la fixité des pupilles : M. Dunal a reconnu que les sucs de plusieurs Solanums de la section des Maurelles, jouissaient de la même propriété , mais à un degré beaucoup plus faible. Les fruits des Solanées présentent , dans l’état actuel de la science, plus d’anomalies que toutes les autres parties ; ainsi les fruits de la Belladonne , du Stramonium , de la Jusquiame , de quelques Cèstrums , de quel- ques P hy salis 3 ont des propriétés narcotiques; le fruit du Physalis alkekengi est employé principalement dans la médecine vétérinaire comme diurétique , quoique les enfans le mangent cependant impunément : plusieurs autres fruits de Pbysalis ont une saveur agréable et ne paraissent produire aucun effet nuisible. Peut-être que lorsque on aura exa- miné d’une manière plus exacte l’action parti- culière de chacune des parties de ces fruits ? on verra disparaître la plupart des anomalies qui nous étonnent aujourd’hui ; c’est ce qui est déjà arrivé pour le genre Solarium . Parmi ( 228 ) les fruits de ce genre qui ont été employés , les tins cfnt une saveur douce et sucrée , et , à cause de cette saveur , sont mangés cruds dans diverses contrées 5 d’autres , cuits et assaisonnés de diverses manières , servent d’alimens chez divers peuples 5 M. Dunal a prouvé , dans son histoire desSolanums , qu’il est certaines espèces qui constituent un grouppe particulier dans le genre et qui ont un sarcocarpe ou une chair douce et salubre, tandis que la pulpe (1) qui entoure les graines est, âcre et délétère. Les propriétés des Solanées examinées dans chaque genre offrent une grande analogie ; ainsi toutes les espèces des genres Nlcotiana 9 Ryosciamus, D attira. , etc., ont de tels rap- ports d’action , que la plupart sont employées presqu’indifféremment les unes pour les autres $ (1) On sait que les Botanistes désignent par le nom d© chair ou de sarcocarpe , la partie charnue ou pulpeuse du péricarpe , et par celui de pulpe , des matières dont la na- ture est fort diverse 5 ainsi je ne suis pas éloigné de croire que dans diverses plantes on désigne sous ce nom , ou l’or- gane auquel j’ai donné le nom de sarcoderme ( Théor. El. p. 39 5 ) , ou une exsudation de la surface externe de la graine , ou une exsudation du cordon ombilical , ou enfin une matière produite par la paroi interne du péricarpe , ou par le placenta. ( 229 ) les fruits de tous les Capsicum ont une saveur âcre et piquante ; ceux de tous les Lycopersi - cum ont une saveur un peu aigrelette et ana- logue à celle de la Tomate ÿ il est très-vrai- semblable, je le répète, que lorsqu’on aura mieux examiné lesSolanées de genre à genre et d’organe à organe , cette famille ne présentera presque plus d’anomalies. 9 3. PERSONNES. Personatœ. Brown., prod. 433 . — Scrophulariæ ci Pediculares. Juss. , gen. 1 18 et 99. Quoique la famille des Personées soit admise par la plupart des botanistes , il s’en faut bien qu’elle soit une des plus naturelles. Ses pro- priétés offrent aussi des diversités et des ano- malies qu’il est difficile de soumettre à des lois générales. Ces plantes présentent presque toutes une odeur faible , mais nauséabonde , une saveur un peu amère et des propriétés plus ou moins âcres et suspectes ; mais cette odeur est suave et aromatique dans \ Ambulia , Lam. j cette sa- veur est rafraîchissante dans le Mimulus lu - tcus , qui sert de légume aux Péruviens , et l’âcre té de leurs sucs semble disparaître dans quelques Aruhirrinum > qui ont été réputés ( z3o ) émolliens. Presque toutes les espèces de la tri- bu des Rliinantacées sont remarquables par la propriété astringente et un peu tonique de leur écorce et de leur feuillage $ mais cette tri- bu est elle-même bien caractérisée par ses ca- ractères botaniques. Ces plantes présentent une particularité qui indique l’analogie de leur nature chimique ÿ c’est qu’elles tendent toutes à noircir par la dessication. Observons cependant que plusieurs plantes de cette famille paraissent produire des effets analogues sur le corps humain ; ainsi les feuilles et les racines des Scrophulaires ( S, aquatica , et peut-être S. nodosa ) , des Gratioles (1) , ( Gra- tiola offwinalis , et G. peruviana ) , de la Cal- céolaire, agissent comme purgatifs, et à plus forte dose comme vomitifs $ ces propriétés sont por- tées à un haut degré , et jointes à une âcre té et à une virulence remarquable dans plusieurs (1) L’analyse de la Gratiole officinale donnée par M. Vauquelin , paraît indiquer assez clairement que sa propriété purgative réside dans une matière analogue aux résines , mais qui en diffère en ce qu’elle est soluble , sur-tout à chaud, dans une grande quantité d’eau ; cett# substance a une saveur très-amère et se dissout plus faci- lement encore dans l’alcool que dans l’eau. On y trouv® aussi un peu d’un sel de potasse qui paraît un malate. ( *3i ) Digitales, et sur- tout dans la digitale pourprée. Les feuilles de cette plante réduites en poudre ou en extrait , produisent sur le corps humain des effets très-divers et qu’il est difficile d’ex- pliquer \ elles excitent des vornissemens , des déjections, des vertiges \ elles augmentent la secrétion de la salive et de l’urine , et diminuent la fréquence des battemens du pouls 5 à trop forte dose , elles causent souvent la mort $ à dose plus faible , elles sont utiles contre les scrophules ( comme on l’a dit des scrophulaires ) contre l’hydropisie, l’asthme , la phthisie , etc. et ses congénères méritent toute l’attention des médecins et des chimistes \ nous manquons de bonnes analyses de toutes les Personées,et cette cause augmente sans doute à nos yeux leurs anomalies médicales. 94. LABIÉES. Labiatœ . Juss. , gen. 110. Les Labiées constituent la famille la plus naturelle peut-être de tout le règne végétal $ la ressemblance de leurs formes est telle qu’au- cun naturaliste n’a tenté de les désunir , et qu’à peine on peut les séparer en grouppes secon- daires ou en genres. Les propriétés de ces plantes offrent une ressemblance tout aussi frappante , ( 2,32 ) et nulle part l’accord des propriétés avec les, formes n’est mis aussi complètement à décou- vert par la nature. Toutes les Labiées sont remarquables par leurs vertus toniques , cordiales et stomachi- ques ; on peut distinguer dans toutes ces plantes, selon l’observation de M. de Jussieu, deux prin- cipes, l’un amer, l’autre aromatique , mélangés à proportions différentes dans toutes ces es- pèces; leur amertume, qui se conserve dans les infusions et les décoctions de ces plantes , pa- raît résider dans un principe gommo -résineux qui se trouve plus ou moins abondamment dans chacune d’elles ; les espèces où il abonde , telles que leScordium ( Tenerium scordium ) ,1a Ger- ma ndrée ( T. chamadris ) , ITvette ( T. Cka~ mapitys ) , etc. , sont particulièrement em- ployées comme stomachiques, et même quel- quefois comme fébrifuges ; celles , au contraire* qui abondent en huile essentielle, et qui sont conséquemment plus aromatiques , sont em- ployées comme stimulans, échauffans et exci- tans ; les mélanges divers de ces deux principes et l’état particulier de chacun d’eux ont fait choisir plusieurs Labiées pour un grand nombre d’usages médicaux et diététiques ; les unes ser- vent d’aromates dans nos mets ; telles sont la Marjolaine, la Sarriette ; le Basilic, etc. D’autres ( 233 ) fournissent par l’infusion des boissons légère- ment toniques , et qu’on prend en guise de Thé ; telle est la Sauge , la Mélisse , le Draeo- céphale, le Gléchome , etc. Plusieurs Labiées réduites en poudre sont employées comme ster- natatoires et réputées céphaliques $ par exem- ple , le Marum , la Marjolaine , la Lavande ; quelques-unes, comme le Thym , le Serpo- let, etc. , sont employées comme parfums , d’au- tres fournissent les eaux spiritueuses dont nous faisons le plus fréquent usage ; telles que l’eau de Mélisse , l’eau de Lavande , l’eau de Menthe et l’eau de Romarin , nommée improprement l’eau de la Reine de Hongrie. Toutes peuvent fournir une quantité plus ou moins considérable d’huile volatile , ©t ce produit est sur- tout remarquable dans les Thyms,, les Origans, les Lavandes 5 la chimie vient d’a» jouter un nouveau fait à tous ceux que l’on connaissait sur l’uniformité des vertus des La- biées 5 on avait déjà remarqué que plusieurs d’entr’elles exhalent une odeur de Camphre , et quelques cristaux de cette substance avaient déjà été trouvés par Gaubius dans l’huile de Thym , par Kunkel dans celle de Romarin , par Kruge dans celle de Marjolaine , par Cartheu- ser dans celle de Serpolet , etc. M. Proust a prouvé depuis que le Camphre existe de môme ( 234 ) et en quantité tellement abondante , qu’on peut l’extraire avec avantage dans les huiles de Sauge et de Lavande , et probablement dans toutes les huiles volatiles des Labiées. 9 5. MYOPORINÉES. Mjoporinœ. Brown ? prod. 5 14* Propriétés inconnues. 96. PYRÉNACÉES. Pyrenaceæ. Vent., Juss. ? Ann. Mus. 7, p. 65 .— Viùces . Jiiss. , gen. 106. Les nombreux arbrisseaux de cette famille sont presque tous exotiques ? peu connus et inutiles en médecine 5 on peut soupçonner qu’ils sont légèrement amers et astringens ; la .Verveine et Y Agnus castus autrefois employés ? sont maintenant hors d’usage. Le Vitex agnus castus et le Vitex trifolia sont l’une et l’autre cités comme réfrigérans et anti - érotiques y mais ces propriétés ont besoin d’être rectifiées et analysées. ( a 35 ) 97. ACANTHACEES. Acanthi. Juss. ; gen. io 5 . Les propriétés de cette famille sont milles ou peu importantes. On peut soupçonner que ces plantes sont émollientes 5 du moins la Brancur- sine ( Acanthus mollis , L. ) , est employée comme telle à cause de son mucilage, et la Justitia biflora est employée en Egypte sous forme de cataplasme. Les voyageurs parlent de la Justicia ecbolium comme d’un diurétique , et de la J ’. pectoralis comme d’un vulnéraire. Les sommités de la Justitia paniculata entrent dans la teinture alcoolique , stomachique et fébrifuge que les Anglais emploient dans l’Inde sous le nom de Drogue amère . 98. LENTIBUL AIRES. Jjentibulariœ . Rich. in Flor. Par . 1 , p. 26. Brown., prod. 429. Propriétés nulles , ou inconnues. 99. PRIMULACÉES. Lysimachiœ . Juss. , gen. g 5 . — Primulaceœ. Vent. Les Primulacées n/Qïit que des propriétés fai? ( z36 ) blés et peu prononcées ; elles paraissent être légèrement astringentes et amères : la racine du Cyclamen se distingue par son âcreté > la Primevère , par le léger arôme de sa fleur $ le Mouron est maintenant hors d’usage après avoir eu la réputation de guérir la rage , la folie , l’é- pilepsie, et presque toutes les maladies incu- rables : la Cortusa mathioli a été aussi vantée » dans les maladies nerveuses. 100. GLOBULAIRES. Olobularice. Lam. et DC., Fl. Fr. 3 , p. 427. — Lysi- machiai'um gen» Juss. Dans le grouppe des Globulaires , voisin des* Protées, des Primulacées et des Dipsacées , mais qu’on ne peut réunir avec aucune de ces trois familles , on trouve en général des plantes dont la tige et les feuilles ont une amertume remar- quable, et purgent assez fortement en donnant du ton à l’estomac et aux intestins. Ces pro- priétés sont assez prononcées dans le Globula- ria alypum (1), employé par les Provençaux 5 (1) Alypi folia , off. — Voyez Garidel , Histoire des Plantes des environs d’Aix, 1, p* 210. Voyez aussi un Mémoire de M. Deslongchamps , inséré par extrait dans le Bulletin de Pharmacie } où l’on trouve une discussion ( a3 7 ) on les retrouve clans le G. nudicauïh , Lin. , et l’amertume des autres espèces de Globulaires* peut faire présumer l’analogie de leurs vertus. 101. PLUMBAGINÉES. Plumbagineœ . Juss., gen. 92. Les deux genres qui composent la petite fa- mille des Plumbaginées sont distingués par dess caractères botaniques très-prononcés , et par des propriétés médicales assez différentes * mais qui paraissent constantes dans chaque genre. La racine des Statice * et sur-tout des Lime - ni uni, est astringente et tonique. Dans les P Lumbago > la racine et la plante presqu’entière est âcre , caustique et employée à l’extérieur pour corroder les ulcères * et même dit - on , pour guérir la gale : ces pro- priétés sont communes au PI . europaea , au PL scandens , appelé Herbe au diable par les habitans de Saint-Domingue > aux P lumbago zeylanica et rosea P employés comme vésica- toires dans l’Inde. intéressante sur l’emploi de la Globulaire et sur l’utilité de la substituer au Séné {Bull, Pharm ,, 1809, p, 559.) ( ^38 ) 102. PLANTAGINÉES. Plantagineœ. Juss. , gen. 89. Les feuilles , l'herbe et la racine des Plantains sont un peu amères et astringentes , et ont même été quelquefois conseillées comme fébri- fuges $ leur graine est mucilagineuse ? un peu âcre. Au reste , sous ces deux points de vue , les diverses espèces de Plantains ont été substi- tuées les unes aux autres } et d’ailleurs ces médi- çamens sont peu-à-peu exclus des pharmaçies. Les graines de tous les Plantains sont em- ployées dans les arts à cause de la grande quan- tité de mucilage qu’elles renferment ; on re- cueille en grand dans le Midi de la France , celles du P. arenaria qui se vend sous le nom de graines de Psyllium ( 1 ). (1) Le Plantago arenaria , sauvage sur tous les bords de la Méditerranée et inusité en France , se recueille avec soin , et fournit un objet d’exportation beaucoup plus considérable qu’on ne pourrait le croire. Les négo- cians de Nisraes et de Montpellier en envoient dans le nord de l’Europe : cette graine sert à laver les mousse» lines et peut-être, vu l’énorme quantité qui s’en con- somme , à d’autres usages industriels qui ne sont pas bien connus. ( 23 9 ) io3. NYCTAGINÉES. Nyctagineœ, Juss. , gen. 90. Depuis qu’il est bien démontré (2) que le Jalap 11’appartient point aux Nyctaginées , cette famille a cessé d’intéresser les médecins. Il faut cependant remarquer que les racines des Belles- de-Nuit jouissent de propriétés purgatives. Bergius a éprouvé que celle de la Nyctago dichotoma purge assez bien et à -peu» près comme le Jalap 5 il n’a pas eu de succès en employant les N. jalap œ et JSl. longiflora 9 parce qu’il les avait employées à trop faible dose j Chamberlaine , qui a donné le JSf. jalapæ à la dose de 4° grains, l’a vu agir comme purgatif } cette propriété paraît tenir à la ré- sine que cette racine contient. Crell a employé avec succès , comme purgatif , la résine de la N. longiflora à la dose de 20 grains $ cette même propriété purgative semble se retrouver dans la Boërrhavia tuberosa , Lam., si l’on peut en juger par le nom d ' Herba puigativa 9 qui lui est donné par Feuillée ; cependant on ( 2 ) Voyez le Mémoire de M. Desfontaines dans 1® Annales du Muséum d’ Histoire naturelle, ( 24° ) assure que les Américains mangent la racine de cette plante. La graine de toutes les Nyctaginées offre un périsperme farineux qui , par la grosseur à laquelle il atteint dans les Belles-dé-Nuit ? pourrait peut-être devenir de quelque utilité. 104. AMARANTHACÉES. Amaranthacœ . Juss. , gen. 87. Les Amaranthacées sont de peu d’utilité , et ne paraissent posséder aucune vertu bien pro- moncée $ la plupart de celles , du moins qui sont grandes et herbacées comme les ama- rantlies , peuvent se manger en légumes. Ainsi on se nourrit en Gascogne de l’ Amaranthus blitum y dans l’Inde , de Y Am. oleraceus y Lin. , de Y Am. farinacus y Roxb. , et de plusieurs au- tres. L ' Achyrantes obtus folia, Lam . , passepour diurétique dans les Indes \ mais cette propriété n’est rien moins que constatée. io5. CHENOPODÉES. Ühenopodeœ. Fl. Fr. 3, p. 38o. — Atriplices. Jliss. gen. 83. La famille des Chenopodées présente quel- ques diversités dans les tribus dont elle est ( 241 ) composée ; les deux premières , qui dé Faveu même de l’illustre auteur des ordres naturels j ne sont que faiblement liés aux suivantes , en diffèrent aussi par leurs propriétés *. c’est dans ces sections que nous trouvons le Campho~ rosma , dont l’odeur rappelle celle du Camphre y le Petiveria , qui exhale une forte odeur d’ail ; le Phytolacca , dont la racine , les feuilles et la baie elle-même purgent avec violence , et appli- quées à l’extérieur , paraissent corroder les ul- cères. Cette plante , naturalisée dans plusieurs provinces , a été trop négligée par les médecins Européens ; les Anglo-Américains en ont da- vantage exploré les propriétés ; ses baies in- fusées dans l’eau- de-vie , sont , aux Etats-Unis * un remède populaire contre les rhumatismes chroniques, et sont substituées au Gayac | Barton assure qu’elles sem blent même préféra blés dans les rhumatismes qui succèdent aux ma- ladies vénériennes $ le suc de ses baies, épaissi à la consistance d’extrait , a été employé contre les scrophules et les ulcères cancéreux ; 011 ap- plique de même sur ces ulcères les feuilles de la plante : les jeunes pousses perdent toute leur âcreté par la cuisson à l’eau ) on les mange aux États-Unis et elles sont , dit-on , préférables aux asperges les plus fines. Quant à la troisième et à la quatrième sec- lé ( * 4 » ) lion des Chénopodées, qui forment réelle- ment un grouppe naturel, nous y trouverons peu d’ai\omalies ; à l’exception des feuilles de quelques Ansérines , qui renferment des huiles essentielles, et qui jouissent par -là de propriétés toniques et anti - spasmodiques. ( Chenopodium ambrosioïdes > C. botrys > C. vulvaria ? ) Nous trouverons y en général , que les feuilles des Chénopodées sont émol- lientes et propres à la nourriture de l’homme $ c'est dans cette famille que se trouvent les Bêtes , les Epinards , les Arroches , qu’on cul- tive dans tous nos potagers $ le Chenopodium quinoa 9 qui , selon Dombey , fait la nour- riture des habitans du Chili $ les Baselles ( B . rubra et côrdifolia ) , qui servent d’aliment aux Indiens $ les Salicornes, les Anabasis et les Soudes , qui se mangent en compotes ou en salades dans tous les pays maritimes. Mais arrêtons nous un moment sur cette production de la soude , qui intéresse si vive- ment la chimie , la médecine et les arts ; elle est due particulièrement aux Chénopodées ; ainsi , la plupart des Sa Isola (1) , des Sali- (1) Salsola sativa y à Alicante. S . soda , kali et tragus f sur les côtes de France. ( ) cornes ( 2 ) ? des Anabasis (3) , quelques A tri » pièce ( 3) , quelques Chéno podiums mari limes (4) > et probablement aussi les Anredera , les Ca * roxilum et les Acnida , servent ou peuvent servir à la fabrication de la soude ; nulle part l’analogie naturelle ne semble plus puissante $ mais cette même faculté de donner de la soude se retrouve dans plusieurs Ficoïdes ? telles que Mesembiyanthemum cryslaUinum aux Cana- ries , M, copticum et nodijlorum en Barbarie 9 Aizoon hispanicum en Espagne , Keaumuria vermiculata en Barbarie , dans le Vlantago squarrosa en Egypte > le Suriana inaritima à Cayenne ? le Bâtis maritima aux Antilles , etc. Quels sont donc les organes communs à tant de plantes si diverses ? Remarquons d’abord que cette production de la soude dépend uni- quement de la proximité de la mer d’où elles la tirent , et que les mêmes plantes cultivées loin des côtes , produisent d’autres sels : ainsi 9 pour ne point sortir de la famille des Chéno- ( 1 ) Salicor/iia herbacea et fruticosa , en France. S. arabica , en Egypte. ( 2 ) Anabasis aphylla , dans l’Orient. (3) A triplex maritima , A. Tialymus . (3) Chenopodium maritimum y C* fruticosum , C. set.- gerum , etc. ( M4 y podées, on trouve du nitrate de potasse tout formé dans plusieurs . Chenopodium , et je suis tenté de croire que les petits grains qui re- couvrent les feuilles de plusieurs Arroches sont aussi de nature saline. Remarquons encore que toutes les plantes qui, cultivées au bord de la mer , donnent de la soude , sont d’autant plus estimées que leur consistance est plus molle , plus succulente et plus aqueuse $ mais cette consistance tient à ce que leur tissu cellu- laire est formé de membranes plus faciles à distendre , et de cellules plus grandes : de cette même structure du tissu cellulaire résulte qu’à volume égal , la matière charbonneuse est dans ces plantes en quantité beaucoup moindre que dans les autres , et que les sels , dissous dans l’eau aspirée par les racines , trouvent plus d’espace dans les cellules pour y être déposés sans obstruer les pores. Ces deux faits , dus à la structure du tissu cellulaire , expliquent à mes yeux comment il se lait que, malgré la quantité de soude que contiennent toutes les plantes maritimes ^ on se soit accordé dans toutes les parties du monde à choisir pour l’ex- ploitation celles dont la consistance est plus molle : comment la présence de la soude , quoiqu’accidentelle , se trouve cependant con- forme dans plusieurs cas ayec les classifications ( 245 ) naturelles ; comment enfin les plantes qui fournissent de la soude ont de grands rapports avec celles que divers peuples ont choisies pour leurs alimens. Avant de quitter les Chénopodées , j’obser- verai que leur graine paraît douée de propriétés un peu délétères et stimulantes : ainsi celles du Chenopodium anthelminticum sert de ver- mifuge en Amérique ; celle de Y Atriplex hor- îensis excite le vomissement ou un dévoiement souvent douloureux. Le Chenopodium quinoa est une exception à cette observation si sa graine sert réellement de nourriture , comme on peut le croire en voyant que Dombey compare cet aliment au Riz. La racine des différentes espèces de Bêtes ( Beta vulgaris et B . cicla ) contient, comme on sait , une grande quantité de sucre. La chimie fournirait-elle quelque moyen pour expli- quer le rapprochement du sucre et du sel dans diverses espèces de Fucus et d’Ulvà d’un côté , et dans les Bêtes et les Salsola de l’autre. Je me contente d’indiquer ici le fait. ( 2 4<5 ) 106. POLYGONÉES. Poljgoneœ. Juss. , gen. 82. Dans les Polygonées, nous trouverons trois classes de propriétés diverses, selon les parties des plantes que nous examinerons, et nous verrons ainsi dans cette famille une nouvelle preuve de la nécessité de distinguer les organes , pour établir une comparaison exacte. Les racines des Polygonées s’offrent d’abord à notre examen , et ici nous trouvons , pour ainsi dire comme chef* de file , la racine de Rhubarbe $ on connaît ses utiles propriétés comme purgatif et comme tonique ; on sait combien de discussions se sont élevées parmi les botanistes pour déterminer la véritable Rhubarbe , et qu’elles ont abouti à prouver que quoique le Rheum palmatum > L. , pro- duise celle qui est la plus usitée , on en tire aussi des Rheum compactant , undulatum et hybridum . Mais l’analogie des propriétés s’é- tend plus loin encore $ les racines de Rheum rhaipondicum et des Rumeac sont aussi purga- tives , quoiqu^à unhnoindre degré 5 etlaracine du Rheum ribes est aussi regardée comme laxative par les Persans , d’après le témoignage de Brun. Quant aux propriétés toniques de la ( -47 ) Rhubarbe , nous les retrouvons dans presque tous lesRumex, et plusieurs Polygonum. On sait que l’on peut distinguer trois principes chimiques dans la Rhubarbe > une matière résineuse , une matière gommeuse , et un prin- cipe astringent qui tend à noircir le sulfate de fer , principe auquel tiennent probablement ses propriétés toniques; nous le retrouvons de même dans le Rheuin rhaponticum{\) ; dans les racines de tous les Rumex ? même ceux dont les feuilles sont acides ; dans les racines du P. bis - Çorta , du P. avïculare , et peut-être de plu- sieurs autres espèces de ce genre , dans l’écorce des Co ceo lob a dont une espèce ( le Coccoloba mifera ) produit un suc si fortement astringent qu’il a souvent été confondu avec la gomme Kino. La partie gommeuse qui est , comme on sait y plus abondante que la résine dans la Rhubarbe , se retrouve presque seule dans la racine du Rfieurn ribes } et dans celle du Cal U* (i) On lit dans la plupart des livres de Botanique ett de Matière médicale } que le Rheum rhapontiGum est ori* ginaire du Mont-d’or; je aie suis assuré que l’on ne trouve en Auvergne que le Rumex alpinus , dont on re- cueille la racine pour la vendre sous le nom de RJiapon • tin j le vrai Rheum rhapontiGum sa trouve saurage au mont Caucase. ( *48 ) gonum pterococcus de Pallas. M ais il y a plus y cette gomme, dans la Rhubarbe , est toujours jointe à une matière colorante orangée, de sorte qu’elle teint l’eau ou la salive en rouge orangé. Cette même propriété existe dans les racines de tous les Rheum, de tous les Ruraex , et même du CalLigonum pterococcus , quoique plus faiblement. Enfin la partie résineuse se retrouve indiquée par la chimie dans le Rheum raponticum , le Rumex alpinus , c’est-à-dire dans les Polygonées purgatives. Les jeunes pousses , les pétioles , et même les feuilles peu âgées de toutes les Polygonées fournissent à l’homme un aliment sàin et agréa- ble $ ainsi , on mange le Rumex alpinus dans le Dauphiné ; toutes les espèces de ce genre qui croissent en Islande , y servent à la nour- riture des hommes \ le R* acütus ne se mange que lorsqu’il est jeune : le Rheum rhaponticum et le Rheum undulatum servent d’aliment en Sibérie , sans que leurs parties supérieures par- ticipent aux propriétés purgatives de leurs ra- cines. Mais ici nous trouvons une légère ano- malie ; dans la plupart des Polygonées , la sa- veur des tiges et des feuilles est un peu austère, nullement acide. Dans une partie des Rumex , et dans quelques Polygonums au contraire elle est acide , rafraîchissante j cette anomalie di- ( M9 ) mlimera de force, si nous observons , i.° que tous les auteurs ont attribué au suc du Kheunt ribes ces deux qualités diverses , l’astringence et l’acidité $ 2. 0 que tous les Rumex acides , au- trefois nommés Oseilles , se distinguent par un caractère botanique prononcé ( l’absence de tubercules sur les ségmens extérieurs du péri- gone , et les feuilles munies d’oreillettes ) , et doivent de nouveau former un genre particu- lier. Le Polygonum hydrOpiper a une saveur âcre et piquante , qui fait exception dans cette famille. Observons cependant que son suc rou- git le papier bleu , et semble par-là se rappro- cher des Oseilles. Enfin , les graines de toutes les Polygonées contiennent un périsperme farineux propre à la nourriture de l’homme : nous n’employons à cet usage que les Polygonum fagopyrum, et tar - tarlcum ; mais c’est uniquement à la grosseur de leur graine et non à la différence de leur nature , qu’il faut attribuer cette préférence. Les petits oiseaux se nourrissent de celles du Polygonum convolvulus ; on sait que les graines du Polygonum aviculare sont fortement émé- tiques , souvent purgatives 5 elles exhalent lors- qu’elles sont réduites en poudre une odeur nau- séabonde ; ce fait est dans l’état actuel de la fcience une exception bien marquée aux pro* ( 2^0 ) priétés ordinaires de la famille : il faudrait oW server si cette propriété émétique ne résiderait point ou dans l’embryon , ou dans le spermo-r derme de cette graine , et si une semblable vertu ne së rencontrerait pas dans les organes ana- logues des autres espèces de Polygonées. Les Cocqoloba semblent former une exception par leur fruit aqueux et succulent; il faut observer que ce n’est pas proprement le fruit qui a cette qualité , mais que c’est le calice qui persiste , se renfle et prend l’apparence d’une baie. Ainsi , §i le Raisinier s’éloigne par-là des propriétés des Polygonées , c’est qu’il s’en éloigne aussi par la forme. 107. LAURINÉES. Lauri . Juss. ? gen. 80 , excl. gen. affîn. La famille des Laurin ées , quoique peu nom- breuse en genres ? contient un grand nombre d’espèces , et mérite de nous arrêter un mo- ment par l’importance des médicamens qu’elle fournit. Tout le monde sait , cfune manière générale > que tous les arbres qui composent cette famille gpnt plus ou moins aromatiques dans leurs dif- férentes parties ; et sur cet aperçu , on a déjti çité cette famille comme tendant à prouver l’a- ( 25 ! ) nalogie des propriétés et des formés. Cette ana- logie sera mieux prouvée , si nous entrons ici dans quelques détails , si nous montrons qu’au- cune des propriétés de ces plantes n’est isolée; et que les mêmes organes jouissent de vertus analogues. L’écorce des Laurinées est comme dans le plus grand nombre des Dicotylédones , la par- tie la plus active , et les feuilles , participent ici , comme d’ordinaire , aux propriétés de l’é- corce : on sait que celle-ci est éminemment aromatique , chaude et stomachique dans le Cannelier (1). Ces mêmes qualités se retrouvent dans le L. cassia> Lin. (2); le L . malaba - thrum 9 Lam. ( 3 ); le L. culilaban , Lin. (4) f qui n’est peut-être qu’une variété du précédent ; dans les feuilles du Laurus parvifolia , Lam. \ dans l’écorce du Laurier encore mal connu, qui produit la fève de Pichurim ; dans le Laurus appelé bois Canelle à l’Ile-de-France; dans le L . quixos y Lam. , qui porte au Pérou le nom d’arbre de Canelle ; dans le Laurus ben- join 9 L. , où son odeur approche un peu du (3) Laurus cinnanomurn , Lin. (2) Cassiçi lignea 9 off. ( 3 ) Malabatrum , off. ( 4 ) Culilaban 011 Culila-tyan 3 off. ( 252 ) Benjoin, et qui était employé comme épice aux Etats-Unis pendant la guerre d'Amérique $ dans notre L. nobilis , originaire d’Europe ; et enfin , dans l’écorce même du Lcmrus sassafras , L. , qui est beaucoup plus aromatique que le bois, quo ; que celui-ci soit le plus usité. Cette même propriété aromatique se retrouve dans les fleurs de quelques Laurinées , et ceci n’est point con- traire à la distinction des organes , puisque ces fleurs , munies d’un périgone simple , partici- pent à la nature des feuilles. Elles se retrouvent sur-tout dans les fruits , comme on le voit dans le Canellier et le Litsé, dont les baies sont un peu aromatiques , dans les fèves de Pichurim , dans le Laurus glauca > Thumb. , dans le Lit” se a sebifera, de Jussieu, qui offrent une exsu- dation de suif analogue au Yirola ; dans 1 'Ajo- vea y d’Aublet , etc.., etc. Les exemples que je viens de citer tendent à nous indiquer deux sortes d'huiles, l’une vo- latile , l’autre fixe , dans les Laurinées : il en est dejnêine de la partie pulpeuse de leur fruit, comme on le voit dans les baies du Laurier d’Europe. L’huile fixe concrétée sous la consis- tance de beurre , paraît seule composer le fruit du L. persea , si vanté par les habitans des Antilles. Nous retrouvons le même mélange de deux ( 253 ) principes différens dans leur écorce. Elle con- tient dans plusieurs Laurinées , outre l’huile volatile dont j’ai p irlé plus haut , une liqueur rouge ou violette qui se présente sous la forme d’une émulsion , et qui jouit ordinairement de propriétés assez âcres ; ces deux principes sont réunis dans le L. parvifolia , Lam. : le second seul a frappé l’attention des voyageurs dans le Laurus globosa , Lam. 5 et c’est probablement dans cette cathégorie qu’il faut ranger le Lau- rus fœtens > Ait. , et le Laurus caustica . Outre les nombreux produits que je viens d’énumérer , les Laurinées nous fournissent le Camphre , médicament précieux par son action résolvante, topique et anti-spasmodique. Il est sur- tout produit par deux espèces de Lauriers , dont l’une est le Laurus camphora, L. , et l’au- tre , indiquée par Houttuyn , est encore mal connue. On le retrouve dans les racines du Laurus cinnajnomum , et sur-tout d’une va- riété ou espèce connue sous le nom de Capuru carundu , qui signifie Canelle camphrée. On assure que le Litsea chine nsis , Lam. , a des baies qui exhalent une odeur de Camphre. Cette présence du Camphre dans les plantes qui abon- dent en huile volatile , se trouve d’accord avec les observations faites depuis sur les huiles de Labiées ) et probablement toutes les huiles vo- ( 254 ) latiles de Laurinées en contiennent de même les élémens. Ayant de terminer cet article , j’ajouterai , i.° que si plusieurs espèces de Lauriers parais- sent se rapprocher davantage par leurs pro- priétés , des Myristicées que du Canellier , on ne doit attacher aucune importance à cette dif- férence , jusqu’à ce que les espèces qui com- posent ces genres respectifs soient mieux con- nues des botanistes j 2. 0 que les huiles volatiles extraites de la famille des Laurinées et de celle des Myristicées semblent , par leur viscosité , leur pesanteur et leur analogie avec la cire , composer un petit ordre particulier entre les matériaux immédiats des végétaux. 108. MYRISTICÉES. Myristicées . Brown., prod. 3gg. Les propriétés , comme les formes des Myris- ticées, ont du rapport avec celles des Laurinées $ on remarque dans toutes les espèces de Musca- diers que le suc qui suinte par l’incision de leur écorce est âcre , visqueux, assez abondant , de couleur rougeâtre , et qu’il tache le linge d’une manière assez durable $ leurs feuilles froissées exhalent une légère odeur de muscade $ le brou de leur fruit est d’une saveur âcre et { ü55 ) caustique , et ne peut servir d’aliment qu’aprèâ avoir subi une élaboration propre à l’adoucir $ l’Arille , qu’on connaît généralement sous le nom de Macis , présente une consistance un peu charnue , et donne à l’analyse un peu d’huile volatile très-odorante, et une propor- tion beaucoup plus considérable d’une huile fixe grasse et onctueuse \ le spermoderme ou Penveloppe de la graine présente ce même mé- lange de deux huiles , mais l’huile volatile y est dans une proportion plus grande } le péris- perme qui occupe la plus grande partie de l'a- mande est d’une consistance analogue au suif y et renferme une très -grande quantité d’huile grasse $ dans le Virola sebfera cet organe four- nit un véritable suif qu’on en extrait par l’im- mersion dans l’eau chaude : le périsperme des Myristicées renferme aussi une petite quantité d’huile volatile , phénomène fort rare dans le règne végétal 3 car les huiles volatiles sont pres- que toujours l’apanage des écorces et des par- ties extérieures des fruits et des graines. Toutes les espèces de Myristicées connues jusqu’à pré- sent présentent toutes les mêmes observations ? et ne diffèrent du Muscadier aromatique que par la quantité et la suavité de leur huile vola- tile ; ainsi , ce grouppe est un de ceux où l’a* nalogie des formes et des propriétés est la mieux prononcée. ( a56 ) ïop. PROTÉACÉES. Protece. Juss. , gen. 78. Leurs propriétés sont peu ou point connues. 110. THYMELÉES. Thjmeleœ . Juss. 7 gen. 76. Toutes lesThyinelées dont les propriétés sont connues ? offrent une grande ressemblance en- tr’elles : leur écorce est singulièrement caus- tique , comme on le remarque dans les Daphné mëzereum , Laure ola , Gnidium , Tarton - retira , et à un degré plus faible dans les Daphné Cneorum, Altaica > etc. Cette écorce appliquée à l’extérieur produit l’effet d’un vésicatoire 5 étant mâchée , elle cause dans la bouche et la gorge une chaleur douloureuse 5 prise à l’exté- rieur ? elle sert de purgatif drastique , et excite des tranchées douloureuses : sa décoction a eu quelques succès dans les maladies vénériennes. On emploie quelquefois la racine de ces diverses Thymelées, mais c’est uniquement à cause de l’écorce qui se trouve en abondance ; la partie ligneuse est insipide et inutile. L’activité de l’écorce de Daphné paraît tenir essentiellement. ( 2 5 7 ) diaprés l’analyse de M. Vauquelin, à i m prin- cipe âcre , soluble dans l’eau , peu volatil , ana- logue aux racines ou aux huiles solubles dans l’eau 5 peut-être aussi qu’une partie de l’actiyité des Daphnés tient à une résiné verte qui fait partie de leur écorce , et en général , comme l’observe M. Vauquelin, c’est presque toujours dans des matières résineuses ou huileuses , qu’il faut chercher la source des propriétés âcres du caustiques, qu’on observe dans les végétaux. La graine de ces mêmes plantés (1) offre des vertus analogues à celles de v l’écorce , mais qui paraissent moins dangereuses. Cette graine est un poison pour plusieurs animaux , excepté * dit-on , pour les oiseaux qui la mangent avi- dement. L’écorce .des Thyinelées offre encore quelques usages communs à plusieurs espèces. Ainsi, les fibres du liber de plusieurs Daphnés , de quelques Passerines , du Dirca et du Lagetta> offrent un réseao qui , selon son degré de force * est employé à faire des cordes , des fils ou des tissus semblables à de la dentelle. Le JDaphne gnidium et le Passerhia tinctoria servent , dans le Midi de l’Europe , à teindre la laine en une couleur jaune, qu’on change ensuite en vert par l’addition de V Isatis. (1) Cocco Gnidii semina , off. IJ ( 258 ) 111. S AN T AL AC ËE S. Santalaceœ. Brown. ? prod. 35o. Le bois du Santa lum album présente, comme on sait, une odeur douce et aromatique, et une saveur légèrement amère , qui paraissent tenir à un principe volatil et résineux : il est employé comme parfum $ on s'en sert en mé- decine à titre de titre de stimulant et de sudo- rifique. On connaît encore trop mal les autres espèces de cette famille pour savoir s’il en est qui participent aux mêmes propriétés ; les Thesium sont inodores , un peu astringens. 112. ELÉAGNÉES. Jilœagneœ. Brown. ? prod. 35o. Cette famille , réduite par M. Brown aux seuls genres Elæagnus et Hippophaë , 11e paraît offrir aucune propriété bien remarquable : leur écorce est astringente 5 les baies des Hippophaë sont très-légèrement acidulés et employées sous forme de sauce dans les alimens en Suède , et selon M. Smith , dans le Midi de la France. ( 25p ) n 3 . ARISTOLOCHES. Aristolochice . Juss., gen. 72. Les racines des plantes qui compqsent la fa- mille dlPAristoloches , sont toutes amères et douées de vertus toniques et stimulantes 5 mais leur application diverse , et le degré de leur force qui paraît assez différent , exigent , ce me semble , des expériences nouvelles et précises. Les espèces du genre Aristoloche ont été au- trefois vantées comme emménagogues , ainsi que leur nom l’indique , et plusieurs d’entre elles sont encore employées en Amérique contre la morsure des Serpens. Parmi les premières je citerai les Â. rotunda > longa , clemaûtis , en Europe 5 Y Aristolochia indïc a > aux Indes orien- tales 5 parmi les secondes , les A. anguicida et serpentaria , en Amérique ; VA. sempervivens , en Arabie : presque toutes ces plantes ont été ordonnées avec quelques succès comme fébri- fuges., principalement après la diathèse inflam- matoire et dans les fièvres malignes avec char- bons $ elles ont quelquefois agi comme purga- tifs ; ces dernières propriétés se retrouvent dans Y A s arum europœum ; mais ici nous trouvons de plus une vertu émétique, assez prononcée quand la racine est fraîche , mais qui se détruit ( z 6 o ) / soit par la dessication , soit par la macération dans le vinaigre. Le suc de l’Hypociste ( Oytmus hypocistis y L. ) , était aussi autrefois donné comme tonique , et sur-tout comme astringent $ ce suc contient en effet de l’acide ga|ÿgue , et il offre la singulière propriété de précipiter la gélatine, quoiqu’il ne contienne point de tan- nin (1)5 mais le Cytinus fait-il bien réellement partie de la famille des Aristoloches ? 114. EUPHORBIACÉES. JEuphorbiœ . Juss. , gen. 384. Les 'Euphorbiacées ne sont presque con- nues que par leurs effets délétères sur l’économie animale. Toutes ces plantes renferment un suc propre laiteux , ordinairement très-abondant , âcre , caustique lorsqu’on l’emploie à l’exté- rieur, et qui agit comme violent purgatif ou comme émétique lorsqu’on l’emploie à l’inté- rieur^ ce suc paraît être de nature gornmo- résineuse, et ses propriétés âcres et purgatives résident sur-tout dans la partie résineuse ; celle-ci paraît être souvent incomplètement oxigénée , et alors elle se rapproche des huiles (2) Voyez l’analyse de M. Pelletier, Bull, de Pharm. 9 i 8 i 3 , p. 290. ( 2t5l ) essentielles par sa volatilité et quelquefois par son arôme. C’est ainsi qu’on peut concevoir comment , dans une famille entièrement véné- neuse , se trouvent plusieurs plantes , telles que les Croton aromaticum > L. , C. balsami - ferum ; L. , et C. niveum dont le suc est aro- matique et employé comme vulnéraire à l’exté- rieur $ ces exemples tendent à expliquer com- ment l’écorce de Cascarille qui , comme on sait , est amère , aromatique , stomachique et fébri- fuge , peut appartenir à cette famille , comme on le pense en général sans en avoir de preuves directes. Les bois d’Agolloche etd’Aloës sont en- core regardés par plusieurs naturalistes comme provenant de certaines espèces d’Euphorbiacées ; la volatilité du principe âcre et caustique des Euphorbiacées se fait connaître d’une manière bien cruelle dans l’ Hippomane biglandulosa > dont l’ombre et l’attouchement seul sont véné- neux j dans l’ Euphorbia tirucalli et Y Eæcœcaria dont les émanations attaquent les yeux ) dans la racine du Jatropha manihot qui est forte- ment vénéneuse tant quelle n’est pas soumise à l’action du feu j et qui , débarrassée de son principe âcre et résineux, laisse une fécule mucilagineuse connue sous les noms de manioc et de cassave $ le suc des Euphorbes est telle- ment caustique qu’il suffit de se frotter la ( 2 6 2 ) peau avec celui de Y H ippomatie , de V Eu* phorbia canarien sis , E. tirucalii , et E, chiarum , de Y Adelia venenata 9 Forsk , pour exciter des pustules et une inflammation dou- loureuse ÿ celui de l’Euphorbe officinal est appliqué sur les os cassés ou fracturés pour faciliter la séparation des parties mortes ; on se sert à Java de Y Euphorbia tirucalii > pour le même, objet : pris à l'intérieur , il est forte- ment stimulant et tonique ; il agit selon les doses comme purgatif dans Y Euphorbia , E . portulacGÏdes 3 E. officinarum , etc. ; comme émétique dans le suc de Y E. officinarum > comme diurétique dans le Ehyllanthus uri- iiaria , ou enfin comme sudorifique dans les Euphorbia tirucalii , E. tribuldides et E „ ca- ne s cens. Les racines de la plupart des Euphorbes vivaces sont remarquables par leur propriétés émétiques $ Y Euphorbia ipecacuanha a sou- vent été employé à la place du véritable Ipeca-- cuanhâ , et M. Loiseleur a montré que les E. perardiana , E. cyparissias , et E. sylva tic a j {missent de la même vertu \ observons cepen- dant que ces racines peuvent bien être com- parées à î ’lpécacuanha quant à la propriété d’exciter le vomissement, mais qu'elles pa- raissent absolument dénuées dé cët'te action tonique que l’ïpédaeuanha exerce sur l’ap- pareil digestif! ( 263 5 Le suc des Euphorbes intéresse encore la ^‘fchimie et la chirurgie en ce qu’il paraît ren- fermer les élémens du Caoutchouc. Cette ma- tière extraordinaire se retire de Y Idevea guya- nensis , Aubl. $ on en retrouve des traces dans le Ricin , dans quelques Euphorbes , dans le ÇastiUoa elastica de Cavanilles , le Commz- phora madagascariensis , Y Esccœcarïa agal- locha , Y Hippomane mancenilla 3 la Hura crepitans 9 les Jatropha , les Mabea, les Om~ pkalea ; le Flukenetia et dans le Sapium auçiir parium , dont le suc est tellement visqueux qu’il sert comme de glu pour prendre les perroquets. On retire enfin , par diverses préparations chi- miques , du suc du Crolon tinclonum / la cou- leur bleue connue sous le nom de Tournesol . Dombey retrouve la même propriété dans le Crotum tricuspidatum du Chili , et peut-être que des préparations chimiques analogues dé- velopperaient cette cotdeur dans toutes les Euphorbiacées. La graine des Euphorbes participe aux pro- priétés actives du suc de ces plantes \ mais ici M. de Jussieu nous offre une observation pi- quante, savoir : que l’embryon des Euphor- biacées est violemment purgatif ou émétique, tandis que leur périsperme est rempli d’une huilé douce , saine et agréable an goût 5 ainsi 3 ( J oii mange en Amérique le périsperme de Y OmA phalea et de YHevea , après l’avoir dépouillé de l’embryon (i) y ainsi , l’embryon seul du Ja- tropha cure as du Jatropha multifida , de F Euphorbia laihyris , du Croton tiglium , est un purgatif drastique ou émétique des plus violons ? propriété qui se retrouve dans la graine de presque toutes les Euphorbes et de Y A uda du Brésil , décrit par Pison y ainsi ^ l'huile de Ricin est un purgatif doux lorsqu’on la fait avec le périsperme seul, et devient drastique lorsqu’on y laisse l’embryon : lait que M. Deyeux vient de vérifier par des expériences très-exactes. Comme l’huile de l’embryon sort avec difficulté , il se trouve qu’en pressant peu la graine ou en retirant l’huile par l’in- fusion de l’eau bouillante on obtient l’huile du périsperme qui est douce. Plusieurs graines d’Euphorbiacées produisent de l’huile qu’on en retire par expression , et qu’on emploie pour la lampe y telle est en particulier le Driandra oleifera . On a même proposé de cultiver en grand Y Euphorbia lathyris afin d’employer son huile pour la lampe , et vu la grande quantité que cette plante en peut fournir ( environ trois (i C’est sans doute après avoir ôté l’embryon qu’on mange la graine du Croton moluccanum . ( 265 ) onces par pied ) ce procédé mériterait l’atten^ tion des cultivateurs s’il n’était pas dangereux de répandre dans le public une huile qui serait toujours vénéneuse parcequ’il serait im- possible qu’on prit soin d’ôter l’embryon des graines avant de les soumettre à l’action de la presse. Au reste M. Solimani pense , que par des lotions reitérées dans une eau légèrement imprégnée d’acidé sulfurique ôn pourrait dé- harasser l’huile de Ricin de tout son extractif et la rendre susceptible" de servir aux usages alimentaires ; ce procédé aurait sans doute un effet analogue sur les huiles des autres Eu- phorbiacées. n5. MONIMIÉES. Monimiec e. Juss. ? Ann. Mus. 14 , p. i3a. Y 1 ' Les limites botaniques de cette famille sont encore mal déterminées ; les espèces qui la composent sont peu nombreuses , rares dans la nature , éparses dans dans des pays très-di- vers et par conséquent mal connues quant à leurs propriétés ; celles-ci paraissent offrir beau- coup d’uniformité ; toutes les parties corticales et foliacées exhalent une odeur aromatique que les voyageurs ont souvent comparées à celles des Lauriers ou des Myrtes. Cette odeur ( 2.66 ) est très remarquable dans le Laurelia , Juss. * ou Pavonia > Fl. per. , dg.ns le Boldea , Juss. ,ort pLUizia Fl. per. ? dans V A therosperma , Labill. > dans le Citrosma 9 FL per., etc. Elle se trouve dans quelques espèces de Calycanthus , quoique ce genre ne tienne à cette famille que par des rapports peu intimes. 116. URTICÉES. TJnicœ . Juss. , gen. 400. Les Urticées se divisent naturellement en plusieurs grouppes tellement distincts , que pro- bablement ou les considérera un jour comme autant de familles separees , quoique voisines sous certains rapports $ les chefs de file de ces familles seront les Poivriers , les Figuiers et les Orties proprement dites. Nous devons donc nous attendre à trouver des différences notables dans les propriétés de ces plantes si diverses par l’organisation $ mais nous verrons du moins les propriétés de ces végétaux assez exactement circonscrites d’après les caractères génériques. La tribu ,des Figuiers 011 des Àrtocarpées (1} (i) Ce nom qui vient de celui de \! Artocarpus indique à-la-fois le genre le plus important de la tribu et le ca- ractère d’avoir le fruit cliarnu. ( 2Ô 7 ) offre en général des végétaux remplis d’un suc propre laiteux , très-abondant dans les Figuiers , peu abondant dans les Mûriers et les autres genres de la tribu : ce suc , comme la plupart de ceux qui ont la consistance laiteuse, ren- ferme une certaine quantité de Caoutchouc $ ainsi on en retire en divers pays de V Âmbora , du Cecropia , de l’Arbre-à-pain , du Bagassa y des Ficus toxicaria y anthelmi ntica , reli~ giosa , etc., et même de notre Ficus carie a quoiqu’on petite quantité ; le suc des Artocar- pées est âcre, caustique et fortement stimulant dans quelques espèces ; quelquefois absolu- ment vénéneux comme on le voit dans plusieurs Figuiers , tels qne le Ficus toxicaria et sur-tout dans VAntiaris toxicaria de Lechenault , {Jpo toxicaria , Pers.) qui fournit à Java le poison connu sous le nom d y Upas-antiar, La racine des plantes de cette section a une écorce douée de propriétés âcres et actives $ elle est amère , âcre et purgative dans le Mûrier noir , souvent émétique dans le F) or s ténia brasiliensis connu dans l’Amérique méridionale sous le nom de Caapia ; amère, aromatique, chaude, stimu- lante dans le Contrayerva , qu’on emploie eu Amérique soit comme alexitère pour prévenir l’effet des morsures venimeuses , soit comme emménagogue , soit même à moindre dosé ( *68 ) pour fortifier la poitrine. On emploie sous le nom de Contrayerva , non-seulement le Dors - ténia contrayerva , mais les D ors ténia drahena et Houstoni , et même le Dorstenia brasiliensis . Par une bizarrerie singulière., ces Ârtocarpées , munies d’un suc âcre et presque vénéneux, portent des fruits remarquables par leur dou- ceur et leur salubrité , et l’on peut même re- marquer que ces fruits , avant leur maturité , sont pleins de lait âcre et pair conséquent délé- tère , qu’à leur maturité ce lait disparaît et est remplacé par une chair douce et comestible ; dans la plupart des Artocarpées c’est le récep- tacle même des fleurs ou si l’on veut leur pé- doncule qui devient charnu et susceptible de servir de nourriture : c’est ce qu’on voit dans le Figuier ; ailleurs ce sont les enveloppes mêmes des fleurs qui deviennent succulentes , se sou- dent entr’eiles et avec le pédicule , et forment une espèce de fruit aggrégé , comme on le voit dans l’arbre à pain et le Mûrier. Cette structure nous conduit au grouppe (i) (i) Ce grouppe, dont j’avais proposé la formation , soit dans la première édition de cet ouvrage , soit dans la Théorie Elémentaire , vient d’ètre décrit comme une fa- mille distincte , sous le nom de Piperacées , par M. rs de Humboldtj Bonpland et Kuntli. (Nov. gen . , i > p> 0 ( *«9 ) nombreux et mal connu clés Poivriers > dont la baie est , comme on sait ? piquante , aroma- tique ? chaude et stimulante $ propriétés qui se trouvent , non-seulement clans le Poivre or- dinaire (i) ? mais dans le Piper cuheba , le JP. longum ? etc ) dans plusieurs espèces , telles que les P. carpunja et P, heterophyllum du Pérou $ dans presque toutes les Peperomia , les feuilles elles-mêmes participent à ces proprié- tés stimulantes et stomachiques. Le Piper anisatum , récemment décrit par MM. Huin- boldt ; Bonpland et Kunth , et que les Espa- gnols d’Amérique connaissent sous le nom d ' Anicillo , exhale par ses feuilles et ses fruits une odeur d’Anis ? et la décoction de ses baies sert à laver les ulcères. Le Betel , cette pré- paration si âcre et si excitante > par laquelle les Malais cherchent à soutenir leurs forces digestives contre faction débilitante de la cha- leur humide de leur climat , le Betel ? dis-je , a reçu son nom du Piper betel , qui en fait la base : on le remplace à Amboine par le Piper siriboa \ à Otahiti et dans les autres îles cle l’Océan pacilique, on emploie le suc du Piper inebrians pour faire des boissons enivrantes j et nous allons voir tout-à-l’heure cette même (1) Piper aromaticum , La m. —-JP. nigrum , Lin. ( 2 7 ° ) propriété narcotique dans quelques véritables Urticées. Parmi les Orties proprement dites , nous ne trouverons aucun fruit mangeable , parce qu’ils ne sont nullement charnus : leurs graines sont un peu oléagineuses ; leur herbe est le plus souvent amère , comme on le voit à un haut degré dans le Houblon , et comme on le re- trouve dans le Datisca , et même dans le Chanvre $ dans ce dernier genre la décoction de la plante fournit un suc éminemment nar- cotique , et qui dans l’Orient fait la base d’une préparation enivrante connue sous le nom de Haschissh . Toutes ces plantes, lorsqu’elles sont inodores , servent d’aliment à l’homme et aux animaux dans leur jeunesse , comme on le voit dans le Houblon et dans l’Ortie. Le seul trait de ressemblance entre les divers genres des Urticées , est la texture de l’écorce qui permet d’en fabriquer du fil et du papier ; ainsi , on se sert dans divers pays , à la place dé notre chanvre, du Cannabis indica , du Houblon , de l’Ortie , de l’Arbre à pain : on fait du papier , non-seulement avec le Mûrier à papier , mais encore avec notre Ortie , avec nos Mûriers. Le bois de presque tous les Mû- riers donne une couleur jaune.